dimanche 3 avril 2011

The Spartan Race


The Spartan Race, ça veut dire quoi ? Vous êtes sans doute une poignée à ne pas maitriser assez bien la langue de Sheskpi… de Shakaisp… de Shakespir… à ne pas maîtriser assez bien l’anglais ou à n’avoir pas vu le film 300 de Zack Snyder pour comprendre ce titre. Littéralement, je le traduirais par « La Course Spartiate », référence aux célèbres antiques guerriers grecs de Sparte, reconnus comme étant les meilleurs combattants de leur époque. Mais comme tout bon fan de 300 qui se respecte, je ne donnerais pas à mon article une traduction française, parce que bon, hein, on commence comme ça et on fini par donner des coups de latte au premier venu menaçant son pays d’esclavage et de mort en criant « C’est cela Sparte ! », et personne ne veut en arriver là.

Avant de parler de cette fameuse course, je pense qu’il serait intéressant de faire une introduction sur le film 300 et son histoire, car mon esprit affûté me chuchote que les goûts cinématographiques de certains de mes lecteurs les plus fidèles ne les ont pas forcément guidé vers ce chef d’œuvre testostéronesque.

300 est l’adaptation cinématographique d’une bande dessinée de Frank Miller racontant la célèbre bataille des Thermopyles dans laquelle les Grecs défendirent leurs pays contre l’invasion Perse menée par l’enculé l’empereur Xercès. Historiquement, la bataille est restée célèbre car seuls 7000 Grecs sont venus défendre la « passe » des Thermopyles, chemin entre les montagnes large de quelques mètres seulement par lequel devait passer l’armée Perse, qui comptait plusieurs centaine de milliers d’hommes. Au bout de 3 jours de bataille, par un acte de trahison, les Perses découvrirent un passage les permettant de contourner la passe, ce qui rendait toute défense impossible. Les guerriers Grecs s’enfuirent donc. Tous, sauf les 300 guerriers Spartiates et leur roi, Léonidas (enfin, historiquement il aurait aussi forcé les quelques Thébains et des guerriers d'une autre ville à rester, pour que ces villes entrent en guerre contre la Perse... mais bon, on va dire qu'il n'y avait que les 300 Spartiates, parce que c'est plus cool). Léonidas n’ayant pas reçu l’autorisation de mener son armée à la guerre (les prêtres de sparte considérèrent que se battre durant les fêtes de l’été était de mauvaise augure… cette bande de branleurs !), il décida donc d’y amener sa garde personnelle composée des 300 meilleurs guerriers de Sparte. Les guerriers Spartiates se battirent jusqu’à la mort, et opposèrent une telle résistance à l’armée de Xercès que ce dernier, fou de rage, démembra le corps de Léonidas dans le but de l’humilier autant qu’il le fut lui-même. Mais la mort du roi de Sparte, au lieu d’être prise comme un avertissement comme il l’espérait, incita plutôt la ville à partir en guerre, cette fois-ci avec la totalité de son armée, et en compagnie d’autres armées Grecques. Et cette fois, ils bottèrent virilement le précieux cul de Xercès.

300 raconte cette histoire en se concentrant uniquement sur les 300 guerriers Spartiates et leurs valeurs morales « Pas de retraite. Pas de reddition. Jusqu’à la mort. » Tout en se battant en slip en cuir, uniquement vêtu d’une cape rouge, d’un casque, et d’un bouclier pour les protéger, car les mecs ils sont tellement trop bon qu’ils ont même pas besoin d’armure ! Bref, ce film est vite devenu une oeuvre culte dans notre petite bande d’amis, et très vite dès qu’un challenge un peu plus dur que d’ordinaire se présentait à nous, nous nous mettions dans la peau d’un guerrier Spartiate, poussions le célèbre « AHOU ! », cri de guerre du film, et chargions tête baissée dans la masse de défi. Et toujours, nous en ressortions victorieux.


La bande annonce de 300

Aussi, lorsque j’ai entendu parler de cette course directement liée à la légende Spartiate et au film de Zack Snyder, j’ai eu du mal à contenir mon excitation. Cette course n’est pas juste une course, c’est une épreuve supposée nous pousser à nos limites, c’est un défi de 5 kilomètres parsemés d’obstacles que seuls de vrais guerriers Spartiates auront le courage de franchir, c’est un véritable truc de ouf !

Vous pouvez même regarder la vidéo qui m’a fait découvrir la course, un avant goût de ce que je vais vivre dans les prochains paragraphes de cet article.



Plutôt intense, non ?

Je ne vais pas participer tout seul. L’amie qui m’a fait découvrir la course, Maggie, sera là, ainsi qu’un de ses ami sportif : Frank. La colloc’ de Maggie, Heather, sera également présente, tout comme le père de cette dernière pour prendre des photos. La mère de Maggie sera là pour le soutien moral.

Les Partants, de gauche à droite : Heather (qui porte un tee-shirt blanc...) Maggie, votre blogger préféré, Frank.


Il y a différents types de courses, mais seule la plus petite prends place à Austin (5 kilomètres donc), la plus grande étant longue de 48 heures (sans surprise, moins de 20% des participants la finissent.) J’étais un peu déçu de devoir choisir la plus courte (il y avait d’autre courses intermédiaires). Mais j’étais un abruti (pensée d’après course). Heureusement que j’ai choisi la plus petite ! La première des raisons est que je ne cours jamais : j’aime pas ça. Autant j’adore le sport, autant courir pour courir, c’est pas mon truc (j’ai l’endurance d’un hareng fumé, ce qui n’est pas franchement idéal pour une course d’endurance). Je déteste courir, mais j’adore le défi que peut poser un obstacle, c’est ça plus que tout qui m’a motivé à faire cette course. Je misais donc sur le fait que les obstacles allaient ralentir le rythme, et que j’allais pouvoir m’y reposer. Bien sûr, j’avais tort.

Petite précision : je ne cherche pas à gagner, loin de là. Finir la course est le seul objectif en vue ici, je n’ai pas le physique pour prétendre à une victoire quelconque. Passer la ligne d’arrivé fier de moi sera une victoire en soit. C’est d’ailleurs pour ça que chaque finisseur se voit offrir une médaille. Une médaille qui, selon certaines mauvaises langues, ne ressemble pas à un casque grec mais à un Transformer… c’qu’il faut pas entendre… Bon, on va quand même essayer de pas la passer dernier, cette ligne d’arrivée, hein, mais on va pas non plus être trop optimiste.

D-Day arrive enfin. Le groupe vient me chercher en voiture à 9 heures du mat’ (le site de la course est à une heure de route d’Austin.) En chemin, nous nous interrogeons sur toutes les différentes manières dont nous allons probablement mourir durant cette course. Nous mettons également au point une stratégie d’attaque : dès qu’il y aura un trou, un petit ravin, quelque chose avec une pente, il sera de notre devoir d’y précipiter les coureurs nous entourant à coups de pied en hurlant « THIS IS SPARTA ! »

Nous arrivons au ranch ou aura lieu la course une heure avant le départ, comme demandé par les organisateurs. Il y a 8 vagues de partants, une par demi-heure, soit environ 1600 participants au total. Notre course compte entre 250 et 300 partants, majoritairement hommes. La moitié de ces derniers sont torse nu, affichant une musculature digne de dieux grecs, les autres ressemblent tous à des coureurs confirmés. Une partie d’entre eux s’étirent et s’échauffent, les autres discutent. Nous apprenons par le biais de conversations que nombre d’entre eux se sont entrainés de longues semaines (voir de longs mois pour certains) pour se préparer à cette course. Ah…

Je retire les mains de mes poches, et commence à m’étirer, l’esprit un petit peu plus inquiet (mais franchement pas trop, je crois que sur le moment je n’avais toujours pas réalisé que 3 miles ça faisait 5 kilomètres… non pas que 5 kilomètres cela soit beaucoup… quand on marche… ou en voiture… mais quand on cour ? haha…).

Bref, je commence à revoir mes estimations concernant la « facilité » de cette course (le fait que cela soit la plus courte a étrangement automatiquement fait l’association avec « simple », mais heureusement elle n’était pas simple, car sinon il n’y aurait aucune gloire, et bien peu d’intérêt pour un article de blog).

Maggie m'accrochant mon numéro dans le dos. 4460. Un beau numéro, convenons-en.


Un crieur de l’organisation nous explique le principe des obstacles : nous n’avons droit qu’un un seul essai par obstacle, et si nous ratons, nous devons faire 30 pompes sautées (une pompe, on se lève, on saute, on redescend, une autre pompe, etc), et ce pour chaque obstacle de la course. Il y a une dizaine d’obstacles, de quoi risquer d’en rater quelques-uns. Ça rend déjà la chose plus excitante : pas le droit à l’erreur. Des bénévoles seront présents à chaque obstacle pour nous surveiller et nous imposer les pompes en cas de ratage.

Nous observons les coureurs de la précédente course arriver au fur et à mesure, et pouvons commencer à nous faire une idée des obstacles : un mur d’escalade en bois en longueur et non en hauteur (rien de bien sorcier vu d’ici), du tir à la lance (comme les guerriers de l’époque…) encore une fois ça ne m’inquiète pas plus que ça, mais je ne vois pas une seule personne de la trentaine de participant réussir à planter sa lance, ce qui me laisse penser que les lances sont possiblement dures à manier. L’obstacle suivant est un mur de bois lisse légèrement incliné que les coureurs doivent franchir à l’aide d’une corde. Bon... enfin le dernier obstacle est plus excitant : juste devant la ligne d’arrivée se tiennent deux colosses en tenu spartiate munis de cotons tiges géant avec lesquels ils maravent la gueule des coureurs. Aaah, ça j’aime ! Je suis entrain d’envisager la meilleure façon de plaquer le moins costaud des deux au sol, histoire de faire quelque chose d’orignal, lorsqu’on nous demande de prendre place pour le début de la course.

Nous prenons donc place, excité, au milieu du plotons. Un mec habillé en Spartiate, un micro à la main, nous motive durant une bonne minute à coups de citations viriles. Le hurlement de la foule, « AHOU ! », juste avant le coup de canon donnant le signal de départ me donne des frissons.

Nous nous élançons à petite foulées pour ne pas marcher sur les coureurs nous précédant. J’ai oublié de préciser qu’au vu des obstacles visiblement faciles de la fin de course, la mère de Maggie, en bonne forme, a décidé de participer, ce qui me laisse plus que perplexe : bien sûr les obstacles ont l’air assez simple, mais on a tous vu la vidéo… enfin, je suis tout de même impressionné qu’une quinquagénaire bien mûre prenne place dans la même course que moi. Elle est visiblement la plus âgée des participants.

Au bout d’une centaine de mètres, je me détache de Maggie, sa mère et Heather pour suivre Frank qui se fraye un chemin à travers les participants. Nous grignotons place sur place jusqu’à nous placer dans le tiers de tête. Arrive alors le premier obstacle : un mur de feu (ou, devrais-je dire, un muret… qui pouvait être assez haut par moments quand même). Rien de bien dangereux, mais c’est excitant, et un bon premier obstacle. Je le saute joyeusement, me faisant arroser au carsher en même temps (sans doute pour éviter toute mauvaise brulure). Je découvre quelques pas plus loin une marre de boue, elle aussi alimentée au carsher. Pas moyen de sauter par-dessus, je m’élance donc dedans, et me retrouve en quelques secondes les pieds trempés de boue jusqu’aux mollets. Les organisateurs nous ayant prévenu de prendre de vielles pompes, mes chaussures sont bien évidemment trouées, et c’est donc de l’intérieur que je sens la boue couler sous mes orteils. Amusant, certes, mais avoir les pieds glissant (dedans et dehors) dès le début d’une course est moins excitant qu’il n’y parait.

Ça revient au même que de sauter par-dessus un feu de camp. Notez l'air paisible de mon visage, on dirait presque que je dors.


Je continue de suivre Frank qui dépasse de plus en plus de monde. Je suis conscient qu’il n’est pas un coureur amateur, mais un bon semi pro, et que je ne pourrais en aucun cas continuer à le suivre à ce rythme. Mais tant que je me sens bien, autant en profiter. La respiration étant la clef de l’endurance, je prend le rythme que m’a appris ma mère lorsque je courais les cross du collège : deux inspirations rapides par le nez, deux expirations rapides par la bouche. Un rythme presque élégant. Le souvenir du cross en ramène également un autre : au cross, j’étais super nul.

Bon, on va laisser ce dernier souvenir de côté, je préfère me concentrer sur l’idée que je fais beaucoup de sport maintenant, même si le volleyball ne travaille pas forcément mon endurance.

Au bout de 5 ou 6 minutes, nous pénétrons dans un petit bois, et le premier véritable obstacle naturel se présente alors : une côte. Mais pas une petite côte de tapette hein, une vrai côte de malade ! Une côte de bâtard ! Une côte de porc !

Je la monte en trottinant doucement, et c’est là que j’ai laissé partir Frank. Je savais que si je forçais dans la montée, j’allais me déchirer les poumons, et ça serait fini. Au milieu de la côte je double quelques coureurs qui ont commencés à marcher. Je ne peux pas les blâmer, ça fait même pas dix minutes qu’on est parti et j’ai déjà un point de côté, ce qui m’énerve car mes jambes sont encore bien fraiches. Arrivé au sommet, ça redescend aussitôt. Je trottine doucement de peur de me tordre la cheville (c’est assez raide pour ne pas être reposant, il faut jouer les muscles des jambes pour ne pas se laisser emporter).

Et une fois en bas, c’est une nouvelle côte qui se présente, encore plus haute que la précédente, et couverte de caillasse. Le sol n’étant plus stable, je décide de la monter en marchant, tout en contenant un juron destiné à ces vicieux organisateurs qui essayent (avec succès) de nous épuiser dès le début de la course. De toute façon je suis crevé et marcher est une bonne excuse pour récupérer mon souffle. Mon égo se console à l’idée que presque personne ne m’a doublé durant cette monté : je ne suis pas le seul à être crevé. Cependant parmi le peu qui me sont passés devant se trouvaient une ou deux filles, et même si ce sentiment est probablement macho (en particulier vu que toutes les filles de cette course sont très certainement des coureuses confirmées) ça pique quand même un peu d’être laissé derrière.

J’arrive finalement au sommet, ou certains participants attendent leurs copains (et en profitent pour se reposer en les encourageant (engueulant pour certains, car il y a parmi nous un groupe de militaires pur et durs, venu gagner les galons de Spartiates). Ils me dépassent de façon assez déplaisante, avec le genre d’encouragement moqueur qui me donne envie de leur montrer de quel bois les français se chauffent. Bon, certes il fait super chaud, et je suis crevé, donc ça sera pour une autre fois.

Deux collines sont encore devant nous, que nous enchainons l’une après l’autre. Nous n’avons pas eu de distance plane depuis un long moment, et ça manque. Je continue de marcher vite dans les montés et trottiner doucement dans les descentes. Nous arrivons finalement au sommet de la dernière colline, et à partir de là ça ne descend plus. Nous continuons sur du faux plat pendant un moment (ce qui n’est pas reposant du tout), puis atterrissons sur un nouvel obstacle : une série de 6 murs de bois de ma taille. Il faut passer par-dessus deux d’entre eux, à travers deux autres (via des pneus) et ramper (ou plutôt rouler) sous les deux derniers, le tout aléatoirement. C’est plus fun qu’autre chose, je ne vois personne faire les pompes, mais les bénévoles chargés de surveiller les obstacles nous donnent le ton de ce qui nous attendra le reste de la course : nous nous faisons hurler dessus, exhortés d’aller plus vite, toujours plus vite ! Exactement à l’image des entrainement Spartiates, ce qui m’amuse beaucoup.

Je reprend ma course, plus fatigué par les obstacles que je ne veux l’admettre : en temps normal, passer ces murs de bois accélèrerait à peine ma respiration, mais le but des collines était de nous tuer dès les premières minutes, et c’est réussi.

Mais la volonté d’avancer prends le dessus, et je continue de courir, essayant de suivre la coureuse de devant, qui un rythme qui me convient, et un postérieur qui me motive. S’en suit une longue période de course dans la forêt, constitué de mini pentes, côtes, obstacles naturels. Un ensemble qui fatigue de plus en plus, et il devient de plus en plus dur de ne pas se résigner à marcher. Mon point de côté me déchire la poitrine, et j’accepte l’idée qu’à un moment ou un autre je vais devoir marcher pour le laisser passer.

Au bout de bien trop longtemps, l’obstacle suivant se présente : une série de planches planté dans le sol dans leur longueur, ne laissant dépasser que la tranche, haute de 20 centimètres. Chaque parcours est donc composé de 8 longues planches placées les unes après les autres de façon à zigzaguer, et le but est de marcher en équilibre le long de cet obstacle large de 3cm sans tomber. Bien sûr, n’étant perché que de 20 centimètres, ce n’est pas la chute que je crains, mais les 30 pompes sautées que cela entrainerait. Il y a une dizaine de parcours de planche, pour que plusieurs coureurs puissent les utiliser en même temps. Je monte doucement sur la première planche, et décide de prendre mon temps. J’ignore les cri des bénévoles qui me hurlent de me magner le cul, et souri en voyant que ceux qui essayent d’accélérer perdent l’équilibre et s’en vont tristement faire leurs pompes.

Nous ne sommes qu’une poignée à finir l’obstacle sans tomber, mais ce n’est pas ça qui me rend joyeux, mais le fait que j’ai largement eu le temps de récupérer mon souffle, et que mon point de côté a disparu. Je dépasse la vingtaine de coureurs faisant leurs pompes et me dirige vers l’obstacle suivant, situé à seulement quelques mètres de là.

Il s’agit ici de tracter en courant et à l’aide d’une corde un rocher super lourd sur 30 mètres aller, 30 mètres retour. Si on marche, on pompe. Je mêle mes grognements d’effort à ceux des autres coureurs, bien que ces derniers aient souvent une carrure qui fait de cet obstacle un jeu d’enfant. Frimeurs. Ce n’est pas le cas pour moi, et quand je le termine, je suis autant crevé que lorsque je suis arrivé en vu de l’obstacle des planches. Ils avaient donc prévu que les planches seraient reposantes. Bien pensé, bande d’enfoirés.

Je continue la course à travers bois, mon élégante respiration nasale/bouche s’étant à présent transformé en souffle de taureau en rut. Je me résous à marcher sur de courtes distances plutôt que de récupérer mon point de côté. Seul un ou deux coureurs me dépasseront durant ces instants de faiblesse, ce qui m’aide à ne pas trop culpabiliser.

Je n’ai aucune notion de la distance parcourue, juste que cela fait entre 20 et 25 minutes que nous sommes partis. Je n’ai également aucune idée de combien de temps il faut pour finir la course, ce qui rend dur de s’accrocher à un objectif. Il me reste juste l’idée fixe de continuer de courir, et chercher à chaque pas la volonté de ne pas m’arrêter.

De mini liens se créés avec des voisin d’un instants, ces coureurs aléatoires avec qui je partage 500, 700 mètres. Un encouragement, retenir une branche, prévenir d’une racine, d’une pente soudaine.
Gémir de concert à la vue du prochain obstacle.

Les barbelés. Je n’ai jamais rampé sous des barbelés, mais j’en ai toujours été curieux. Cela m’aide à positiver en commençant l’obstacle. Il y a assez de place pour deux personnes, je prends donc la place de droite. Il n’y a pas de boue comme je m’y attendais, mais c’est pire au final : le sol terreux est couvert de petits graviers qui griffent les bras, les jambes, le torse, et ce bien que je porte un tee-shirt. Au bout de dix mètres à ramper, j’ai perdu tout intérêt pour ramper sous des barbelés. C’est chouette un moment, mais là ça y est, le moment est fini, c’est nul ! Je veux que ça finisse ! Maintenant ! Tout de suite !


Là je souris parce que j'ai réalisé que j'allais être pris en photo dans cette position. Le sourire vient aussi du fait que je suis encore dans la première moitié du parcours, et encore un minimum excité par ce rampage sous les barbelés. Après, je souriais plus du tout.

Mais bien sûr ça ne fini pas. Je n’avais pas fais attention à la longueur du parcours, mais il se révèle faire entre 30 et 40 mètres. Ça paraît peu, mais ce sont quelques très longues minutes à ramper, chaque muscle commençant à bruler les uns après les autres. J’utilise mes bras quand mes jambes sont mortes, j’utilise mes jambes quand mes bras sont morts, j’alterne un bras une jambe quand je n’ai plus rien de fonctionnel. Et quand chaque membre de mon corps est trop fatigué pour faire le moindre effort, je commence à jurer, en français, en anglais, joignant ma litanie d’insultes à celle déjà longue de mes prédécesseurs. Les bénévoles nous gueulent toujours dessus, disant qu’on ralenti tout le monde. Ça nous donne une cible sur laquelle se défouler un instant, ce qui offre un léger regain d’énergie : la colère. Grace à cette dernière je continue, refusant de m’arrêter.

Maggie me racontera plus tard qu’elle s’est défoulée sur un bénévole qui lui disait que maintenant qu’elle avait passé la moitié, c’était plus simple (soit disant les barbelés étaient un peu surélevés… ce qui était faux, ou disons plutôt que je ne l’ai très certainement pas ressenti. Ajouté à ça le fait qu’après la moitié de l’obstacle le corps entier brule de douleur et les muscles refusent de fonctionner, ma chère amie a pris un plaisir bien mérité en traitant ce vil bénévole de menteur. L’anecdote me fait sourire, si j’avais adressé la parole à l’un d’eux j’aurais été bien moins sympa.

En attendant je suis toujours sous ces saletés de barbelés, rampant (ou plutôt me trainant) derrière l’homme qui me précède. J’étouffe la bouffée de désespoir qui m’envahi à la vue du parcours tournant sur la gauche : en me plaçant à droite, j’ai plus à parcourir que les autres. J’ai de la terre sur le visage, dans la bouche, dans les yeux, mais plus rien ne compte que la fin des barbelés, enfin en vue. Plus que quelques mètres, très certainement les plus long de ma courte vie. Je fini uniquement à l’aide de mes bras, en me hissant en avant, puis émerge enfin « à l’air libre ». Je prends le temps de jurer encore un peu, et de reprendre mon souffle, mais l’effort m’a laissé fébrile, et je sens les premiers signes de mon estomac se rebellant. Je trottine doucement pour laisser le temps à la nausée de refouler, puis reprend une allure plus rapide. L’épreuve la plus dure est derrière moi : tout ne peut qu’aller mieux maintenant.

Une pensée me tracasse : certains participants ayant couru les précédentes courses étaient en effet tachés de boue, certains plus que d’autres, mais aucun n’était recouvert de terre comme je le suis actuellement. Mon tee-shirt normalement gris est marron de boue, camouflé sous une épaisse couche de terre que ma transpiration a agrippé au passage. Mais être couvert de terre ne me gène pas : ça prouve aux yeux de tous que je me suis donné à fond. Et puis je ne suis pas le seul bien sûr, tous les participants sur lesquels je pose les yeux semblent sorti droit d’un terrier. Un terrier très très sale.

Le corps humain a une limite, et je sens que je m’en approche dangereusement. L’épisode des barbelés m’a sérieusement malmené le système interne, et un effort trop poussé mènera directement à la catastrophe : un français sur le bord du chemin entrain de vomir ses tripes. Et on veut pas ça.

Aussi, lorsque je découvre l’épreuve suivante, ce n’est pas la gène attendue qui m’assaille, mais un grand plaisir. Il s’agit d’un petit étang, de 30 mètres de diamètre. Un mec devant moi y rentre à petits pas, essayant de se mouiller le moins possible. Je suis crevé, plus sale que je n’ai jamais été, et déshydraté sous cette chaleur lourde (plus de 30°). Sans prendre le temps d’hésiter, je m’élance dans l’étang et saute dedans en prenant la célèbre position de « la bombe », arrosant au passage le coureur délicat, qui aura la décence d’en rire à l’instar des quelques spectateurs nous observant.

L’eau est délicieusement fraiche, mais je réalise très vite que se déplacer dans l’étang est plus dur que prévu : les pieds s’enfoncent de 30 bon centimètres dans la boue/vase à chaque pas, rendant l’avancé très lente. Ayant pied et de l’eau jusqu’à la taille, je décide rapidement de nager plutôt que de marcher jusqu’à l’autre bout (l’avantage de pas avoir peur de se mouiller, même dans une eau boueuse).

J’en ressort tout propre tout content, pour m’engager dans un tunnel de toile recouvrant la berge montant sur une vingtaine de mètres, dans lequel se trouve également la boue de l’étang, mais sans eau pour nager. Les bénévoles hurlent qu’ils faut monter ça en courant, sans quoi on pompe, sachant qu’on ne peut se déplacer au mieux qu’accroupi. Je m’élance donc, glisse une ou deux fois, et arrive au sommet dans une explosion de boue qui m’éclabousse tout le visage (et, je l’espère secrètement, celui des bénévoles me surveillant). J’ai les bras, les jambes et les mains recouverts d’une couche de boue liquide, ce qui m’empêche de m’essuyer le visage. A ce moment, en passant devant les spectateurs, j’aurais vraiment aimé qu’on me prenne en photo. Je dois ressembler à une bête des bois, couverte de boue, courant et s’exprimant d’une élégante respiration : « Rhaaa ! Rhaaa ! Rhaaa ! »

Le tunnel de sortie, abritant des milliards de tonnes de boue ! Et qui monte hors cadre sur la gauche.
Mais la course pour monter cette légère pente boueuse été l’effort de trop, et je sens que je vais vomir. Comme par hasard, on arrive à un endroit ou les spectateurs sont très présents (obstacles intéressants) du coup je continue de trottiner en engageant un débat virulent avec mon estomac pour le convaincre de se contenir jusqu’à un endroit plus tranquille. Sauf que 100 mètres plus loin se trouve un mur de bois. Un mur de bois de 8 pieds (2,5 mètres) qu’il faut franchir, seul ou avec l’aide d’autres coureurs.

Soyons clairs : en temps normal, je passerais ce genre d’obstacle les doigts dans le nez (quoi que pour être honnête j’aurais sans doute besoin de mes mains). Mais dans mon état actuel, avec mon estomac qui ne cesse de hurler « ARRETE DE REGARDER CE MUR OU J’TE GERBE DESSUS ! », c’est pas possible. Alors je détourne les yeux, et ralenti l’allure, jusqu’à ne plus pouvoir avancer, car le mur est devant. Je me sens fébrile et transpirant, et je connais cette sensation : elle précède un moment embarrassant, comme cette journée au parc de Saint-Denis où Andréa m’a fait travailler mon endurance, et ou après le sprint final j’ai dégobillé dans une poubelle, admiré par une petite gamine à deux mètres de moi qui me regardait avec des yeux écarquillés.

Il ne faut surtout pas que je m’arrête. Si je reste immobile ou m’assoit, ça sera pire. Je me met donc à marcher en cercle devant l’obstacle, reprenant mon souffle, contrôlant ma respiration, expliquant à mon estomac que, vraiment, les spectateurs ne s’intéressent que très peu à la teneur de mon petit déjeuné. Un volontaire s’approche de moi, l’air inquiet, me demandant si ça va. Je lui répond que oui, il rétorque que je suis blanc sous ma boue. Je le rassure d’un sourire et lui dis que je reprends mon souffle. Je regarde l’heure qu’il est, et souri en réalisant que ma montre est couverte de boue. J’imite des essuies glaces avec mes doigts, et prend note de l’heure, tout en n'ayant aucune idée de combien de temps il me reste à courir.

J’attends 3 longues minutes, pendant lesquelles les coureurs se succèdent devant moi. La plupart s’entraident pour monter le mur, certains essayent seuls. Beaucoup choisissent de faire les pompes.

Je ne veux pas d’aide pour le passer, comme je l’ai dis plus tôt ce genre d’obstacle est sensé être un jeu d’enfant pour moi. Lorsque je sens que la vague nauséeuse est assez lointaine pour tenter un effort, je prend l’élan que je pratique plusieurs centaines de fois par semaine depuis un an : gauche – droite/gauche et bondis en lançant mes bras en l’air, sauf qu’au lieu de frapper une balle de volley, je m’agrippe au sommet du mur à bout de bras. A partir de là, je me hisse jusqu’aux aisselles et lance mes jambes dans un mouvement de balancier jusqu’à ce que mes pieds agrippent le haut du mur. Fier de constater que les barbelés ne m’ont pas volés toute la force que mes biceps avaient à offrir, je fini de me hisser et termine allongé et haletant sur cette mince tranche de bois, reprenant mon souffle (ou plutôt le cherchant désespérément à coups de grosses inspirations rocailleuses). J’en redescends doucement, la dernière chose que je souhaite étant de me fouler une cheville.

Des guerriers Spartiates s'entraidant pour passer le mur. Petites tapettes !  Ouais, même la fille ouais !


Et je continue de courir. L’obstacle suivant n’est pas très loin. C’est un long tunnel en toile, du même genre que celui de l’étang, mais celui-là est dans la longueur. Il fait une trentaine de mètres de long, et on ne peut y avancer qu’à quatre pattes. Le sol sous les genoux est dur, les petits graviers qui le ponctuent sont tout sauf agréable, mais ça ralenti le rythme et me permet de reprendre mon souffle. A l’entrée du tunnel j’entend la volontaire évoquer « l’épreuve la plus dure », je lui demande donc avec surprise si elle parle du tunnel, que j’assimile à un petit binoclard comparé au chef de bande baraqué qu’est l’épreuve des barbelés. Elle répond en rigolant que non, pas du tout, l’épreuve la plus dure c’est pour bientôt… Oh vraiment ? Génial.

L'un des obstacles les plus facile.


Une fois sorti du tunnel je me remet à courir. Longtemps, au moins une dizaine de minutes, ou alors je suis tellement crevé que chaque minute semble plus longue. Nous repassons dans la forêt, zigzagant entre les arbres, les bosses, les crevasses. Je n’ai jamais autant voulu m’arrêter de courir, et la seule manière que j’ai de ne pas le faire est de m’imprimer dans le crâne que tant que je ne tombe pas de fatigue, je peux toujours courir. Et tous les cent mètres je me répète « tu vois, c’était faisable, et les cent mètres suivants le sont aussi, alors arrête de gémir et continue ! ».

Je ressors du bois assez fier de mon effort de volonté, pour tomber nez à nez avec « l’épreuve la plus dure ». Au début je ne comprend pas : je vois une centaine de seaux éparpillés sur le sol, et dans ce qui ressemble à un grand trou d’obus à moitié plein d’eau, des coureurs qui se baladent, certains remontant la pente juste devant moi en marchant dans des pneus. On nous demande de remplir deux seaux à moitié, et de revenir.

Boarf, ça a pas l’air si dur : descendre, remplir les seaux, remonter, avec en plus des pneus pour se stabiliser les pieds… rien de bien sorcier, la volontaire parlait sans doute d’une autre épreuve. Sauf que quand je commence à remonter la berge, on m’indique que non non, c’est pas par là, faut d’abord que je fasse le tour de l’étang en maintenant les seaux à moitié remplis hors de l’eau. Ah. Ah ouais, d’un coup là c’est plus chaud.

J’ai encore à ce jour (où j’écris cet article) une image qui refuse de me quitter. C’est de me retrouver dans cette eau noire et boueuse, en tenant mes mains en coupe que ne peux apercevoir sous l’eau qu’elles contiennent, tout en me demandant si je veux vraiment me nettoyer le visage avec ça. Je me souviens de décider que oui.

Je commence à suivre la berge, mais je me débrouille mal et me retrouve avec de l’eau jusqu’à la poitrine (et allez soulever deux seaux d’eau hors de l’eau avec de l’eau jusqu’à la poitrine !). Il faut dire aussi que le sol est du même genre que celui de l’autre mare : chaque pas s’enfonce de 30cm. La différence est que l’eau est couleur boue ici. Je ne saurais pas dire combien de fois je suis tombé dedans, parfois pour en ressortir en tête à tête avec un ou deux poissons morts, qui se comptaient par dizaines.

Dès les premiers mètres je trébuche sur un rocher marin invisible et m’ouvre la jambe au niveau du tibia. Ce n’est pas tant le fait de saigner dans une eau dégueulasse qui me gène, mais la douleur du tibia qui s’ajoute à l’épuisement, et au fait que je ne maitrise pas cet obstacle : à force de tomber mes seaux se remplissent entièrement d’eau, et je n’arrive pas à les vider de moitié, ce qui me ralenti et m’oblige à les hisser à moitié au lieu de complètement, me vallant les cris des bénévoles « Le but n’est pas de faire flotter les seaux ! ». Hey connard ! J’ai de l’eau jusqu’au cou et suis à moitié entrain de me noyer, je fini l’épreuve vivant, j’te fout les seaux dans la gueule et on reparle, ok ?!

Je viens de réaliser que je dois faire le tour de l'étang. Je suis également déjà tombé dans "l'eau". Pas le moment de me faire chier. N'empêche, sous cet angle, avec le tee-shirt mouillé, je ressemblerais presque à quelqu'un de baraqué. 
Vers les 3/4 de l’étang j’arrive à remonter légèrement sur la berge, ce qui m’offre de l’eau jusqu’à la taille et me permet de lever les seaux de manière convenable. Je n’arrive pas à obtenir la bonne quantité d’eau, du coup je décide de remonter avec les seaux pleins, je suis plus à ça prêt. Une fois en haut de la berge, on nous ordonne de les déverser sur les pneus et nos compagnons entrain des les escalader. Sadiques.

La remontée, avec quelques participants derrière qui commencent à faire le tour. Je tiens à préciser que l'étang parait plus petit qu'il ne l'est réellement.


Et c’est reparti, je me remets à courir avec une petite note de désespoir. A ce moment je suis le seul à repartir en courant de cet obstacle, ce qui me vaut les applaudissements et encouragement des spectateurs. Cela me regonfle le moral, et l’annonce d’un bénévole qu’il ne reste qu’un demi mile avant l’arrivé (soit un peu moins d’un kilomètre) me redonne de l’énergie que je ne pensais plus avoir : j’ai à nouveau un but en vu, quelque chose sur quoi me concentrer. Un demi mile c’est rien, j’en ai fais 2 et demi !

Et je cours, cours, cours. Jusqu’à l’épreuve suivante, celle qu’on pouvait apercevoir du camp de départ. Il s’agit du mur d’escalade en longueur. Facile !

Bien évidemment, c’est tout sauf facile. Il y a plusieurs murs, j’en choisi un au hasard sur lequel un coureur est entrain d’avancer péniblement, et une bénévole vient m’annoncer : un seul essai (comme d’hab), interdiction de s’accrocher au sommet du mur pour avancer (mince, j’avais effectivement prévu de faire ça) et il faut faire sonner la cloche au bout pour valider l’obstacle. Ce que je n’avais pas vu de loin est que les prises du murs ne sont rien d’autre que des morceaux de bois lisses cloués perpendiculairement, ne laissant que 3 ou 4cm de prise sans accroche, et toujours penché à gauche ou à droite (voir photo). Et le facteur inconnu : les pieds pleins de boue.

A ce moment, j’ai ramené la moitié de la boue de l’étang à l’intérieur de ma chaussure gauche trouée, ce qui est très désagréable (mon pied glisse à l’intérieur et ma chaussure glisse à l’extérieur). Je me hisse sur la première prise à l’aide de mes mains, et heureusement que ces dernières étaient sèches, car mon pied a déjà glissé. Ça me donne une bonne impression de ce que vont être les dix mètres à venir.

Bien sûr, les prises sont assez espacées pour rendre l’obstacle difficile. Mais faisable, en allant tout doucement. Avançant de droite à gauche, je comprends très vite que c’est une très mauvaise idée d’essayer d’éviter la prise occupée par mon pied gauche sous prétexte qu’il n’y a pas de place pour mon pied droit : je manque tomber en essayant d’atteindre la prise suivante. Je décide donc rapidement qu’une fois mon pied gauche stable, la meilleur technique consiste à me hisser à l’aide de mes doigts, et de changer de pied : mon droit prendra la place de mon gauche et supportera tout le poids du corps, et mon gauche sera à nouveau libre de chercher la prise suivante. C’est très lent, et je dois prendre mille précautions, mais si je me débrouille bien, je ne tomberais pas.

Heather commençant à grimper le mur à gauche, et un mec prêt à sonner la cloche à droite.  Et des pauvres gars qui pompent, au fond.


C’est sans compter les bénévoles. Je vois celle chargée de surveiller mon mur s’acharner sur le gars devant moi, lui hurlant aux oreilles « SIR ! VOUS ÊTES ENCORE SUR CE MUR SIR ?! Y’A QUELQU’UN DERRIÈRE VOUS ! VOUS VOYEZ PAS QUE VOUS RALENTISSEZ TOUT LE MONDE ?! MAIS VOUS PRESSEZ PAS SURTOUT, C’EST PAS UNE COURSE ! », et sous la pression, le pauvre homme d’essayer de se presser, et tomber, puis se diriger l’air misérable vers la fin de l’obstacle pour faire ses pompes.

C’est donc mon tour, et l’indistincte femme me hurle dessus de me magner le cul, que je ralenti tout le monde blabla. Sauf qu’à ce moment je sais bien que c’est dans le but de me faire tomber. Je souris donc de toutes mes dents, et plus elle hurle plus je souris, tout en gardant mon rythme lent (sérieusement, je ralenti personne). Quand j’arrive enfin à faire sonner la cloche, la jeune femme me rend mon sourire, me félicite, et m’invite à continuer la course. En dépassant la masse de participants entrain de faire leurs pompes je réalise que ma cloche a été la seule que j’ai entendu sonner pendant la durée de cet obstacle, sachant qu’il y avait 10 parcours de bois.

Le sourire qui dit "cause toujours", ou, plus précisément, "gueule toujours".


Je calme mon égo enflé (c’est pas dur de toute façon, je trop fatigué pour être vraiment fier) et me dirige vers l’épreuve suivante : le tir à la lance. Rien de fatigant, sauf si on rate, bien sûr. Et au vu du groupe de coureurs entrain de pomper, je vois que pas un seul n’a réussi. C’est une épreuve faite pour que personne ne réussisse : lancer une lance, malgré l’évidence sous-entendue dans cette phrase, n’est naturel pour personne, et en attendant mon tour je vois que la majeure partie des lances n’atteignent pas leurs cibles de paille, ou alors tournent sur elles-mêmes, la tête de lance finissant souvent pointant vers le lanceur.

Je me doute qu’il doit y avoir quelque chose qui cloche avec les lances, elles doivent être mal conçu exprès, quelque chose qui fait que tous ces mecs baraqués n’arrivent pas à atteindre une grosse cible en paille à 10 mètres d’eux.

Mon tour vient vite, et je saisi une lance dans la pile tandis que l’instructeur me répète : un seul lancé, si la lance ne se plante pas dans la cible, je pompe. La pointe de ma lance est légèrement courbée : j’aime pas ça. Je prends le temps d’en trouver une à la pointe bien droite. Je trouve ensuite le point d’équilibre du manche en bois, y place ma main droite, puis tend le bras en arrière pour avoir la pointe de la lance près du menton, en gardant la lance bien droite, quoique légèrement incliné vers l’arrière. La cible me paraît très simple à atteindre, je sens que mon lancé va aller droit au but. Il doit y avoir un piège.

Je m’élance de deux pas et envoi le tout d’un lancé sec. La lance file droit, et se plante profondément en plein cœur de la cible. Ah… bah non. Pas de piège. Les autres participants n’ont visiblement pas eu la même enfance que moi.

Heather au lancé de lance... qui échouera malheureusement.


Sous les applaudissements de la foule et le regard impressionné de l’instructeur qui me dit simplement « There you go ! » je dépasse le groupe de pompeurs pour l’obstacle suivant, à côté duquel un autre groupe pompe. Personne n’est sur l’obstacle, il n’y a qu’une bénévole qui arrose de produit vaisselle ce mur de bois incliné pour le rendre super glissant. Le mur est plus grand que celui déjà franchi, mais comme je l’ai précisé, penché en avant, comme un tremplin. Impossible de le monter sans aide, c’est pour ça que de courtes cordes pendent du haut du mur. J’en saisi une à bout de bras, et une fois ma prise ferme, je saute en me hissant, et place mon corps perpendiculaire au mur, faisans bien attention à ce que mon corps soit bien tendu et mes pieds bien à plat. Une fois stabilisé, je commence à avancer en me hissant et marchant doucement (ce qui est une sensation assez étrange : marcher presque en parallèle au sol). Une fois au sommet, je m’accroupi doucement, et d’une main saisi le haut du mur. Comme je m’y attendais, mes pieds en profitent pour glisser, mais ce n’est plus qu’une question de bras pour me hisser. En descendant, je jette un regard en arrière et réalise que le groupe de militaire commence à s’attaquer au mur. Je les ai dépassé sans m’en rendre compte, et l’arrivé étant à 100 mètres, je vais finir avant eux. Fierté. Le bois Français a bien chauffé.

Heather qui franchi vaillamment le mur glissant (quoi que vu la position de la fille du fond, il devait plus être si glissant que ça, parce que moi dans cette position je me serais ramassé les dents contre le bois...)


Reste donc 100 mètres et, si vous vous en rappelez, les deux colosses habillés en spartiates avec des cotons tiges géants. Vous vous rappelez sans doute aussi que j’avais prévu d’essayer de plaquer le moins costaud. Ouais. Bah là, je suis à moitié mort, sans force, et je m’en fout un peu de faire quelque chose d’original : je veux juste finir la course.

Mais pas sans jouer. Les colosses n’attaquent que les joueurs (beaucoup de participants, trop fatigués pour essayer de les éviter, les ignorent juste en passant en milieu, écopant d’une gentille petite tape de coton tige sur les fesses.) Mais les joueurs ? Haha, les joueurs s’en prennent plein la gueule. Comment fait-on savoir qu’on est un joueur ? En essayant des les éviter. Mais ces messieurs connaissent leur boulot. Ils feintent leurs frappes, et visent les jambes. Exemple : ils vont faire semblant de frapper au visage en passant au-dessus de la tête, et aussitôt, une fois le coureur passé, ramèneront leur coup derrière les genoux, ce qui a pour effet de faire décoller le coureur du sol, les jambes en l’air et la tête en bas. Rien de bien dangereux, le sol n’est pas très dur ici, il y a beaucoup de paille.


Ce qui pourrait m'arriver si je fais pas gaffe.

Mais pas question qu’ils me matraquent, je suis plus malin qu’eux ! Enfin j’espère… Le colosse de gauche est légèrement en avant, et c’est le plus costaud. C’est celui que je vais feinter, je m’occuperais du deuxième après, même s’il se tient juste derrière son pote…

Je m’avance donc en courant au milieu du chemin, le sourire aux lèvres. Les deux colosses me voient et se mettent en position, répondant au sourire, mais d’une manière plus vicieuse, du genre « T’as l’air confiant petit, on va t’expliquer que t’as tort ». Une fois à porté de coup du premier colosse, dans un mouvement de handball que je n’ai jamais oublié, je pratique un double appui avec une feinte de course vers la gauche puis m’élance à droite : ça marche, le gros colosse a suivi le mouvement et est à présent déséquilibré. Il réagi cependant très vite et me frappe au niveau des jambes. J’ai tout juste le temps de sauter par-dessus, le bout de mes pieds touchant son coton tige. J’entends la petite foule de spectateurs réagir bruyamment et applaudir, moquant gentiment le colosse. J’atterri devant son pote : pas le temps de réfléchir, dès que mes pieds touchent le sol je me jette sur la gauche et en direction de la ligne d’arrivée. Je sens son coton tige me frôler la hanche droite, mais rien de bien dangereux.

J’ai vaincu.
Je passe la ligne d’arrivée tout sourire, sous les quelques applaudissements des témoins de mon épique combat final. Une superbe fille habillée en guerrière spartiate me remet ma médaille en souriant. J’envisage un instant de la prendre dans mes bras, tant je suis heureux de terminer la course, mais la vue de son décolleté immaculé m’y dissuade : pas question de couvrir de boue une si jolie poitrine. Une autre jolie spartiate récupère le petit appareil qui me fut attaché au poignet au début de la course pour connaître mon temps.

Et ça y est, c’est fini. Etant encore un peu nauséeux, je marche quelques minutes avant d’accepter l’eau que l’on m’offre. Mais je suis heureux. Heureux et fier, très fier. J’ai fini cette putain de course ! Et j’ai pas raté un seul putain d’obstacle ! Je suis un putain de Spartiate !

La médaille est belle : rouge avec un casque d’argent gravé dessus, ainsi que quelques éclaboussures de même couleur. Le même genre d’éclaboussures qui parsèment mon visage. A ce moment là, c’est la plus belle médaille du monde, et ma fierté me hurle que je la mérite 1000 fois. Et même plus.

Je cherche Frank du regard (nous avions décidé de tous nous retrouver après la ligne d’arrivé) mais je ne le vois pas. Il a du aller prendre sa douche à l’extérieur du camp. Je me dirige donc vers l’épreuve de tir à la lance pour y attendre Maggie et les autres. J’y observe pendant 10 bonnes minutes les participants y échouer les uns après les autres. Un seul réussira, et il plantera à peine sa lance, de biais, dans le bas de la botte de paille. Clairement ce lancé n’aurait blessé personne, mais ça lui donne quand même le droit d’éviter les pompes, et au vu du peu de succès de l’épreuve, il y a bien droit.

Au bout d’un moment je reconnais le gars essayant de monter le mur glissant, puis finalement décider de faire les pompes : Frank. Hein ? Quoi ? Comment ? Je l’ai dépassé sans m’en rendre compte, et suis arrivé dix minutes avant lui. Ça, je m’y attendais pas du tout.

Je vais le rejoindre à l’arrivée, mais il est trop fatigué pour parler. Je reconnais alors Heather derrière la boue qui recouvre son visage, qui vient également d’arriver, et nous partageons nos impressions : elle est crevé, mais n’a jamais arrêté de courir sauf dans les côtes du début. Balaise. Elle qui pensait qu’elle n’allait pas faire un kilomètre et s’écrouler, elle a super bien géré.

Heather est puissante. Et son tee-shirt n'est plus blanc.

"Le mur de la Bravoure", sur lequel j'ai joyeusement écrit mon surnom, "Kake", ainsi qu'une signature de valeur : "B2C".


Maggie et sa mère arrivent une demi heure plus tard, soit 40 minutes après que je sois arrivé. Elles sont toute sourire, heureuses d’avoir fini. Je suis très impressionné par la mère de Maggie, et Maggie est impressionnée par nous tous (moi qui ne cours jamais, Heather qui pensait qu’elle pourrait pas le faire, sa mère parce que quand même, la cinquantaine !).

Maggie et sa mère usant de leur charme pour éviter les Colosses.


On se félicite tous les uns les autres, et partageons nos anecdotes de la course. Je réalise rapidement que je suis le seul à n’avoir échoué sur aucun obstacle : chacun d’entre eux a du faire des pompes 2 ou 3 fois. Plus tard, et par d’autres discussions avec d’autres participants, nous apprendrons que je suis une exception, qu’il est en effet rare qu’un participant finisse sur un sans faute. Ça me fait très plaisir bien sûr, mais dans un sens je savais que c’était mon point fort : je déteste courir mais j’adore tout ce qui se rapproche d’un obstacle (à part ces saletés de côtes à la con).

Prochaine étape : la douche collective! Ouaiiiis !


Quelques jours plus tard, nous recevons les résultats de la course par internet. J’ai fini en 48 minutes, et je suis … 19ème ! 19ème, bordel de merde ! J’en suis tellement excité que je l’annonce par SMS à Maggie… en français ! Je n’aurais jamais cru être dans le top 20, et si on me l’avait annoncé avant la course, je ne l’aurais pas cru. Je savais que je devais être parmi les 50 premiers, mais plus du côté de 50… Au final, je pense que ce qui m’a fait gagner autant de place a été de réussir tous les obstacles et ne pas perdre de temps à faire de pompes. Sur chaque épreuve je dépassais des groupes d’une dizaine de coureurs, ça compte forcément, même si certains me redoublaient en courant après.

En regardant le score je calcule que si je n’avais pas attendu 3 minutes pour passer par-dessus le mur de bois, j’aurais fini 10ème… que si j’avais choisi de faire des pompes au lieu de m’embourber dans le tour de l’étang avec ces seaux… top 5 ? ça fait tourner la tête. Au final je ne suis toujours pas un coureur, et même si les obstacles ne m’ont pas vraiment permis de récupérer comme je l’espérais, ils ont tout de même joué en ma faveur en ralentissant tous ces habitués de la course à pied.

Je ressors de cette épreuve grandis, ce que j’espérais, mais avec en plus la satisfaction d’un classement qui est loin de me faire rougir. The Spartan Race a rempli son rôle, une épreuve sensée me pousser jusqu’à mes limites tout en boostant ma confiance en moi. Et clairement, cette confiance, sur le plan physique elle est à présent boostée.

La course suivante de The Spartan Race fait 8 miles, soit presque 3 fois cette course (13 km). Heureusement que je n’ai pas eu l’opportunité de la courir… de tout mon cœur, heureusement. Mais entre nous, si à l’avenir cette opportunité se présentait… je crois que je serais assez con pour la saisir.

dimanche 20 mars 2011

Correspondant Américain

Mais… Mais oui ! Oui ! C’est bien un nouvel article ! Après tout ce temps ! Quelle excuse va-t-il nous sortir maintenant ? « J’étais occupé » ? « J’avais pas d’inspiration » ? « L’alignement des planètes n’était pas favorable à un nouvel article » ? Et puis quoi, il a l’air vachement court ce nouvel article ! A vu d’œil, y’a même pas besoin de faire dérouler la page ! Il se fout de not’ gueule j’vous dis ! Il s’fout de nous !

Voici ce qui traverse très certainement vos esprits, chers lecteurs malgré tout fidèles. Je vous dois sans doutes des excuses, en effet. Quand je vois la date du dernier article, j’avoue avoir un peu honte. Mais je suis sûr que vous pouvez tous comprendre ma situation : quand on commence à vivre une nouvelle vie, et ce à des milliers de kilomètres, il est vraiment inconsidéré d’écrire un blog lorsque l’alignement des planètes n’est pas favorable. Les amateurs confirmeront.

Par chance, cela fait deux semaines que le ciel m’a offert la possibilité de caresser à nouveau le clavier négligé de mon ordinateur. Et assez étonnamment (ou pas tant que ça, si vous croyez à l’alignement des planètes), je ne suis pas le seul. Mon amie de longue date Guilaine Spagnol s’est aussi remise à l’écriture. Alors qui est Guilaine, me demanderez-vous, qu’est-ce qu’elle vient foutre dans un blog sur les Etats-Unis, alors qu’elle est une amie de longue date, sous-entendu Française ?

Il faut que vous sachiez quelque chose sur Guilaine avant de continuer. Cette jeune demoiselle écrit des Blogs depuis l’origine du monde. Ou presque. Au fil des années, je l’ai vu sauter de Blog en Blog, racontant sa vie, ses pensées, et toujours au milieu de ça, ses coups de cœurs littéraires. Elle a fait de moi le lecteur assidu que je suis aujourd’hui.

Vous ne voyez toujours pas pourquoi cela lui donne l’insigne honneur de figurer sur MON blog ? J’y viens, j’y viens.

Guilaine s’est donc lancée à nouveau dans l’écriture d’un blog littéraire (depuis que les planètes le permettent) prenant le pseudonyme de Guixxx. À peu près en même temps, j’ai été rencontrer un auteur cher à mon cœur dans la ville voisine de Houston. C’en était assez pour Guilaine pour me propulser « Correspondant Américain », avec toute la classe que cela sous-entend. Je serais donc de raconter au monde entier (qui lit le blog de Guilaine) ma rencontre avec cet auteur, et comment il est, et est-ce que sa barbe est vraiment cool tout ça tout ça.

Mais vous me connaissez : j’ai du mal à me concentrer sur un seul sujet (si j’écris pas 8 pages j’ai pas l’impression d’écrire), mais Guilaine m’autorisa à également raconter l’aventure qui entoura cette rencontre, notamment le trajet jusqu’à Houston.

Sans plus de préambule, je vous invite donc à franchir la porte de La Librairie Fantastique de Guixxx, et d’y découvrir cette nouvelle aventure de votre français expatrié préféré. Et si vous aimez les news littéraires, n’hésitez pas à fouiner dans les étagères de ce nouveau blog dont je suis moi-même friand !

Veuillez suivre ce lien → CLIQUEZ ICI

lundi 11 octobre 2010

Volleyball, l'intime relation

L’Edito du rédacteur en chef :

Chers lecteurs,

Suite à de nombreuses plaintes, l’attention du Blog Once Upon a Time in the Southwest a récemment été attiré sur la taille de ses articles, que de nombreux lecteurs considèrent comme trop imposants. Notre Blog, tenant à garder la fidélité des quelques attardés mentaux ayant des difficultés à lire l’hebdomadaire demi douzaine de pages, prendra donc compte de ces réclamations, et changera le mode d’écriture pour adopter un style plus anecdotique. Nous espérons que cela satisfasse nos bien-aimés lecteurs.

De la même manière, nous avons reçu un nombre incroyable de requêtes demandant à ce que l’auteur souligne de manière plus précise ses formidables qualités physiques. De ce fait, dans le but de satisfaire l’admiration de nos abonnés, nous consacrerons cet article au volley-ball. En revanche, au risque de perdre quelques lecteurs, j’insiste sur le fait qu’il n’y aura pas de photo de nu postées sur la galerie photo.

En espérant que ces modifications apportées à notre Blog vous apportent joie, bonheur et amour, la rédaction vous souhaite une excellente journée.

Vincent Desgrippes,

Rédacteur en Chef,

« Notre préoccupation, c’est votre satisfaction. Et la météo aussi, parce que la pluie, c’est chiant. »

Chapitre VIII – Volley-ball

Avez-vous déjà frappé une balle le temps d’un saut ? Senti cette exultation au moment du contact avec la main, et la jubilation intense de voir la balle filer et rebondir d’un claquement sec sur le terrain adverse, accompagné des cris de joie de vos coéquipiers ? Je l’ai connu en France, et ce fut immédiatement le coup de foudre, un amour inconditionnel pour ce sport qui me permettait de m’échapper de ma bulle et de me perdre dans une plénitude physique et morale que seuls les bras d’une fille pourraient surpasser.

Oh, oui, le volley-ball a tout d’une relation.

Au début on est un peu timide, on se cherche, n’osant pas trop la toucher. On est maladroit, on essaye ce que les copains plus expérimentés nous conseillent, sans forcément réussir, mais c’est normal, on débute. Et elle reste toujours compréhensive, l’air de dire « t’inquiète pas, la prochaine fois ça sera mieux », même quand on vise mal.

Puis on prend finalement confiance, on sent le début d’une connexion, et les gestes deviennent plus naturels, plus réguliers. C’est la phase de la relation que connaît la majeure partie des joueurs ; où l’on découvre le plaisir, mais sans trop penser à l’avenir ; où l’on se concentre sur l’instant présent en donnant le meilleur de soi-même. Cette phase est généralement très gratifiante.

Et puis le manque s’installe entre chaque rendez-vous. On aimerait ne jamais s’arrêter, passer tout notre temps libre ensemble. Alors on se retrouve de plus en plus souvent, de jour comme de nuit. Cela devient une obsession, un but : la retrouver, la toucher, jouer un peu avec elle, et passer aux choses sérieuses… Avec le temps vient l’expérience et l’assurance, et de là la confiance dans les différents partenaires qui nous permettent de découvrir des sensations encore inconnues, des positions plus complexes, plus efficaces…

Arrive alors la phase de l’exaltation, l’amour fou, inconditionnel. Chaque rendez-vous est un mélange de douceur et de violence, les gestes sont à présent d’une efficacité maximum, précis et puissants, procurant un plaisir extrême.

Et vient la trahison. En général lorsque l’on ne s’y attend pas, lorsque nous ne sommes pas prêt. Et la blessure, intense, violente, nous rend plus misérable que jamais. Au début on n’y croit pas, on continue tête baissée, essayant de se convaincre que ce n’est qu’un rêve. Puis la réalité reprend le dessus, et l’on fini par accepter que c’est peut-être fini. Alors on négocie, on appelle ça « une pause », mais au fond nous savons qu’il y a peu d’espoir. On refuse d’écouter nos amis qui nous disent que dans quelques mois on retrouvera d’autres partenaires, que ça sera aussi bien. On s’en fout, quelques mois c’est trop long ! Nous en avons besoin maintenant, tout de suite.

Et puis le temps passe, et à cause de l’inactivité la passion s’estompe. Jusqu’à se retrouver à nouveau devant elle… la tenir dans ses bras, la caresser doucement… et se mettre à rêver. Enfin, le processus peut recommencer.

Et pour moi, il a recommencé aux Etats-Unis, après une blessure aux doigts qui m’aura empêché de jouer pendant trois mois. Et lorsqu’on ne joue pas pendant trois mois lorsque la totalité de notre temps de jeu n’a pas dépassé les sept mois, le niveau en prend un coup. En général dans les parties. L’extase décrite en premier paragraphe lors de l’attaque d’une balle est bien loin. A la fin de l’année dernière, je pouvais globalement choisir où je voulais que ma balle finisse sa course. Ici, j’exécute la danse de la victoire lorsque ma faible frappe atterrie plus ou moins entre les lignes adverses. Bref, j’ai du boulot avant de redevenir le demi-dieu que j’étais.

Sauf que dans ma classe de volley avancé, je n’aurais pas le temps de rattraper mon niveau avant la fin des évaluations, et si je ne suis pas assez bon, je vais rapidement entendre quelque chose comme « Je suis vraiment désolé, mais tu sais qu’ils m’ont coupé le budget… j’ai pas le choix… ».

Alors je me donne à fond sur les quelques séances disponibles. Le désavantage est qu’à côté de ces excellents joueurs, j’ai l’air d’un clown. Super sexy, soit, mais un clown tout de même. L’avantage est que j‘ai le même prof lors de mon cours de volley intermédiaire, et qu’il est plus simple de se distinguer dans cette classe. D’une manière générale, je ne fais pas trop d’erreur, mais je ne fais rien d’exceptionnel non plus, si ce n’est ma spécialité : me jeter par terre pour sauver des balles. Je n’ai pas peur de me faire mal, du coup quand 5 joueurs restent debout et que l’un d’eux commence une course désespérée, plonge (au ralenti, avec une musique d’Ennio Morricone résonnant dans tout le gymnase plongé dans le silence), et sauve (ou presque) une balle, ça fait toujours belle impression.

A ce propos, faudrait vraiment que je dépose un brevet sur les « hanchières », parce que franchement, j’en ai un peu marre de me cramer les hanches chaque fois que j’embrasse le sol.

Pour en revenir à l’évaluation, au final je n’ai aucune idée de ce que sera son choix (ou plutôt leurs choix, car je pense qu’il prendra l’avis des Teacher Assistant en considération). Lors de la dernière journée d’évaluation, il forme deux équipes et va nous regarder jouer en 5-1. Comme la majorité d’entre vous, je n’ai aucune idée de ce que cela veut dire, sauf qu’ici, je suis le seul. Par chance, j’ai des joueurs expérimentés dans mon équipe qui m’expliqueront tout au long du match mes placements. (Pour les intéressés, 5-1 signifie cinq attaquants et un passeur, ce qui influe sur les rotations et le placement de chaque joueur durant le jeu). J’ai donc droit à une heure d’apprentissage intensif, et oubliant l’espace d’un instant que je suis évalué, je me surprends à adorer cette situation, adorer le fait d’apprendre quelque chose de nouveau sur ma passion et d’y être plus efficace. A la fin de l’heure, je maitrise les placements de ma position pour le 5-1, ce qui, je l’espère, va peser pour mon cas. Je l’espère, car je n’ai plus de bonbons français.

Mes espoirs fondent rapidement comme glaçon dans un four, lorsqu’avant de nous libérer le prof s’adresse à nous, disant qu’il enverra un e-mail dans l’après midi aux joueurs concernés, et qu’il faudra pas mal le prendre bla bla bla mais que c’est pour le bien de la classe bla bla bla. Les autres joueurs n’ayant pas régressé en trois séances, j’ai toujours le niveau le plus faible. J’hésite à lui envoyer un mail pour lui assurer qu’une fois mon niveau retrouvé, je pourrais prendre cette bande de tapettes un par un. Enfin… disons plutôt qu’ils pourront me prendre dans leur équipe sans trop faire la gueule.

Au final je m’en abstient, je ne veux pas donner l’impression de supplier, même si un refus m’exposerait à de sérieux problèmes, vu que je n’aurais pas les crédits demandés par l’université.

Etant trop stressé pour faire quoi que ce soit, je me laisse plonger dans une sieste relaxante (il doit encore y avoir des morceaux de décalage horaire là-dedans… car « dormir » et « stress » n’ont jamais accepté de faire parti de mon dictionnaire perso. Lorsque je me réveille, je vérifie mes mails, et voit le nom de mon prof en haut de la liste…

Argh.

La mort dans l’âme, j’ouvre le mail, et découvre le verdict.

« I just wanted to touch base with you before the weekend and let you know about volleyball class evaluations.

Based on this week, expectations of play, and your willingness and attitude, we would love to keep you in the advanced class. However, we need you to make an effort to learn some of the offensive system and terminology that will go along with advanced play. This may take you staying longer or coming early on some days. »

Pour ceux n’étant pas familiers avec la langue de Bruce Willis, cela dit globalement qu’au vu de ses attentes concernant le jeu, de ma volonté et mon attitude, il adorerait me garder dans le cours de volley avancé, mais qu’il faudra juste que je fasse un effort pour apprendre ce que je ne connais pas encore, soit en venant plus tôt à certains cours, soit en achetant un livret explicatif.

Comme vous pouvez l’imaginer, le soulagement m’inonde (non, je n’ai pas pleuré), et je m’autorise quelques éclats de rire joyeux. De mémoire, je lui réponds rapidement quelque chose comme « Hi ! Yeah ! Great ! Haha ! (Soulagement) » et lui livre ma joie dans un paragraphe reconnaissant.

Maintenant je sais que je n’ai plus rien à craindre pour mes crédits, je vais pouvoir apprécier le jeu sans arrières pensées, et ne plus avoir peur de rater. Lors du cours suivant, les quatre TA auront formés quatre équipes. Je suis le dernier membre choisi dans la mienne, mais rien de surprenant à cela, il m’incombe à présent de leur prouver qu’ils n’ont pas fait de mauvais choix ! Mon objectif est que d’ici quelques séances je sois redevenu au moins un tiers de Dieu, à défaut d’un demi.

Notre équipe choisi le nom d’Awesome Sauce (en gros : Mélange Génial), et il faut croire que ce nom n’était pas anodin. Un tournois s’étalant sur plusieurs semaines est organisé, chaque séance donnant lieu à un match en situation réelle (c’est à dire qu’il faut gagner 3 jeux de 21 points sur 5 pour remporter la victoire). Nous remportons les trois premiers matchs du premier jour. Ouais, juste comme ça. Et même que j’ai marqué des points.

Bien que n’étant pas encore très à l’aise avec mes compagnons, ils sont tous très patients et m’expliquent les mécanismes du 6-2 jusqu’à ce que je me sente assez en confiance pour me débrouiller tout seul. Les filles en particulier m’offrent des sourires lorsque je rate certaines balles, et lorsqu’on a la pression d’une équipe de joueurs expérimentés sur les épaules, en particulier lorsque les deux remplaçants jouent mieux que vous, ces sourires sont la plus précieuse chose qui soit.

Voulant jouer en dehors des cours, je profite de l’opportunité qu’un joueur du cours intermédiaire cherche à monter une équipe intramurale pour m’inscrire. Ces équipes s’affronteront tout le long du semestre dans un grand tournoi, et tous les étudiants de l’université peuvent participer et monter leur équipe (100 dollars par équipe). D’un point de vu français, on se dit « ouais, ok, ça va être un tournois avec deux ou trois équipes, génial ». C’était en tout cas le mien, jusqu’à ce que je vois la liste des équipes inscrites : plus d’une centaine. Donc facilement plus de 800 étudiants. Mais au vu des 50 000 inscris à la fac, ça semble d’un coup plus normal. Certains noms d’équipes m’ont d’ailleurs bien amusé, le grand vainqueur étant « Nos balles, Vos mentons ».

L’ennui avec mon équipe, c’est que l’on est 12 inscris, ce qui signifie très peu de jeu pour chaque joueur. Je remarques également que certains inscris ont un niveau assez faible, ce qui signifie que ça va pas être simple, voir même galère. Enfin, ils n’envisagent pas de s’entrainer en-dehors des cours, ce qui pue à peu près autant que la mort. Je signe malgré tout, en me disant sans y croire que j’aurais peut-être une autre opportunité d’ici à ce que le tournoi commence, dans quelques semaines.

Et en effet, quelques semaines plus tard, comme s’il savait que j’allais faire cette transition dans mon blog, un excellent joueur (8 ans de jeu… on se sent petit à côté) avec qui j’avais juste l’habitude de dire bonjour et d’échanger quelques mots, me demande si je suis dans une équipe. « Oui. Non. Peut-être. Pourquoi ? » Parce qu’il lui manque un joueur, et que j’ai l’air de correspondre au profil. 6 joueurs donc. 7 envisagés, pour être sûr qu’on sera toujours 6 en match, donc beaucoup de jeu. Entrainement en dehors des cours ? Bien sûr ! On cherche toujours des joueurs pour jouer en semaine. Le niveau de l’équipe ? Entre 5 et 8 ans de jeu pour presque tous les joueurs. Et vous voulez de moi ? Bien sûr ! On veut s’amuser avant tout.

Mais voilà, je suis inscris dans l’autre équipe. Un terrible dilemme me ronge alors l’esprit. Pendant à peu près 0.3890 secondes. « Comment je m’inscris ? ». Charles, qui est également le capitaine, m’emmène alors dans une bibliothèque (encore une), me retire de mon ancienne équipe (byebye !) et m’inscrit dans la nouvelle. Nous sommes mardi, entrainement vendredi, premier match dimanche. Woooo !

Pendant ce temps, le tournoi du cours de volley avancé s’est terminé, après un mois de jeu. Résultat : Awesome Sauce vainqueur par 11 victoires sur 11 matches. Awesome ! Dans l’intervalle je me suis imposé comme un bras fiable de l’équipe, et ai finalement retrouvé l’exultation d’une belle attaque. Pari réussi : je suis à présent un tiers de Dieu. Ayant gagné le tournoi, nous sommes dispensé de test de compétence, auquel je participe tout de même par curiosité. Et la semaine suivante, lors de la création des nouvelles équipes, je suis choisi en deuxième. French Rules !

Vendredi l’entrainement se passe dans la joie et la bonne humeur. Mon équipe est géniale, pas de joueur à l’égo démesuré, des jolies filles… Pardon, je la refais : des super jolies filles (rien de mieux pour motiver à plonger) et une ambiance extra. Notre nom ? You Know… Et au final la majorité d’entre eux reprennent juste le volley, du coup malgré leurs longues années de jeu, le niveau reste très homogène.

Quand à notre premier match, il commence dans deux heures… Je vais donc terminer ici cet article, en espérant ne pas vous avoir endormi d’une overdose de volley. J’étais tellement excité ces derniers jours qu’il fallait absolument que j’en parle. Parce que bon, on aura beau dire mais le volley, ça déchire.

PS : On a gagné le match. You Know rules !

Re-PS : Si, si, cet article est plus court...

samedi 2 octobre 2010

Les Monteurs de la Table Rectangulaire

Aujourd’hui, premier jour de cours. Mon emplois du temps de la journée sera un cours de volleyball intermédiaire, un cours de tennis pour débutant, et aurait été un labo de montage, sauf que ce dernier est annulé, la prof préférant avoir un cours avant de nous envoyer en labo. J’ai connu pires premières journées…

Je me rends compte que quelques mois en arrière, penser à cette journée me donnait des frissons d’adrénaline, liés à la peur de l’inconnu. J’avais certes hâte d’être aux USA, mais pas forcément de commencer les cours. Aujourd’hui, c’est un sourire impatient qui illumine mon visage tandis que je chevauche fièrement Blue Max (mon vélo, à qui j’ai finalement donné le nom qui resplendissait sur l’écusson violet ornant son beau poitrail blanc… J’avais le choix entre Blue Max ou « Plateau – 21 Speed », mais c’était moins classe. Et on s’en fout qu’il soit blanc avec un nom disant qu’il est bleu, voyez ça comme un hommage à Barry White.)

Je pénètre sur les coups de 8h30 dans l’immense gymnase du campus, présentant ma carte à l’entrée (après tout, on a beau être dans un centre sportif, ça reste le Club Med, faut payer pour avoir le droit d’y accéder). Le cours de volley aura lieu dans le plus petit des deux gymnase (ou, disons plutôt, le moins grand). Une fois en tenue, quatre de mes dix doigts bandés (pour cause d’excès de volley-ball lors de la fin de l’année dernière, où après m’être éclaté quatre articulations avec une balle de beach volley, je me suis allègrement retourné le pouce de l’autre main le jour de ma reprise), je m’assieds au pied d’un mur près des quelques étudiants déjà présents. Le silence règne, du coup j’attends patiemment que le prof arrive, continuant de bander mes doigts.

Au bout d’un moment, un étudiant vient s’asseoir à mes côtés, et engage la conversation à propos de mes genouillères (il faut savoir que j’ai des genouillères de warrior ; ayant bousillé quatre paires de genouillères classiques en l’espace de 6 mois de jeu, j’ai investi dans une grosse paire solide qui me donne l’air d’un Robocop du volleyball (enfin, au niveau du genoux quoi). Mon nouveau compagnon s’appelle Jason, et fait des études de physiologie, comme beaucoup de monde ici. Je suis l’un des rares étudiant à venir d’un autre département d’étude, en particulier pour des crédits (même si la raison principale reste que le volley est le meilleur sport du monde (c’est mon blog, je dis c’que j’veux)).

Le prof arrive enfin. Imposant, sympathique, charismatique. Il est entouré de quatre TA, ces fameux Teaching Assistants, étudiants en doctorat chargés de l’assister dans son enseignement. Ils ont l’air sûrs d’eux ; des volleyeurs aguerris, et très à l’aise avec les étudiants. La TA en chef se permet même d’être jolie en plus du reste.

Le prof nous fait ensuite un petit speech concernant le contenu du cours : majoritairement des exercices de groupe, puis au bout d’un certain temps des matchs, et régulièrement quelques quizz de connaissances. Mais également un élément qui m’a particulièrement surpris : sont requises 4 heures de bénévolat dans une association étudiante du campus. Peu importe l’association, peu importe quand est-ce qu’on les fera, il demande que l’on s’investisse un minimum dans la vie du campus. Original, et pas pour me déplaire.

Les deux premières semaines seront consacrées à l’évaluation de notre niveau, sachant que s’ils estiment que nous ralentissons la classe, ils nous demanderons gentiment de quitter ce cours et rejoindre celui pour débutant. Je ne m’inquiète pas, je pense avoir un niveau correct pour une classe intermédiaire. Par contre je commence à flipper pour le cours de volley avancé… cela sera probablement le même type d’évaluation, et malgré les protestations indignées de mon égo, il n’est pas dit que je sois au niveau.

Et au bout de vingt minutes, après avoir signé des papiers affirmant que nous ne poursuivrons pas la fac en justice si jamais on se blesse, le prof annonce la fin du cours. Une colossale frustration monte en moi ; ça fait quatre mois que j’attends de pouvoir taper dans une balle, et au bout d’un discours de vingt minutes faudrait se casser ? J’vais t’la poursuivre en justice cette fac de merde moi !

C’est alors qu’il ajoute « Sinon les filets sont montés ; le cours est fini, donc vous pouvez jouer si vous voulez, et moi je n’ai rien dis, rien vu rien entendu. » Ah, ça y’est, je l’aime. Pour le remercier je vais lui offrir les bonbons français promis, qu’il accepte en éclatant de rire, arguant que ses enfants vont être content. Après lui avoir conseillé de pas tout leur laisser (c’est précieux les Haribos ici…), je vais rejoindre mes camarades et profiter à fond de l’heure à venir.

Mon cours suivant étant tennis, je me rends dans le second gymnase du campus. Plus petit et souterrain, je croise quelques grandes salles, certaines abritant des cours de tir à l’arc…

Ceci étant le premier jour, nous n’avons pas cours aux 40 terrains de tennis situés à 20 minutes au nord du campus, mais remplissons juste des papiers dans une grande salle. Le prof est également sympathique, la TA aussi. Notre note inclura beaucoup de tests, physiques comme écrits. Jouer en-dehors des cours rapporte également des points, ainsi qu’assister à des matchs de professionnels. Je crois que je vais adorer mes cours de sport…

En observant son CV (oui, les profs fournissent leur CV, histoire de prouver que la fac se fout pas de notre gueule… et elle se fout jamais de notre gueule) je me rends compte qu’il a entrainé l’équipe de tennis féminine de Malaisie pendant 2 ans. Ni une ni deux (mais plutôt 20 minutes après), à la fin du cours, je me présente à lui comme le français l’ayant contacté par mail, et engage une conversation passionnée sur la Malaisie, ses paysages magnifiques, sa population locale fantastique, et sa nourriture divine. Trois points sur lesquels nous étions sûrs d’être d’accords.

Etant désœuvré pour le reste de la journée, je vais repérer mes salles de cours dans les deux grands bâtiments du College of Communication, qui comprend mon cursus (RTF : Radio Film Television). Je croise à peu près 10 salles (ouvertes) contenant chacune au moins 20 macs dernière génération. Je croise quatre immenses studios de tournage (de la taille de magasins,et très hauts de plafond), je croise des ascenseurs immenses capable de faire entrer des camionnettes dans ces studios (5eme et 6eme étage). Ah, oui, j’ai oublié de préciser que dans chaque bâtiment étaient présents des ascenseurs. Ascenseurs fonctionnels hein, allant par paire. Les escalators à moitié pétés de Paris 8, remplis de chaises et de tables en vrac la moitié de l’année (lors des grèves) ne sont qu’un lointain souvenir.

Le soir, je suis invité par des américaines ayant été en échange à Paris (et que j’ai rencontré quelques fois) à un diner dans un resto italien. J’y retrouve quelques bonnes connaissances, et rencontre d’autres étudiantes que je n’ai pas eu l’occasion de connaître à Paris (remarquez comme mes rencontres américaines sur Paris ou ici comportent un « e » à la fin de leur adjectifs… pourquoi ? Eh bien, je dirais à celui qui n’a jamais essayé d’être Le français au milieu d’un cercle d’américaines de tenter sa chance, et de revenir me donner ses impressions). Ramené en voiture, je m’arrête sur le campus, et me paye une « pita », avec des légumes frais et du poulet. Sauf que la pita d’ici, c’est pas la même qu’en France. Cassante, pas super fraiche… le repas me filera un mal de gorge.

(Mickey et Minnie étaient également présents et ont pu apprécier le petit concert)

(Austin Tower by night)

Je rejoins ensuite Hugo pour un Ping Pong (pour changer), sauf qu’il n’y a aucune table de libre… bon, eh bien racketball cela sera. Sauf qu’il n’y a aucune balle de libre… bon, bah on en achètera la prochaine fois. Sa journée, ainsi que celle de David, fut plus chargée que la mienne, et si je pouvais décrire en une phrase leur sentiment sur la toute nouvelle difficulté de leurs études, je dirais simplement « Aaargghhh… ».

Le lendemain, j’ai la joie de découvrir le cours de volley avancé. Ici, chaque joueur masculin a l’assurance d’un mec qui sait qu’il joue comme un Dieu. Ils jouent tellement bien qu’ils se permettent de se foutre de la gueule des TA quand ces derniers ratent quelques balles. Quand aux filles ? Haha. Disons que si elles montaient une équipe, elles gagneraient probablement le tournoi universitaire Parisien. Sur une jambe et les yeux bandés. Que mes amies volleyeuses qui me lisent n’en prennent pas ombrage, (vous jouez super bien les filles !) mais là chacune des joueuses pourrait prétendre sans problème à une place dans un club prisé Parisien. De toute façon, comme précisé dans l’article précédent, jouer en club est à peu près obligatoire pour avoir accès à ce cours (je dis « à peu près » car je veux me laisser un peu d’espoir…).

Bref, c’est un plaisir immense que de jouer au milieu de ces étudiantes bourrées de talents (au volleyball) , et je suis sûr que quand l’égo de ces messieurs aura dégonflé, cela sera aussi un plaisir de jouer avec eux. Si j’ai la chance de rester.

Pour l’instant, il faut remplir un questionnaire concernant nos connaissances du volleyball. Première partie : « décrivez toutes les actions suivantes », s’en suivent 10 mots complètement inconnus de mon vocabulaire… Oups. J’en fais part au prof, qui rigole et me dit quelque chose, que je ne comprends pas non plus. Je fais signe que « ah ouais, j’ai compris » (j’ai pas encore le courage d’insister sur le fait que, « désolé, mais sur ce que vous venez de dire, j’ai juste compris le « Ok ? » final », surtout devant une classe de 50 américains silencieux). J’écris juste sur ma copie que je ne connais aucun de ces mots en anglais, mais les connais certainement en français, et passe à la question suivante : « décrivez le 6-2 ». Oups. Bon… « Le 6-2 est ce que je suis venu apprendre dans ce cours », voilà. Dernière question : « Ecrivez un moment amusant de vos vacances d’été. » Ah ! ça je sais faire ! ça va suffire pas vrai ? Pas vrai… ?

Je garde espoir sur le fait qu’avoir payé le prof en bonbon m’aura permis de gagner ses bonnes faveurs.

Nous quittons le gymnase à 12h20, ce qui me laisse 10 minutes pour rejoindre le bâtiment de communication, situé à l’autre bout de campus. En vélo, ça se fait… sauf qu’à 12h20, les rues d’un campus ressemblent à une manifestation Parisienne… pleine d’étudiants pas vraiment pressés. Et là, sur le chemin de mon premier cours de montage, alors que des milliers d’étudiants sont entrain de me mettre en retard, je commence à avoir mes premières envies de meurtre.

« EH TROU DU’C ! TU CROIS QUE C’EST FAIT POUR QUOI LES TROTTOIRS ?! FAIRE TREBUCHER LES GRANDS-MÈRES ?! » est ce que j’aurais volontiers déclaré à une centaine de personnes déambulant sur les routes devant moi, mais à quoi j’ai préféré le plus diplomatique « Sorryyyy ! ».

J’entre en classe à 12h29, montre au poignet. Haletant (y’a une belle côte à monter pour rejoindre le bâtiment) couvert de sueur, probablement puant (pas eu le temps de me changer), mais heureux d’être à l’heure. La prof m’accueille avec un sourire et me fait signe de m’assoire à côté d’elle (la vingtaine d’étudiants présent est assise autour d’une grande table en bois, la prof en tête… pour un peu je nous renommerais Les Monteurs de la Table Rectangulaire.)

Je me rends rapidement compte que la prof est super sympathique, et me mets très vite à l’aise, si bien que je fais parti du trio d’élève qui participera le plus. Nous abordons des sujets exotiques aux yeux des américains (Truffaut, Eisenstein…) où j’ai la possibilité de m’illustrer en tant qu’étudiant également exotique qui connaît déjà ces sujets (comme s’en seront rendu compte mes camarades cinéastes français en souriant à la lecture de ces deux noms plus que connus de nos registres.)

Mais j’ai également le plaisir de découvrir que nous ne faisons ici que les évoquer… les analyses de montage concerneront plus des films cultes adorés des étudiants, si bien qu’à chaque extrait j’ai le sourire jusqu’aux oreilles et un mot qui résonne si fort dans ma poitrine que j’ai peur qu’il ne couvre la bande son du film… ce mot ? « Enfin ! ENFIN ! ».

Mon cours fini, je retrouve Hugo au Texas Union, ce grand bâtiment dédié aux étudiants (restaus, jeux, salles de travail ou de repas). Nous découvrons ensemble le fast food le plus « cheap » de l’histoire des Etats-Unis : Le Taco Bell. Décrit par plusieurs amis américains comme un endroit où l’on peut manger à prix modique la nourriture la moins saine possible, enrobé de galettes de blé ou de maïs. Ce à quoi ils ajoutaient généralement : mais c’est tellement bon !

Nous prenons donc le menu basique : burrito, chips et boisson (avec free refill (à volonté)). 2 dollars. Soit 1.65 euros environ… Sérieusement, a-t-on déjà vu ça en France ? C’est même pratiquement moins cher que les repas les moins cher que j’ai eu la chance de manger en Malaisie ! (mais incomparable gustativement parlant, la Malaisie met une raclée au Taco Bell sur ce point là).

Plan pour l’après midi (ah oui, j’ai oublié de préciser : je n’ai plus cours après 14h le jeudi. Pas plus que je n’ai cours le vendredi ou le weekend… « Vil bâtard ! » me direz-vous, ce à quoi j’hocherais vigoureusement la tête en souriant, si ce n’est qu’ici, le travail à la maison ressemble beaucoup plus à celui du Lycée, où il y a du boulot à faire chaque semaine, et des interros à chaque cours (tout dépend des matières, par exemple ce n’est pas le cas pour le montage, où il faut en général venir à la fac pour monter 4 à 8 heures d’une semaine à l’autre) donc au final, mon vendredi, j’en profite rarement pour danser la lambada avec des Américaines en bikini.

Je disais donc, avant que vous ne m’interrompiez : plan pour l’après midi, supermarché ! Cette fois, accompagné d’Hugo, nous essayons de nous rendre dans un magasin du nom de Target, légèrement plus petit que le Wal-Mart, tout en restant suffisamment immense.

Nous vérifions donc le trajet. Nous savons que nous pouvons tomber dessus en suivant la ligne 3, et l’associons logiquement au centre commercial que nous voyons au bout de la ligne. Parfait. Nous montons donc dans le bus, et restons debout un moment par manque de place. C’est alors que l’une d’entre elle se libère à côté d’une superbe jeune fille. Hugo est devant moi, cela sera donc lui qui profitera de sa compagnie… sauf qu’Hugo choisi d’être beau joueur, et de me laisser la place en s’asseyant derrière. Je me sens du coup dans le devoir d’engager la conversation. Mais comme souvent dans ce genre de situation, je n’ai absolument aucune idée de comment m’y prendre sans avoir l’air d’un prétendant bavant devant son évidente beauté. C’est alors qu’une idée me vient.

Ni une ni deux, je sors ma carte de bus, et commence à prendre la classique expression « Olalala, mais dis donc j’y comprends rien à ces cartes moi ! D’ailleurs je vais le dire à haute voix à mon camarade de derrière pour bien montrer que je ne suis pas américain, ce qui explique pourquoi j’ai l’air de ne rien comprendre à ces cartes, moi, olalala. » Et une fois l’idée instillée dans la charmante tête de ma voisine avec la subtilité d’un marteau piqueur, je me lance le plus naturellement du monde : « Excuse me, I’m a little bit lost, could you help me ? ». Et mes amis, je peux vous le dire, le sourire qui me réponds est en soit une récompense suffisante.

Je lui demande si le Target est bien le centre commercial indiqué en bas de la carte, ce à quoi elle me réponds qu’elle pense que oui, toujours souriante. J’enchaine en lui racontant nos exploits pour accéder au Wal-Mart l’autre jour, et les 4 heures qu’il nous aura fallu. Elle s’en amuse, et s’excuse d’un air désolé : c’est son arrêt. Je m’écarte pour la laisser passer, et me lance dans un effort de volonté surhumain pour ne pas baisser les yeux tandis qu’elle remonte le bus.. pour décrocher son vélo à l’avant. Sportive en plus. Eh beh… Au moins, maintenant on est sûr qu’on ne mettra pas aussi longtemps que pour aller au Wal-Mart, haha !

Haha.

Au bout d’une vingtaine de minutes, s’ajoutant aux vingt précédentes, nous commençons à devenir un peu inquiets, surtout que nous n’arrivons toujours pas à nous repérer dans les rues. Nous vérifions donc la carte, et le dernier passager du bus, assis derrière nous, nous demande alors où nous allons. « Target », que nous lui répondons. « Target ? » enchaine-t-il, « Olala, mais c’est à une vingtaine de minutes au nord ! Vous l’avez dépassé ! » « Oh… donc ce n’est pas au bout de la ligne ? » « Oooh non ! Haha ! C’est au nord ! » « Au nord… »

J’aurais du baisser les yeux...

Notre nouvel ami nous conseillant de descendre à l’arrêt « Ben and White », nous sortons du bus et traversons la route à la recherche de l’arrêt opposé. Bien sûr, si un bus s’était pointé de suite, ça n’aurait pas été drôle…

Le bus fini par arriver, et cette fois nous demandons au chauffeur de nous prévenir lors de l’arrivé à Ben and White. Nous nous asseyons en vu de ce dernier pour ne pas qu’il nous oublie. Puis le temps passe… passe… et passe encore. Et alors que nous commençons à nous dire qu’on devrait être dans la bonne zone, le chauffeur jette un coup d’œil dans son rétro, nous aperçoit, et accompagnant sa parole d’une claque sur le front, s’exclame à notre grand désespoir « Oh shit ! Ben and White ! I’m so sorry ! ».

Bon. Relax. D’après lui ça vaut le coup de marcher plutôt que d’attendre un bus dans l’autre sens, il y en a pour une quinzaine de minutes. Nous marchons donc, jusqu’à arriver jusqu’à Ben and White. Enfin… nous le supposons, sachant que la rue n’a aucun nom. Très pratique pour des gens peu familier au quartier pour trouver l’un des plus gros centre commerciaux de la ville… encore une fois, les indications laissent à désirer.

Nous faisons ensuite notre petit shopping. J’en profite pour acheter une rackette de tennis, sachant que le soir ayant suivis le cours, des places s’étaient libérées, et j’ai donc pu officiellement m’inscrire.

Le retour s’effectue sans problème. Mais au final, il nous aura quand même fallu 3 heures. On s’améliore, mais c’est toujours un problème.

Nous faisons une partie de racketball pour fêter ça, où Hugo explosera joyeusement sa rackette en frappant la balle. Pas le mur, le sol, ou le plafond, juste la balle. Et pas si fort que ça en plus. Sauf que les employés à qui nous empruntons les rackettes n’étaient pas très disposés à le croire, malgré sa parole, et sa parole que je donnerais la mienne. Ça passe pour cette fois, mais la prochaine il aura à repayer. Pensée pour l’avenir : éviter de frapper la balle au racketball.

Sur le chemin du retour, nous nous rendons compte que les moustiques préfèrent largement me bouffer les jambes plutôt que les siennes. Nous associons cet acharnement au fait que je bois peut-être plus de sodas que lui, et que mon sang est donc naturellement plus sucré… « Eh les filles ! C’est free refill !!! »

En rentrant chez moi, je me rends compte que quelqu’un est venu réparer le problème d’évier que j’avais signalé (un caillou coincé dans le broyeur). Ce qui m’étonne surtout, c’est que le réparateur est rentré chez moi sans me prévenir, a fait son boulot et est reparti. J’ai quand même pas mal d’affaires de valeurs dans mon appart, et l’idée d’avoir quelqu’un qui entre et sort comme bon lui semble m’a mis un petit peu mal à l’aise.

Le lendemain, ma première action de la journée est d’accrocher au mur l’ardoise que je me suis acheté la veille, en ayant inscrit au préalable en gros de ma (superbe) écriture « Enjoy every moment », au cas où je l’oublierais dans la confusions d’une journée chargée.

Je rejoins ensuite Hannah à vélo, en réalisant que bien que j’ai acheté un casque, je ne le met toujours pas pour la stupide raison que je ne veux pas bousiller ma coupe de cheveux. Je suis alors pris d’un rire nerveux, convaincu que si je meurs d’un accident de vélo, ça sera à cause de mes cheveux. Mais je me rends rapidement compte du ridicule de cette situation, et porter un casque deviendra vite aussi rassurant pour moi que sentir la pression d’une ceinture de sécurité.

Je retrouve donc Hannah dans « The Honor Quarter », un morceau de campus « réservé » aux étudiants brillants, avec des bâtiments style anciens où le calme a élu domicile, si ce n’est la présence d’un vieux piano dans une des salles de lecture, où une étudiante est entrain d’interpréter un air d’une musique tout à fait de circonstance. Hannah m’emmènera ensuite dans sa bibliothèque préférée ; celle qui ressemble au château de Poudlard, dans Harry Potter. Et oui, elle pourrait effectivement figurer dans l’un des films de la célèbre série. Et ça c’est quand même la classe, dans une fac. Ce qui est nul en revanche, c’est l’absence d’une forteresse style « Minas Tirith » comme dans le Seigneur des Anneaux. Mais bon, je suppose qu’un campus ne peut pas tout avoir…

(Les escaliers de la bibliothèque)

Elle me fait également découvrir le « Coco’s Café », qui deviendra un lieu de pèlerinage pour mon petit groupe. Ce restaurant taïwanais offre une excellente nourriture à prix tout à fait corrects, mais et surtout, des smoothies glacés aux boules de tapioca. Pas évident à décrire quand on ne connaît pas… désolé, mais va falloir que vous veniez tester.

(Smoothies glacés aux boules de tapioca)

Je m’amuse de voir Hannah se demander si les deux américaines de la table d’à côté parlent français. Apparemment, elle aurait entendu un ou deux mots de ma langue maternelle. Pour la libérer de ce doute qui ne cesse de la ronger, je fais la seule chose raisonnable dans ce type de situation : Avisant ma soupe de nouilles, je m’exclame d’une voix forte « Ah ! Ils servent pas des nouilles de tapettes ici ! ». Aucune réaction. Elles ne parlent pas français.

Je fini ma soirée avec la bande, les amenant dans le bar pour découvrir la boisson, puis les suivant à leur Co-op : ils auraient apparemment un billard avec belle vue sur Austin. Et effectivement, ils ont un billard avec une belle vue sur Austin. Même qu’on peut y jouer gratuitement, en appréciant la vue sur Austin. La Co-op a ses bons côtés, il faut avouer.

(Austin by night, V2.0)

Le lendemain, je passe de nombreuses heures à vous écrire un superbe article de blog (dans le cas où vous vous demanderiez où est passé toute ma mâtinée… je ne voudrais pas que vous croyez que je l’ai perdu à dormir. Non, pas ici, il y a trop à faire).

Nous enchainons par une visite de Zilker Park, un parc entourant Barton Springs, avec différentes activités… dont le Kayak. Cette fois, pour innover un petit peu, je jouerais au Kayak/Base-ball avec une balle de tennis trouvée dans l’eau et lancée par Hugo, et une rame me servant de batte. J’ai décidé de tenter de frapper tant que je n’aurais pas réussi un Home Run, ou que je ne serais pas tombé à l’eau (il faut savoir qu’un kayak est extrêmement instable, et que l’on abandonne vite la beauté du swing pour juste frapper comme on peut, les jambes tremblantes pour garder un équilibre précaire). Et puisque vous mourrez d’envie de connaître le résultat de ce jeu de titan, sachez que j’ai réussi à frapper la balle… sans tomber. Enfin, si, une fois au début, mais sur le Kayak.

(Le kayak-ball, sport encore trop peu connu)

Nous sommes ensuite conviés à un repas gratuit (FREE FOOOD !) organisé par une association désireuse d’aider les étudiants à découvrir les bons côtés des Etats Unis. Encore une fois, France, bordel, quand est-ce qu’on découvrira ça chez toi ?!

(Cette paire de chaussure nous regardait de haut tandis que nous savourions le repas gratuit. D'après Céline, cela signifierait "Nous vendons de la drogue ici... et balançons des paires de pompes sur des fils électriques.)

La seule chose à noter concernant le dimanche suivant est notre expérience d’un racketball à 4 (deux contre deux), et la découverte du bâtiment de musique par une visite guidée d’Hannah. Hugo étant un grand amateur de piano, il a pu en redécouvrir les joies dans l’une des vingtaines de salles privées, toutes contenant un piano en libre accès aux étudiants de la fac. Oui, je pense qu’il n’est pas inutile de le répéter : l’Université du Texas, c’est foufoufou…

Lundi matin, j’ai chevauché mon vélo 15 minutes pour aller en cours de volley, 15 minutes pour rentrer chez moi et manger, 15 minutes pour aller à mon premier cours de tennis plus au nord, et 25 minutes pour rentrer sur le campus à grande vitesse pour ne pas être en retard à mon premier cours de Trans Média. Je suis arrivé à temps, mais je n’avais pas prévu qu’avec cette chaleur (pour l’instant je pars du principe que vous associez 40 degrés de moyenne à chaque article), qu’avec cette chaleur donc, la marque de ma selle soit incrustée à grand renfort de transpiration sur mon postérieur, me donnant l’impression de… de… enfin, vous savez. Superbe opportunité pour mon illustre personne de faire une entrée remarquable en cours.

Le cours a lieu dans un ancien studio de tournage, immense, composé d’une 40ène de Macs, ainsi que d’une grande table en bois au milieu (encore plus grande que celle des Monteurs de la Table Rectangulaire). A première vue, je ne sais pas quoi penser du prof : grisonnant, pas mal d’embonpoint, habillé d’un costume… je ne sais pas s’il a l’air sévère ou sympathique. Mais déjà un point positif : un clip de musique plutôt cool est projeté au mur pour nous accueillir en classe. Je ne le sais pas encore, mais cela va être un événement répété à chaque cours, ainsi qu’à chaque pause. Nous sommes invités à proposer nos clips ou vidéos préférées si l’envie nous prends.

Il suffira qu’il ouvre la bouche pour répondre à ma précédente question : sévère ou sympathique. Ce prof a compris la clef d’un des meilleurs moyen d’enseigner : le rire. Avez-vous déjà eu un prof qui, pour souligner ses exemples, se met à jouer le rôle des personnes qu’il cite, à tel point que l’on se croirait au théâtre ? Moi, jamais. Et je dois avouer que pour toute la durée de ces trois heures, je ne déride pas. De plus, il adore la France, ce qui fait de moi l’un de ses interlocuteurs préféré.

Et Trans Media, qu’est-ce que ça veut dire ? C’est notre vie, à nous, étudiants : Internet, Télévision, musique, jeux vidéos, Facebook, Youtube, Téléphone portables… tous ces médias qui de plus en plus s’entrecroisent pour en créer de nouveaux. Plutôt cool non ? Le projet du semestre ? Inventer une franchise Trans Media, et la présenter devant la classe comme si cette dernière était composée d’investisseurs. Je sais pas vous, mais moi j’adore. Je mets de côté le fait qu’il nous surcharge de travail chaque semaine, parce que d’une manière générale, ça reste vraiment intéressant. Son principe est simple : le mec qui a inventé Facebook l’a fait à 22 ans. C’était un mec comme nous. Du coup, son objectif est de nous faire réfléchir à des questions que nous ne nous poserions pas forcément de nous même, et, peut-être, de faire de l’un d’entre nous le créateur du prochain Facebook.

J’ai oublié de préciser qu’il a eu une carrière de fou et qu’il fait ce job bénévolement, par amour de l’enseignement. Et que quelqu’un qui à l’amour de l’enseignement, cela se ressent à chaque instant. Elle est loin, loin, ma fac de Paris 8, avec ses professeurs qui nous « apprennent » ce qu’est un hors champ en première année de Master.

En revanche, mon estomac commence à se rebeller contre la mal bouffe que je lui impose, et me fera subir toutes les misères du monde pendant toute la durée du cours. Je ne sais pas si vous avez déjà subit cette très désagréable sensation, ou vous en venez à vous dire « pourvu qu’il ne me fasse pas trop rire… ». Lors d’un premier cours, devant une vingtaine d’américains, ça fait vraiment flipper. Fort heureusement, le cours se termine sans incident.

Le lendemain commence l’évaluation du cours de volley avancé. Je m’en sors pas trop mal, mais je suis clairement derrière tous les gars de la classe. Je décide donc de passer au plan B, et de séduire toutes les filles d’un coup. Lorsqu’il m’échoie d’engager un jeu, je me met alors à prononcer « service » à la française (c’est le même mot en anglais, la prononciation change juste avec l’accent). Je remarque immédiatement que ça fonctionne, j’entends de petits rires discrets et croise quelques sourires. Chez les filles seulement, bien sûr. Je m’occuperais des gars plus tard. J’arbore également avec fierté mon maillot de volley de Paris 8 (pour une fois que je suis fier de Paris 8) qui m’aide à faire comprendre à ceux ayant du mal avec les accents que oui, je suis bel et bien un vrai Français de Paris ! T’as vu comme c’est fou !

Le cours de montage qui suit se passe avec autant de plaisir que le précédent. La prof m’offre même la possibilité d’éviter d’avoir à lire devant la classe deux pages de scénario, comme le font une partie de mes camarades (qui ont définitivement le sens de la lecture : ils jouent autant qu’ils lient). Bref, je lui suis reconnaissant de m’éviter ce moment embarrassant.

Je retrouve ensuite Hugo à l’union pour ce qui sera désormais une agréable habitude : manger de la bouffe crade ensemble en se racontant les journées passées. Cette fois nous prenons un repas au Wendy’s (fast food style macdo) et décidons de manger dehors pour changer. Sauf que nous comprenons vite pourquoi peu de monde ne tente sa chance ici… Une sorte d’oiseau que je ne connais pas est très répandu à Austin, ils ressemblent à de petits corbeaux, ont un cris très désagréable, et sont vraisemblablement de gros voleurs. Au point d’atterrir sur la table devant nous pour voler une frite dans son sachet et s’envoler après. Nous nous retrouvons vite encerclé par ces prédateurs nous dévisageant, nous et notre nourriture, d’un œil torve, tandis que nous cachons au mieux notre repas. Les tentatives d’Hugo pour les effrayer restent infructueuses… ils ont été habitué à la présence d’étudiants protégeant leur repas depuis des décennies, et ne cèderont pas un centimètre devant nos bruyantes gesticulations. Mais la fin du repas sera notre, et la bande de chasseurs s’en ira vite tourmenter un autre étudiant inconscient.

A 18h commence mon cours de « Broadcast and Cable Management », l’équivalent du cours que Paris 8 m’impose de prendre. Il a l’air intéressant du fait que nous sommes sensé rencontrer chaque semaine des professionnels du monde de la Télévision (directeur de chaine, et autres postes importants). Ce cours est différent des autres du fait qu’il a lieu dans un amphithéâtre, et la salle pleine à craquer doit bien contenir 150 étudiants. J’ai la mauvaise idée de me placer vers le milieu, ce qui va grandement compliquer la compréhension du cours ; je n’avais pas pensé à l’écho (écho + anglais = chinois.)

Le prof arrive, et lance un « Good evening ! » retentissant. La majeure partie de la classe répond, mais le prof souriant ajoute « Non, mieux que ça : « GOOD EVENING ! », et cette fois toute la classe reprend en cœur, en y mettant le ton. Le prof est satisfait. Et dès qu’il ouvre la bouche pour commencer son cours, je commence à flipper : Il a l’accent Texan. Un très fort accent. Et ça ajouté à l’écho, je ne comprends pratiquement rien de ce qu’il nous dit. Dans les autres cours, l’anglais n’a pas été un problème, mais ici il va certainement l’être. Surtout que le principe du cours est une interro chaque semaine sur le cours de la semaine précédente… Va falloir que je m’habitue rapidement à ce style de langage si je veux valider ce cours... puisque je DOIS valider cet unique cours pour Paris 8. Génial. J’avais bien besoin de ça.

Une autre partie de la note sera basée sur des interviews que nous sommes sensé donner à des personnalités importantes du milieu de la TV. Il nous échoue de contacter la personne la plus importante possible, peu importe sa location dans les USA, et lui demander 5 minutes de son temps (soit par téléphone, soit de visu si c’est possible), et lui demander en gros ce qui lui plait dans ce boulot. Le but de l’exercice est nous faire des contacts, ce qui est une sacrée bonne idée.

Je n’ai absolument aucune idée de qui je vais bien pouvoir contacter, mais pour l’instant, la priorité reste de comprendre ce que ce monsieur en costume essaye de nous communiquer dans son cours. Je vais le voir à la fin de la classe pour lui expliquer mon problème, ce qui l’amuse. Il me rassure en me disant de lui écrire un mail pour qu’il puisse faire un dossier à mon nom, et se rappelle à l’avenir que je ne suis pas un abruti, juste un français.

Je passe la soirée en compagnie d’Hannah et de quelques autres connaissances, pour l’anniversaire de Jenn, une copine rencontrée à Paris. C’est alors que je me rends compte que je connais 10 personnes autour de cette table, sachant qu’à part moi ne sont présents que deux autres français. Je suis assez impressionné ; rencontrer des américains à Paris aura vraiment porté ses fruits.

En revanche, pour la première fois depuis que je suis ici, le plat (mexicain) est beaucoup trop épicé, dans le genre immangeable. Les américaines se moquent de moi et de ma faible résistance au piment, et je les invite à goûter ce qui était sensé être la sauce la moins épicée du menu. Elles tournent rapidement rouge en s’écriant « Oh mon Dieu ! Mais pourquoi tu continues de manger ?! ça fait super mal ! ». Il faut croire qu’il y a eu une petite erreur dans la préparation du plat.

J’achève ici ma première semaine de cours, plus que satisfait de mon emplois du temps. J’ai un total de 21 heures de cours, ce qui est beaucoup pour un semestre (la moyenne est 12 heures de cours, sachant que, comme je vous l’avais précisé, il y a beaucoup de travail perso). Enfin, je verrais bien, ça m’a l’air tout à fait réalisable. Je vais profiter à fond de ce premier semestre, faire des connaissances, sachant que j’en aurais bien besoin pour entamer mon second semestre. Car, oui, une fois Noël passé, mon but principal changera. Au printemps, je fini l’insouciance : je devrais réaliser un court métrage.

Gasp…