lundi 11 octobre 2010

Volleyball, l'intime relation

L’Edito du rédacteur en chef :

Chers lecteurs,

Suite à de nombreuses plaintes, l’attention du Blog Once Upon a Time in the Southwest a récemment été attiré sur la taille de ses articles, que de nombreux lecteurs considèrent comme trop imposants. Notre Blog, tenant à garder la fidélité des quelques attardés mentaux ayant des difficultés à lire l’hebdomadaire demi douzaine de pages, prendra donc compte de ces réclamations, et changera le mode d’écriture pour adopter un style plus anecdotique. Nous espérons que cela satisfasse nos bien-aimés lecteurs.

De la même manière, nous avons reçu un nombre incroyable de requêtes demandant à ce que l’auteur souligne de manière plus précise ses formidables qualités physiques. De ce fait, dans le but de satisfaire l’admiration de nos abonnés, nous consacrerons cet article au volley-ball. En revanche, au risque de perdre quelques lecteurs, j’insiste sur le fait qu’il n’y aura pas de photo de nu postées sur la galerie photo.

En espérant que ces modifications apportées à notre Blog vous apportent joie, bonheur et amour, la rédaction vous souhaite une excellente journée.

Vincent Desgrippes,

Rédacteur en Chef,

« Notre préoccupation, c’est votre satisfaction. Et la météo aussi, parce que la pluie, c’est chiant. »

Chapitre VIII – Volley-ball

Avez-vous déjà frappé une balle le temps d’un saut ? Senti cette exultation au moment du contact avec la main, et la jubilation intense de voir la balle filer et rebondir d’un claquement sec sur le terrain adverse, accompagné des cris de joie de vos coéquipiers ? Je l’ai connu en France, et ce fut immédiatement le coup de foudre, un amour inconditionnel pour ce sport qui me permettait de m’échapper de ma bulle et de me perdre dans une plénitude physique et morale que seuls les bras d’une fille pourraient surpasser.

Oh, oui, le volley-ball a tout d’une relation.

Au début on est un peu timide, on se cherche, n’osant pas trop la toucher. On est maladroit, on essaye ce que les copains plus expérimentés nous conseillent, sans forcément réussir, mais c’est normal, on débute. Et elle reste toujours compréhensive, l’air de dire « t’inquiète pas, la prochaine fois ça sera mieux », même quand on vise mal.

Puis on prend finalement confiance, on sent le début d’une connexion, et les gestes deviennent plus naturels, plus réguliers. C’est la phase de la relation que connaît la majeure partie des joueurs ; où l’on découvre le plaisir, mais sans trop penser à l’avenir ; où l’on se concentre sur l’instant présent en donnant le meilleur de soi-même. Cette phase est généralement très gratifiante.

Et puis le manque s’installe entre chaque rendez-vous. On aimerait ne jamais s’arrêter, passer tout notre temps libre ensemble. Alors on se retrouve de plus en plus souvent, de jour comme de nuit. Cela devient une obsession, un but : la retrouver, la toucher, jouer un peu avec elle, et passer aux choses sérieuses… Avec le temps vient l’expérience et l’assurance, et de là la confiance dans les différents partenaires qui nous permettent de découvrir des sensations encore inconnues, des positions plus complexes, plus efficaces…

Arrive alors la phase de l’exaltation, l’amour fou, inconditionnel. Chaque rendez-vous est un mélange de douceur et de violence, les gestes sont à présent d’une efficacité maximum, précis et puissants, procurant un plaisir extrême.

Et vient la trahison. En général lorsque l’on ne s’y attend pas, lorsque nous ne sommes pas prêt. Et la blessure, intense, violente, nous rend plus misérable que jamais. Au début on n’y croit pas, on continue tête baissée, essayant de se convaincre que ce n’est qu’un rêve. Puis la réalité reprend le dessus, et l’on fini par accepter que c’est peut-être fini. Alors on négocie, on appelle ça « une pause », mais au fond nous savons qu’il y a peu d’espoir. On refuse d’écouter nos amis qui nous disent que dans quelques mois on retrouvera d’autres partenaires, que ça sera aussi bien. On s’en fout, quelques mois c’est trop long ! Nous en avons besoin maintenant, tout de suite.

Et puis le temps passe, et à cause de l’inactivité la passion s’estompe. Jusqu’à se retrouver à nouveau devant elle… la tenir dans ses bras, la caresser doucement… et se mettre à rêver. Enfin, le processus peut recommencer.

Et pour moi, il a recommencé aux Etats-Unis, après une blessure aux doigts qui m’aura empêché de jouer pendant trois mois. Et lorsqu’on ne joue pas pendant trois mois lorsque la totalité de notre temps de jeu n’a pas dépassé les sept mois, le niveau en prend un coup. En général dans les parties. L’extase décrite en premier paragraphe lors de l’attaque d’une balle est bien loin. A la fin de l’année dernière, je pouvais globalement choisir où je voulais que ma balle finisse sa course. Ici, j’exécute la danse de la victoire lorsque ma faible frappe atterrie plus ou moins entre les lignes adverses. Bref, j’ai du boulot avant de redevenir le demi-dieu que j’étais.

Sauf que dans ma classe de volley avancé, je n’aurais pas le temps de rattraper mon niveau avant la fin des évaluations, et si je ne suis pas assez bon, je vais rapidement entendre quelque chose comme « Je suis vraiment désolé, mais tu sais qu’ils m’ont coupé le budget… j’ai pas le choix… ».

Alors je me donne à fond sur les quelques séances disponibles. Le désavantage est qu’à côté de ces excellents joueurs, j’ai l’air d’un clown. Super sexy, soit, mais un clown tout de même. L’avantage est que j‘ai le même prof lors de mon cours de volley intermédiaire, et qu’il est plus simple de se distinguer dans cette classe. D’une manière générale, je ne fais pas trop d’erreur, mais je ne fais rien d’exceptionnel non plus, si ce n’est ma spécialité : me jeter par terre pour sauver des balles. Je n’ai pas peur de me faire mal, du coup quand 5 joueurs restent debout et que l’un d’eux commence une course désespérée, plonge (au ralenti, avec une musique d’Ennio Morricone résonnant dans tout le gymnase plongé dans le silence), et sauve (ou presque) une balle, ça fait toujours belle impression.

A ce propos, faudrait vraiment que je dépose un brevet sur les « hanchières », parce que franchement, j’en ai un peu marre de me cramer les hanches chaque fois que j’embrasse le sol.

Pour en revenir à l’évaluation, au final je n’ai aucune idée de ce que sera son choix (ou plutôt leurs choix, car je pense qu’il prendra l’avis des Teacher Assistant en considération). Lors de la dernière journée d’évaluation, il forme deux équipes et va nous regarder jouer en 5-1. Comme la majorité d’entre vous, je n’ai aucune idée de ce que cela veut dire, sauf qu’ici, je suis le seul. Par chance, j’ai des joueurs expérimentés dans mon équipe qui m’expliqueront tout au long du match mes placements. (Pour les intéressés, 5-1 signifie cinq attaquants et un passeur, ce qui influe sur les rotations et le placement de chaque joueur durant le jeu). J’ai donc droit à une heure d’apprentissage intensif, et oubliant l’espace d’un instant que je suis évalué, je me surprends à adorer cette situation, adorer le fait d’apprendre quelque chose de nouveau sur ma passion et d’y être plus efficace. A la fin de l’heure, je maitrise les placements de ma position pour le 5-1, ce qui, je l’espère, va peser pour mon cas. Je l’espère, car je n’ai plus de bonbons français.

Mes espoirs fondent rapidement comme glaçon dans un four, lorsqu’avant de nous libérer le prof s’adresse à nous, disant qu’il enverra un e-mail dans l’après midi aux joueurs concernés, et qu’il faudra pas mal le prendre bla bla bla mais que c’est pour le bien de la classe bla bla bla. Les autres joueurs n’ayant pas régressé en trois séances, j’ai toujours le niveau le plus faible. J’hésite à lui envoyer un mail pour lui assurer qu’une fois mon niveau retrouvé, je pourrais prendre cette bande de tapettes un par un. Enfin… disons plutôt qu’ils pourront me prendre dans leur équipe sans trop faire la gueule.

Au final je m’en abstient, je ne veux pas donner l’impression de supplier, même si un refus m’exposerait à de sérieux problèmes, vu que je n’aurais pas les crédits demandés par l’université.

Etant trop stressé pour faire quoi que ce soit, je me laisse plonger dans une sieste relaxante (il doit encore y avoir des morceaux de décalage horaire là-dedans… car « dormir » et « stress » n’ont jamais accepté de faire parti de mon dictionnaire perso. Lorsque je me réveille, je vérifie mes mails, et voit le nom de mon prof en haut de la liste…

Argh.

La mort dans l’âme, j’ouvre le mail, et découvre le verdict.

« I just wanted to touch base with you before the weekend and let you know about volleyball class evaluations.

Based on this week, expectations of play, and your willingness and attitude, we would love to keep you in the advanced class. However, we need you to make an effort to learn some of the offensive system and terminology that will go along with advanced play. This may take you staying longer or coming early on some days. »

Pour ceux n’étant pas familiers avec la langue de Bruce Willis, cela dit globalement qu’au vu de ses attentes concernant le jeu, de ma volonté et mon attitude, il adorerait me garder dans le cours de volley avancé, mais qu’il faudra juste que je fasse un effort pour apprendre ce que je ne connais pas encore, soit en venant plus tôt à certains cours, soit en achetant un livret explicatif.

Comme vous pouvez l’imaginer, le soulagement m’inonde (non, je n’ai pas pleuré), et je m’autorise quelques éclats de rire joyeux. De mémoire, je lui réponds rapidement quelque chose comme « Hi ! Yeah ! Great ! Haha ! (Soulagement) » et lui livre ma joie dans un paragraphe reconnaissant.

Maintenant je sais que je n’ai plus rien à craindre pour mes crédits, je vais pouvoir apprécier le jeu sans arrières pensées, et ne plus avoir peur de rater. Lors du cours suivant, les quatre TA auront formés quatre équipes. Je suis le dernier membre choisi dans la mienne, mais rien de surprenant à cela, il m’incombe à présent de leur prouver qu’ils n’ont pas fait de mauvais choix ! Mon objectif est que d’ici quelques séances je sois redevenu au moins un tiers de Dieu, à défaut d’un demi.

Notre équipe choisi le nom d’Awesome Sauce (en gros : Mélange Génial), et il faut croire que ce nom n’était pas anodin. Un tournois s’étalant sur plusieurs semaines est organisé, chaque séance donnant lieu à un match en situation réelle (c’est à dire qu’il faut gagner 3 jeux de 21 points sur 5 pour remporter la victoire). Nous remportons les trois premiers matchs du premier jour. Ouais, juste comme ça. Et même que j’ai marqué des points.

Bien que n’étant pas encore très à l’aise avec mes compagnons, ils sont tous très patients et m’expliquent les mécanismes du 6-2 jusqu’à ce que je me sente assez en confiance pour me débrouiller tout seul. Les filles en particulier m’offrent des sourires lorsque je rate certaines balles, et lorsqu’on a la pression d’une équipe de joueurs expérimentés sur les épaules, en particulier lorsque les deux remplaçants jouent mieux que vous, ces sourires sont la plus précieuse chose qui soit.

Voulant jouer en dehors des cours, je profite de l’opportunité qu’un joueur du cours intermédiaire cherche à monter une équipe intramurale pour m’inscrire. Ces équipes s’affronteront tout le long du semestre dans un grand tournoi, et tous les étudiants de l’université peuvent participer et monter leur équipe (100 dollars par équipe). D’un point de vu français, on se dit « ouais, ok, ça va être un tournois avec deux ou trois équipes, génial ». C’était en tout cas le mien, jusqu’à ce que je vois la liste des équipes inscrites : plus d’une centaine. Donc facilement plus de 800 étudiants. Mais au vu des 50 000 inscris à la fac, ça semble d’un coup plus normal. Certains noms d’équipes m’ont d’ailleurs bien amusé, le grand vainqueur étant « Nos balles, Vos mentons ».

L’ennui avec mon équipe, c’est que l’on est 12 inscris, ce qui signifie très peu de jeu pour chaque joueur. Je remarques également que certains inscris ont un niveau assez faible, ce qui signifie que ça va pas être simple, voir même galère. Enfin, ils n’envisagent pas de s’entrainer en-dehors des cours, ce qui pue à peu près autant que la mort. Je signe malgré tout, en me disant sans y croire que j’aurais peut-être une autre opportunité d’ici à ce que le tournoi commence, dans quelques semaines.

Et en effet, quelques semaines plus tard, comme s’il savait que j’allais faire cette transition dans mon blog, un excellent joueur (8 ans de jeu… on se sent petit à côté) avec qui j’avais juste l’habitude de dire bonjour et d’échanger quelques mots, me demande si je suis dans une équipe. « Oui. Non. Peut-être. Pourquoi ? » Parce qu’il lui manque un joueur, et que j’ai l’air de correspondre au profil. 6 joueurs donc. 7 envisagés, pour être sûr qu’on sera toujours 6 en match, donc beaucoup de jeu. Entrainement en dehors des cours ? Bien sûr ! On cherche toujours des joueurs pour jouer en semaine. Le niveau de l’équipe ? Entre 5 et 8 ans de jeu pour presque tous les joueurs. Et vous voulez de moi ? Bien sûr ! On veut s’amuser avant tout.

Mais voilà, je suis inscris dans l’autre équipe. Un terrible dilemme me ronge alors l’esprit. Pendant à peu près 0.3890 secondes. « Comment je m’inscris ? ». Charles, qui est également le capitaine, m’emmène alors dans une bibliothèque (encore une), me retire de mon ancienne équipe (byebye !) et m’inscrit dans la nouvelle. Nous sommes mardi, entrainement vendredi, premier match dimanche. Woooo !

Pendant ce temps, le tournoi du cours de volley avancé s’est terminé, après un mois de jeu. Résultat : Awesome Sauce vainqueur par 11 victoires sur 11 matches. Awesome ! Dans l’intervalle je me suis imposé comme un bras fiable de l’équipe, et ai finalement retrouvé l’exultation d’une belle attaque. Pari réussi : je suis à présent un tiers de Dieu. Ayant gagné le tournoi, nous sommes dispensé de test de compétence, auquel je participe tout de même par curiosité. Et la semaine suivante, lors de la création des nouvelles équipes, je suis choisi en deuxième. French Rules !

Vendredi l’entrainement se passe dans la joie et la bonne humeur. Mon équipe est géniale, pas de joueur à l’égo démesuré, des jolies filles… Pardon, je la refais : des super jolies filles (rien de mieux pour motiver à plonger) et une ambiance extra. Notre nom ? You Know… Et au final la majorité d’entre eux reprennent juste le volley, du coup malgré leurs longues années de jeu, le niveau reste très homogène.

Quand à notre premier match, il commence dans deux heures… Je vais donc terminer ici cet article, en espérant ne pas vous avoir endormi d’une overdose de volley. J’étais tellement excité ces derniers jours qu’il fallait absolument que j’en parle. Parce que bon, on aura beau dire mais le volley, ça déchire.

PS : On a gagné le match. You Know rules !

Re-PS : Si, si, cet article est plus court...

samedi 2 octobre 2010

Les Monteurs de la Table Rectangulaire

Aujourd’hui, premier jour de cours. Mon emplois du temps de la journée sera un cours de volleyball intermédiaire, un cours de tennis pour débutant, et aurait été un labo de montage, sauf que ce dernier est annulé, la prof préférant avoir un cours avant de nous envoyer en labo. J’ai connu pires premières journées…

Je me rends compte que quelques mois en arrière, penser à cette journée me donnait des frissons d’adrénaline, liés à la peur de l’inconnu. J’avais certes hâte d’être aux USA, mais pas forcément de commencer les cours. Aujourd’hui, c’est un sourire impatient qui illumine mon visage tandis que je chevauche fièrement Blue Max (mon vélo, à qui j’ai finalement donné le nom qui resplendissait sur l’écusson violet ornant son beau poitrail blanc… J’avais le choix entre Blue Max ou « Plateau – 21 Speed », mais c’était moins classe. Et on s’en fout qu’il soit blanc avec un nom disant qu’il est bleu, voyez ça comme un hommage à Barry White.)

Je pénètre sur les coups de 8h30 dans l’immense gymnase du campus, présentant ma carte à l’entrée (après tout, on a beau être dans un centre sportif, ça reste le Club Med, faut payer pour avoir le droit d’y accéder). Le cours de volley aura lieu dans le plus petit des deux gymnase (ou, disons plutôt, le moins grand). Une fois en tenue, quatre de mes dix doigts bandés (pour cause d’excès de volley-ball lors de la fin de l’année dernière, où après m’être éclaté quatre articulations avec une balle de beach volley, je me suis allègrement retourné le pouce de l’autre main le jour de ma reprise), je m’assieds au pied d’un mur près des quelques étudiants déjà présents. Le silence règne, du coup j’attends patiemment que le prof arrive, continuant de bander mes doigts.

Au bout d’un moment, un étudiant vient s’asseoir à mes côtés, et engage la conversation à propos de mes genouillères (il faut savoir que j’ai des genouillères de warrior ; ayant bousillé quatre paires de genouillères classiques en l’espace de 6 mois de jeu, j’ai investi dans une grosse paire solide qui me donne l’air d’un Robocop du volleyball (enfin, au niveau du genoux quoi). Mon nouveau compagnon s’appelle Jason, et fait des études de physiologie, comme beaucoup de monde ici. Je suis l’un des rares étudiant à venir d’un autre département d’étude, en particulier pour des crédits (même si la raison principale reste que le volley est le meilleur sport du monde (c’est mon blog, je dis c’que j’veux)).

Le prof arrive enfin. Imposant, sympathique, charismatique. Il est entouré de quatre TA, ces fameux Teaching Assistants, étudiants en doctorat chargés de l’assister dans son enseignement. Ils ont l’air sûrs d’eux ; des volleyeurs aguerris, et très à l’aise avec les étudiants. La TA en chef se permet même d’être jolie en plus du reste.

Le prof nous fait ensuite un petit speech concernant le contenu du cours : majoritairement des exercices de groupe, puis au bout d’un certain temps des matchs, et régulièrement quelques quizz de connaissances. Mais également un élément qui m’a particulièrement surpris : sont requises 4 heures de bénévolat dans une association étudiante du campus. Peu importe l’association, peu importe quand est-ce qu’on les fera, il demande que l’on s’investisse un minimum dans la vie du campus. Original, et pas pour me déplaire.

Les deux premières semaines seront consacrées à l’évaluation de notre niveau, sachant que s’ils estiment que nous ralentissons la classe, ils nous demanderons gentiment de quitter ce cours et rejoindre celui pour débutant. Je ne m’inquiète pas, je pense avoir un niveau correct pour une classe intermédiaire. Par contre je commence à flipper pour le cours de volley avancé… cela sera probablement le même type d’évaluation, et malgré les protestations indignées de mon égo, il n’est pas dit que je sois au niveau.

Et au bout de vingt minutes, après avoir signé des papiers affirmant que nous ne poursuivrons pas la fac en justice si jamais on se blesse, le prof annonce la fin du cours. Une colossale frustration monte en moi ; ça fait quatre mois que j’attends de pouvoir taper dans une balle, et au bout d’un discours de vingt minutes faudrait se casser ? J’vais t’la poursuivre en justice cette fac de merde moi !

C’est alors qu’il ajoute « Sinon les filets sont montés ; le cours est fini, donc vous pouvez jouer si vous voulez, et moi je n’ai rien dis, rien vu rien entendu. » Ah, ça y’est, je l’aime. Pour le remercier je vais lui offrir les bonbons français promis, qu’il accepte en éclatant de rire, arguant que ses enfants vont être content. Après lui avoir conseillé de pas tout leur laisser (c’est précieux les Haribos ici…), je vais rejoindre mes camarades et profiter à fond de l’heure à venir.

Mon cours suivant étant tennis, je me rends dans le second gymnase du campus. Plus petit et souterrain, je croise quelques grandes salles, certaines abritant des cours de tir à l’arc…

Ceci étant le premier jour, nous n’avons pas cours aux 40 terrains de tennis situés à 20 minutes au nord du campus, mais remplissons juste des papiers dans une grande salle. Le prof est également sympathique, la TA aussi. Notre note inclura beaucoup de tests, physiques comme écrits. Jouer en-dehors des cours rapporte également des points, ainsi qu’assister à des matchs de professionnels. Je crois que je vais adorer mes cours de sport…

En observant son CV (oui, les profs fournissent leur CV, histoire de prouver que la fac se fout pas de notre gueule… et elle se fout jamais de notre gueule) je me rends compte qu’il a entrainé l’équipe de tennis féminine de Malaisie pendant 2 ans. Ni une ni deux (mais plutôt 20 minutes après), à la fin du cours, je me présente à lui comme le français l’ayant contacté par mail, et engage une conversation passionnée sur la Malaisie, ses paysages magnifiques, sa population locale fantastique, et sa nourriture divine. Trois points sur lesquels nous étions sûrs d’être d’accords.

Etant désœuvré pour le reste de la journée, je vais repérer mes salles de cours dans les deux grands bâtiments du College of Communication, qui comprend mon cursus (RTF : Radio Film Television). Je croise à peu près 10 salles (ouvertes) contenant chacune au moins 20 macs dernière génération. Je croise quatre immenses studios de tournage (de la taille de magasins,et très hauts de plafond), je croise des ascenseurs immenses capable de faire entrer des camionnettes dans ces studios (5eme et 6eme étage). Ah, oui, j’ai oublié de préciser que dans chaque bâtiment étaient présents des ascenseurs. Ascenseurs fonctionnels hein, allant par paire. Les escalators à moitié pétés de Paris 8, remplis de chaises et de tables en vrac la moitié de l’année (lors des grèves) ne sont qu’un lointain souvenir.

Le soir, je suis invité par des américaines ayant été en échange à Paris (et que j’ai rencontré quelques fois) à un diner dans un resto italien. J’y retrouve quelques bonnes connaissances, et rencontre d’autres étudiantes que je n’ai pas eu l’occasion de connaître à Paris (remarquez comme mes rencontres américaines sur Paris ou ici comportent un « e » à la fin de leur adjectifs… pourquoi ? Eh bien, je dirais à celui qui n’a jamais essayé d’être Le français au milieu d’un cercle d’américaines de tenter sa chance, et de revenir me donner ses impressions). Ramené en voiture, je m’arrête sur le campus, et me paye une « pita », avec des légumes frais et du poulet. Sauf que la pita d’ici, c’est pas la même qu’en France. Cassante, pas super fraiche… le repas me filera un mal de gorge.

(Mickey et Minnie étaient également présents et ont pu apprécier le petit concert)

(Austin Tower by night)

Je rejoins ensuite Hugo pour un Ping Pong (pour changer), sauf qu’il n’y a aucune table de libre… bon, eh bien racketball cela sera. Sauf qu’il n’y a aucune balle de libre… bon, bah on en achètera la prochaine fois. Sa journée, ainsi que celle de David, fut plus chargée que la mienne, et si je pouvais décrire en une phrase leur sentiment sur la toute nouvelle difficulté de leurs études, je dirais simplement « Aaargghhh… ».

Le lendemain, j’ai la joie de découvrir le cours de volley avancé. Ici, chaque joueur masculin a l’assurance d’un mec qui sait qu’il joue comme un Dieu. Ils jouent tellement bien qu’ils se permettent de se foutre de la gueule des TA quand ces derniers ratent quelques balles. Quand aux filles ? Haha. Disons que si elles montaient une équipe, elles gagneraient probablement le tournoi universitaire Parisien. Sur une jambe et les yeux bandés. Que mes amies volleyeuses qui me lisent n’en prennent pas ombrage, (vous jouez super bien les filles !) mais là chacune des joueuses pourrait prétendre sans problème à une place dans un club prisé Parisien. De toute façon, comme précisé dans l’article précédent, jouer en club est à peu près obligatoire pour avoir accès à ce cours (je dis « à peu près » car je veux me laisser un peu d’espoir…).

Bref, c’est un plaisir immense que de jouer au milieu de ces étudiantes bourrées de talents (au volleyball) , et je suis sûr que quand l’égo de ces messieurs aura dégonflé, cela sera aussi un plaisir de jouer avec eux. Si j’ai la chance de rester.

Pour l’instant, il faut remplir un questionnaire concernant nos connaissances du volleyball. Première partie : « décrivez toutes les actions suivantes », s’en suivent 10 mots complètement inconnus de mon vocabulaire… Oups. J’en fais part au prof, qui rigole et me dit quelque chose, que je ne comprends pas non plus. Je fais signe que « ah ouais, j’ai compris » (j’ai pas encore le courage d’insister sur le fait que, « désolé, mais sur ce que vous venez de dire, j’ai juste compris le « Ok ? » final », surtout devant une classe de 50 américains silencieux). J’écris juste sur ma copie que je ne connais aucun de ces mots en anglais, mais les connais certainement en français, et passe à la question suivante : « décrivez le 6-2 ». Oups. Bon… « Le 6-2 est ce que je suis venu apprendre dans ce cours », voilà. Dernière question : « Ecrivez un moment amusant de vos vacances d’été. » Ah ! ça je sais faire ! ça va suffire pas vrai ? Pas vrai… ?

Je garde espoir sur le fait qu’avoir payé le prof en bonbon m’aura permis de gagner ses bonnes faveurs.

Nous quittons le gymnase à 12h20, ce qui me laisse 10 minutes pour rejoindre le bâtiment de communication, situé à l’autre bout de campus. En vélo, ça se fait… sauf qu’à 12h20, les rues d’un campus ressemblent à une manifestation Parisienne… pleine d’étudiants pas vraiment pressés. Et là, sur le chemin de mon premier cours de montage, alors que des milliers d’étudiants sont entrain de me mettre en retard, je commence à avoir mes premières envies de meurtre.

« EH TROU DU’C ! TU CROIS QUE C’EST FAIT POUR QUOI LES TROTTOIRS ?! FAIRE TREBUCHER LES GRANDS-MÈRES ?! » est ce que j’aurais volontiers déclaré à une centaine de personnes déambulant sur les routes devant moi, mais à quoi j’ai préféré le plus diplomatique « Sorryyyy ! ».

J’entre en classe à 12h29, montre au poignet. Haletant (y’a une belle côte à monter pour rejoindre le bâtiment) couvert de sueur, probablement puant (pas eu le temps de me changer), mais heureux d’être à l’heure. La prof m’accueille avec un sourire et me fait signe de m’assoire à côté d’elle (la vingtaine d’étudiants présent est assise autour d’une grande table en bois, la prof en tête… pour un peu je nous renommerais Les Monteurs de la Table Rectangulaire.)

Je me rends rapidement compte que la prof est super sympathique, et me mets très vite à l’aise, si bien que je fais parti du trio d’élève qui participera le plus. Nous abordons des sujets exotiques aux yeux des américains (Truffaut, Eisenstein…) où j’ai la possibilité de m’illustrer en tant qu’étudiant également exotique qui connaît déjà ces sujets (comme s’en seront rendu compte mes camarades cinéastes français en souriant à la lecture de ces deux noms plus que connus de nos registres.)

Mais j’ai également le plaisir de découvrir que nous ne faisons ici que les évoquer… les analyses de montage concerneront plus des films cultes adorés des étudiants, si bien qu’à chaque extrait j’ai le sourire jusqu’aux oreilles et un mot qui résonne si fort dans ma poitrine que j’ai peur qu’il ne couvre la bande son du film… ce mot ? « Enfin ! ENFIN ! ».

Mon cours fini, je retrouve Hugo au Texas Union, ce grand bâtiment dédié aux étudiants (restaus, jeux, salles de travail ou de repas). Nous découvrons ensemble le fast food le plus « cheap » de l’histoire des Etats-Unis : Le Taco Bell. Décrit par plusieurs amis américains comme un endroit où l’on peut manger à prix modique la nourriture la moins saine possible, enrobé de galettes de blé ou de maïs. Ce à quoi ils ajoutaient généralement : mais c’est tellement bon !

Nous prenons donc le menu basique : burrito, chips et boisson (avec free refill (à volonté)). 2 dollars. Soit 1.65 euros environ… Sérieusement, a-t-on déjà vu ça en France ? C’est même pratiquement moins cher que les repas les moins cher que j’ai eu la chance de manger en Malaisie ! (mais incomparable gustativement parlant, la Malaisie met une raclée au Taco Bell sur ce point là).

Plan pour l’après midi (ah oui, j’ai oublié de préciser : je n’ai plus cours après 14h le jeudi. Pas plus que je n’ai cours le vendredi ou le weekend… « Vil bâtard ! » me direz-vous, ce à quoi j’hocherais vigoureusement la tête en souriant, si ce n’est qu’ici, le travail à la maison ressemble beaucoup plus à celui du Lycée, où il y a du boulot à faire chaque semaine, et des interros à chaque cours (tout dépend des matières, par exemple ce n’est pas le cas pour le montage, où il faut en général venir à la fac pour monter 4 à 8 heures d’une semaine à l’autre) donc au final, mon vendredi, j’en profite rarement pour danser la lambada avec des Américaines en bikini.

Je disais donc, avant que vous ne m’interrompiez : plan pour l’après midi, supermarché ! Cette fois, accompagné d’Hugo, nous essayons de nous rendre dans un magasin du nom de Target, légèrement plus petit que le Wal-Mart, tout en restant suffisamment immense.

Nous vérifions donc le trajet. Nous savons que nous pouvons tomber dessus en suivant la ligne 3, et l’associons logiquement au centre commercial que nous voyons au bout de la ligne. Parfait. Nous montons donc dans le bus, et restons debout un moment par manque de place. C’est alors que l’une d’entre elle se libère à côté d’une superbe jeune fille. Hugo est devant moi, cela sera donc lui qui profitera de sa compagnie… sauf qu’Hugo choisi d’être beau joueur, et de me laisser la place en s’asseyant derrière. Je me sens du coup dans le devoir d’engager la conversation. Mais comme souvent dans ce genre de situation, je n’ai absolument aucune idée de comment m’y prendre sans avoir l’air d’un prétendant bavant devant son évidente beauté. C’est alors qu’une idée me vient.

Ni une ni deux, je sors ma carte de bus, et commence à prendre la classique expression « Olalala, mais dis donc j’y comprends rien à ces cartes moi ! D’ailleurs je vais le dire à haute voix à mon camarade de derrière pour bien montrer que je ne suis pas américain, ce qui explique pourquoi j’ai l’air de ne rien comprendre à ces cartes, moi, olalala. » Et une fois l’idée instillée dans la charmante tête de ma voisine avec la subtilité d’un marteau piqueur, je me lance le plus naturellement du monde : « Excuse me, I’m a little bit lost, could you help me ? ». Et mes amis, je peux vous le dire, le sourire qui me réponds est en soit une récompense suffisante.

Je lui demande si le Target est bien le centre commercial indiqué en bas de la carte, ce à quoi elle me réponds qu’elle pense que oui, toujours souriante. J’enchaine en lui racontant nos exploits pour accéder au Wal-Mart l’autre jour, et les 4 heures qu’il nous aura fallu. Elle s’en amuse, et s’excuse d’un air désolé : c’est son arrêt. Je m’écarte pour la laisser passer, et me lance dans un effort de volonté surhumain pour ne pas baisser les yeux tandis qu’elle remonte le bus.. pour décrocher son vélo à l’avant. Sportive en plus. Eh beh… Au moins, maintenant on est sûr qu’on ne mettra pas aussi longtemps que pour aller au Wal-Mart, haha !

Haha.

Au bout d’une vingtaine de minutes, s’ajoutant aux vingt précédentes, nous commençons à devenir un peu inquiets, surtout que nous n’arrivons toujours pas à nous repérer dans les rues. Nous vérifions donc la carte, et le dernier passager du bus, assis derrière nous, nous demande alors où nous allons. « Target », que nous lui répondons. « Target ? » enchaine-t-il, « Olala, mais c’est à une vingtaine de minutes au nord ! Vous l’avez dépassé ! » « Oh… donc ce n’est pas au bout de la ligne ? » « Oooh non ! Haha ! C’est au nord ! » « Au nord… »

J’aurais du baisser les yeux...

Notre nouvel ami nous conseillant de descendre à l’arrêt « Ben and White », nous sortons du bus et traversons la route à la recherche de l’arrêt opposé. Bien sûr, si un bus s’était pointé de suite, ça n’aurait pas été drôle…

Le bus fini par arriver, et cette fois nous demandons au chauffeur de nous prévenir lors de l’arrivé à Ben and White. Nous nous asseyons en vu de ce dernier pour ne pas qu’il nous oublie. Puis le temps passe… passe… et passe encore. Et alors que nous commençons à nous dire qu’on devrait être dans la bonne zone, le chauffeur jette un coup d’œil dans son rétro, nous aperçoit, et accompagnant sa parole d’une claque sur le front, s’exclame à notre grand désespoir « Oh shit ! Ben and White ! I’m so sorry ! ».

Bon. Relax. D’après lui ça vaut le coup de marcher plutôt que d’attendre un bus dans l’autre sens, il y en a pour une quinzaine de minutes. Nous marchons donc, jusqu’à arriver jusqu’à Ben and White. Enfin… nous le supposons, sachant que la rue n’a aucun nom. Très pratique pour des gens peu familier au quartier pour trouver l’un des plus gros centre commerciaux de la ville… encore une fois, les indications laissent à désirer.

Nous faisons ensuite notre petit shopping. J’en profite pour acheter une rackette de tennis, sachant que le soir ayant suivis le cours, des places s’étaient libérées, et j’ai donc pu officiellement m’inscrire.

Le retour s’effectue sans problème. Mais au final, il nous aura quand même fallu 3 heures. On s’améliore, mais c’est toujours un problème.

Nous faisons une partie de racketball pour fêter ça, où Hugo explosera joyeusement sa rackette en frappant la balle. Pas le mur, le sol, ou le plafond, juste la balle. Et pas si fort que ça en plus. Sauf que les employés à qui nous empruntons les rackettes n’étaient pas très disposés à le croire, malgré sa parole, et sa parole que je donnerais la mienne. Ça passe pour cette fois, mais la prochaine il aura à repayer. Pensée pour l’avenir : éviter de frapper la balle au racketball.

Sur le chemin du retour, nous nous rendons compte que les moustiques préfèrent largement me bouffer les jambes plutôt que les siennes. Nous associons cet acharnement au fait que je bois peut-être plus de sodas que lui, et que mon sang est donc naturellement plus sucré… « Eh les filles ! C’est free refill !!! »

En rentrant chez moi, je me rends compte que quelqu’un est venu réparer le problème d’évier que j’avais signalé (un caillou coincé dans le broyeur). Ce qui m’étonne surtout, c’est que le réparateur est rentré chez moi sans me prévenir, a fait son boulot et est reparti. J’ai quand même pas mal d’affaires de valeurs dans mon appart, et l’idée d’avoir quelqu’un qui entre et sort comme bon lui semble m’a mis un petit peu mal à l’aise.

Le lendemain, ma première action de la journée est d’accrocher au mur l’ardoise que je me suis acheté la veille, en ayant inscrit au préalable en gros de ma (superbe) écriture « Enjoy every moment », au cas où je l’oublierais dans la confusions d’une journée chargée.

Je rejoins ensuite Hannah à vélo, en réalisant que bien que j’ai acheté un casque, je ne le met toujours pas pour la stupide raison que je ne veux pas bousiller ma coupe de cheveux. Je suis alors pris d’un rire nerveux, convaincu que si je meurs d’un accident de vélo, ça sera à cause de mes cheveux. Mais je me rends rapidement compte du ridicule de cette situation, et porter un casque deviendra vite aussi rassurant pour moi que sentir la pression d’une ceinture de sécurité.

Je retrouve donc Hannah dans « The Honor Quarter », un morceau de campus « réservé » aux étudiants brillants, avec des bâtiments style anciens où le calme a élu domicile, si ce n’est la présence d’un vieux piano dans une des salles de lecture, où une étudiante est entrain d’interpréter un air d’une musique tout à fait de circonstance. Hannah m’emmènera ensuite dans sa bibliothèque préférée ; celle qui ressemble au château de Poudlard, dans Harry Potter. Et oui, elle pourrait effectivement figurer dans l’un des films de la célèbre série. Et ça c’est quand même la classe, dans une fac. Ce qui est nul en revanche, c’est l’absence d’une forteresse style « Minas Tirith » comme dans le Seigneur des Anneaux. Mais bon, je suppose qu’un campus ne peut pas tout avoir…

(Les escaliers de la bibliothèque)

Elle me fait également découvrir le « Coco’s Café », qui deviendra un lieu de pèlerinage pour mon petit groupe. Ce restaurant taïwanais offre une excellente nourriture à prix tout à fait corrects, mais et surtout, des smoothies glacés aux boules de tapioca. Pas évident à décrire quand on ne connaît pas… désolé, mais va falloir que vous veniez tester.

(Smoothies glacés aux boules de tapioca)

Je m’amuse de voir Hannah se demander si les deux américaines de la table d’à côté parlent français. Apparemment, elle aurait entendu un ou deux mots de ma langue maternelle. Pour la libérer de ce doute qui ne cesse de la ronger, je fais la seule chose raisonnable dans ce type de situation : Avisant ma soupe de nouilles, je m’exclame d’une voix forte « Ah ! Ils servent pas des nouilles de tapettes ici ! ». Aucune réaction. Elles ne parlent pas français.

Je fini ma soirée avec la bande, les amenant dans le bar pour découvrir la boisson, puis les suivant à leur Co-op : ils auraient apparemment un billard avec belle vue sur Austin. Et effectivement, ils ont un billard avec une belle vue sur Austin. Même qu’on peut y jouer gratuitement, en appréciant la vue sur Austin. La Co-op a ses bons côtés, il faut avouer.

(Austin by night, V2.0)

Le lendemain, je passe de nombreuses heures à vous écrire un superbe article de blog (dans le cas où vous vous demanderiez où est passé toute ma mâtinée… je ne voudrais pas que vous croyez que je l’ai perdu à dormir. Non, pas ici, il y a trop à faire).

Nous enchainons par une visite de Zilker Park, un parc entourant Barton Springs, avec différentes activités… dont le Kayak. Cette fois, pour innover un petit peu, je jouerais au Kayak/Base-ball avec une balle de tennis trouvée dans l’eau et lancée par Hugo, et une rame me servant de batte. J’ai décidé de tenter de frapper tant que je n’aurais pas réussi un Home Run, ou que je ne serais pas tombé à l’eau (il faut savoir qu’un kayak est extrêmement instable, et que l’on abandonne vite la beauté du swing pour juste frapper comme on peut, les jambes tremblantes pour garder un équilibre précaire). Et puisque vous mourrez d’envie de connaître le résultat de ce jeu de titan, sachez que j’ai réussi à frapper la balle… sans tomber. Enfin, si, une fois au début, mais sur le Kayak.

(Le kayak-ball, sport encore trop peu connu)

Nous sommes ensuite conviés à un repas gratuit (FREE FOOOD !) organisé par une association désireuse d’aider les étudiants à découvrir les bons côtés des Etats Unis. Encore une fois, France, bordel, quand est-ce qu’on découvrira ça chez toi ?!

(Cette paire de chaussure nous regardait de haut tandis que nous savourions le repas gratuit. D'après Céline, cela signifierait "Nous vendons de la drogue ici... et balançons des paires de pompes sur des fils électriques.)

La seule chose à noter concernant le dimanche suivant est notre expérience d’un racketball à 4 (deux contre deux), et la découverte du bâtiment de musique par une visite guidée d’Hannah. Hugo étant un grand amateur de piano, il a pu en redécouvrir les joies dans l’une des vingtaines de salles privées, toutes contenant un piano en libre accès aux étudiants de la fac. Oui, je pense qu’il n’est pas inutile de le répéter : l’Université du Texas, c’est foufoufou…

Lundi matin, j’ai chevauché mon vélo 15 minutes pour aller en cours de volley, 15 minutes pour rentrer chez moi et manger, 15 minutes pour aller à mon premier cours de tennis plus au nord, et 25 minutes pour rentrer sur le campus à grande vitesse pour ne pas être en retard à mon premier cours de Trans Média. Je suis arrivé à temps, mais je n’avais pas prévu qu’avec cette chaleur (pour l’instant je pars du principe que vous associez 40 degrés de moyenne à chaque article), qu’avec cette chaleur donc, la marque de ma selle soit incrustée à grand renfort de transpiration sur mon postérieur, me donnant l’impression de… de… enfin, vous savez. Superbe opportunité pour mon illustre personne de faire une entrée remarquable en cours.

Le cours a lieu dans un ancien studio de tournage, immense, composé d’une 40ène de Macs, ainsi que d’une grande table en bois au milieu (encore plus grande que celle des Monteurs de la Table Rectangulaire). A première vue, je ne sais pas quoi penser du prof : grisonnant, pas mal d’embonpoint, habillé d’un costume… je ne sais pas s’il a l’air sévère ou sympathique. Mais déjà un point positif : un clip de musique plutôt cool est projeté au mur pour nous accueillir en classe. Je ne le sais pas encore, mais cela va être un événement répété à chaque cours, ainsi qu’à chaque pause. Nous sommes invités à proposer nos clips ou vidéos préférées si l’envie nous prends.

Il suffira qu’il ouvre la bouche pour répondre à ma précédente question : sévère ou sympathique. Ce prof a compris la clef d’un des meilleurs moyen d’enseigner : le rire. Avez-vous déjà eu un prof qui, pour souligner ses exemples, se met à jouer le rôle des personnes qu’il cite, à tel point que l’on se croirait au théâtre ? Moi, jamais. Et je dois avouer que pour toute la durée de ces trois heures, je ne déride pas. De plus, il adore la France, ce qui fait de moi l’un de ses interlocuteurs préféré.

Et Trans Media, qu’est-ce que ça veut dire ? C’est notre vie, à nous, étudiants : Internet, Télévision, musique, jeux vidéos, Facebook, Youtube, Téléphone portables… tous ces médias qui de plus en plus s’entrecroisent pour en créer de nouveaux. Plutôt cool non ? Le projet du semestre ? Inventer une franchise Trans Media, et la présenter devant la classe comme si cette dernière était composée d’investisseurs. Je sais pas vous, mais moi j’adore. Je mets de côté le fait qu’il nous surcharge de travail chaque semaine, parce que d’une manière générale, ça reste vraiment intéressant. Son principe est simple : le mec qui a inventé Facebook l’a fait à 22 ans. C’était un mec comme nous. Du coup, son objectif est de nous faire réfléchir à des questions que nous ne nous poserions pas forcément de nous même, et, peut-être, de faire de l’un d’entre nous le créateur du prochain Facebook.

J’ai oublié de préciser qu’il a eu une carrière de fou et qu’il fait ce job bénévolement, par amour de l’enseignement. Et que quelqu’un qui à l’amour de l’enseignement, cela se ressent à chaque instant. Elle est loin, loin, ma fac de Paris 8, avec ses professeurs qui nous « apprennent » ce qu’est un hors champ en première année de Master.

En revanche, mon estomac commence à se rebeller contre la mal bouffe que je lui impose, et me fera subir toutes les misères du monde pendant toute la durée du cours. Je ne sais pas si vous avez déjà subit cette très désagréable sensation, ou vous en venez à vous dire « pourvu qu’il ne me fasse pas trop rire… ». Lors d’un premier cours, devant une vingtaine d’américains, ça fait vraiment flipper. Fort heureusement, le cours se termine sans incident.

Le lendemain commence l’évaluation du cours de volley avancé. Je m’en sors pas trop mal, mais je suis clairement derrière tous les gars de la classe. Je décide donc de passer au plan B, et de séduire toutes les filles d’un coup. Lorsqu’il m’échoie d’engager un jeu, je me met alors à prononcer « service » à la française (c’est le même mot en anglais, la prononciation change juste avec l’accent). Je remarque immédiatement que ça fonctionne, j’entends de petits rires discrets et croise quelques sourires. Chez les filles seulement, bien sûr. Je m’occuperais des gars plus tard. J’arbore également avec fierté mon maillot de volley de Paris 8 (pour une fois que je suis fier de Paris 8) qui m’aide à faire comprendre à ceux ayant du mal avec les accents que oui, je suis bel et bien un vrai Français de Paris ! T’as vu comme c’est fou !

Le cours de montage qui suit se passe avec autant de plaisir que le précédent. La prof m’offre même la possibilité d’éviter d’avoir à lire devant la classe deux pages de scénario, comme le font une partie de mes camarades (qui ont définitivement le sens de la lecture : ils jouent autant qu’ils lient). Bref, je lui suis reconnaissant de m’éviter ce moment embarrassant.

Je retrouve ensuite Hugo à l’union pour ce qui sera désormais une agréable habitude : manger de la bouffe crade ensemble en se racontant les journées passées. Cette fois nous prenons un repas au Wendy’s (fast food style macdo) et décidons de manger dehors pour changer. Sauf que nous comprenons vite pourquoi peu de monde ne tente sa chance ici… Une sorte d’oiseau que je ne connais pas est très répandu à Austin, ils ressemblent à de petits corbeaux, ont un cris très désagréable, et sont vraisemblablement de gros voleurs. Au point d’atterrir sur la table devant nous pour voler une frite dans son sachet et s’envoler après. Nous nous retrouvons vite encerclé par ces prédateurs nous dévisageant, nous et notre nourriture, d’un œil torve, tandis que nous cachons au mieux notre repas. Les tentatives d’Hugo pour les effrayer restent infructueuses… ils ont été habitué à la présence d’étudiants protégeant leur repas depuis des décennies, et ne cèderont pas un centimètre devant nos bruyantes gesticulations. Mais la fin du repas sera notre, et la bande de chasseurs s’en ira vite tourmenter un autre étudiant inconscient.

A 18h commence mon cours de « Broadcast and Cable Management », l’équivalent du cours que Paris 8 m’impose de prendre. Il a l’air intéressant du fait que nous sommes sensé rencontrer chaque semaine des professionnels du monde de la Télévision (directeur de chaine, et autres postes importants). Ce cours est différent des autres du fait qu’il a lieu dans un amphithéâtre, et la salle pleine à craquer doit bien contenir 150 étudiants. J’ai la mauvaise idée de me placer vers le milieu, ce qui va grandement compliquer la compréhension du cours ; je n’avais pas pensé à l’écho (écho + anglais = chinois.)

Le prof arrive, et lance un « Good evening ! » retentissant. La majeure partie de la classe répond, mais le prof souriant ajoute « Non, mieux que ça : « GOOD EVENING ! », et cette fois toute la classe reprend en cœur, en y mettant le ton. Le prof est satisfait. Et dès qu’il ouvre la bouche pour commencer son cours, je commence à flipper : Il a l’accent Texan. Un très fort accent. Et ça ajouté à l’écho, je ne comprends pratiquement rien de ce qu’il nous dit. Dans les autres cours, l’anglais n’a pas été un problème, mais ici il va certainement l’être. Surtout que le principe du cours est une interro chaque semaine sur le cours de la semaine précédente… Va falloir que je m’habitue rapidement à ce style de langage si je veux valider ce cours... puisque je DOIS valider cet unique cours pour Paris 8. Génial. J’avais bien besoin de ça.

Une autre partie de la note sera basée sur des interviews que nous sommes sensé donner à des personnalités importantes du milieu de la TV. Il nous échoue de contacter la personne la plus importante possible, peu importe sa location dans les USA, et lui demander 5 minutes de son temps (soit par téléphone, soit de visu si c’est possible), et lui demander en gros ce qui lui plait dans ce boulot. Le but de l’exercice est nous faire des contacts, ce qui est une sacrée bonne idée.

Je n’ai absolument aucune idée de qui je vais bien pouvoir contacter, mais pour l’instant, la priorité reste de comprendre ce que ce monsieur en costume essaye de nous communiquer dans son cours. Je vais le voir à la fin de la classe pour lui expliquer mon problème, ce qui l’amuse. Il me rassure en me disant de lui écrire un mail pour qu’il puisse faire un dossier à mon nom, et se rappelle à l’avenir que je ne suis pas un abruti, juste un français.

Je passe la soirée en compagnie d’Hannah et de quelques autres connaissances, pour l’anniversaire de Jenn, une copine rencontrée à Paris. C’est alors que je me rends compte que je connais 10 personnes autour de cette table, sachant qu’à part moi ne sont présents que deux autres français. Je suis assez impressionné ; rencontrer des américains à Paris aura vraiment porté ses fruits.

En revanche, pour la première fois depuis que je suis ici, le plat (mexicain) est beaucoup trop épicé, dans le genre immangeable. Les américaines se moquent de moi et de ma faible résistance au piment, et je les invite à goûter ce qui était sensé être la sauce la moins épicée du menu. Elles tournent rapidement rouge en s’écriant « Oh mon Dieu ! Mais pourquoi tu continues de manger ?! ça fait super mal ! ». Il faut croire qu’il y a eu une petite erreur dans la préparation du plat.

J’achève ici ma première semaine de cours, plus que satisfait de mon emplois du temps. J’ai un total de 21 heures de cours, ce qui est beaucoup pour un semestre (la moyenne est 12 heures de cours, sachant que, comme je vous l’avais précisé, il y a beaucoup de travail perso). Enfin, je verrais bien, ça m’a l’air tout à fait réalisable. Je vais profiter à fond de ce premier semestre, faire des connaissances, sachant que j’en aurais bien besoin pour entamer mon second semestre. Car, oui, une fois Noël passé, mon but principal changera. Au printemps, je fini l’insouciance : je devrais réaliser un court métrage.

Gasp…

samedi 18 septembre 2010

"ça va Jean-Pierre? " "ça va comme-ci comme-ça..."


L’une des premières choses que notre nouveau petit groupe décide de faire ensemble (à part le racketball et la chasse aux testicules) est un trip à Wal-Mart. J’emplois le mot « trip » car il ne s’agit pas juste d’aller faire ses courses comme je l’ai fais ces 4 dernières années, avec un Carrefour à 5 minutes à pied de chez moi. Non, ici, il n’y a pas de gros supermarché en centre ville, il faut s’y rendre en bus, et rouler une bonne demi heure. Des rumeurs sont remontés jusqu’à nous disant que certains étudiants avaient roulés une heure pour y aller… mais le site internet des transports locaux nous informe pourtant qu’un Wal-Mart est situé à une demi heure de route, pas la peine donc d’aller à celui deux fois plus loin.

Nous embarquons donc dans un bus nous conduisant au sud de la ville. Nous roulons sur les grandes avenues d’Austin, et croisons des bâtiments de toute sorte. A noter un hôtel avec une enseigne rouge de forme phallique… je me permet d’en parler car je suis persuadé qu’il n’est pas possible qu’ils n’aient pas remarqué en la construisant… "Dis donc Johnny, elle serait pas un peu en forme de zguegue ton enseigne là?" "Ah ouais... merde... bon bah maintenant qu'elle est payée hein...". Je sais pas si ils veulent attirer la clientèle ou autre, mais en tout cas c’était très bizarre.

Comme peut-être mentionné auparavant (j’ai la flemme de chercher, cela restera donc un « peut-être ») les arrêts de bus n’ont pas de nom, on doit se repérer aux noms des rues. Et quand on ne sait pas où on va, cela devient un jeu assez difficile, où il faut constamment rester attentif. Notre carte des bus n’indique que le nom d’une rue sur 3000, ce qui n’est pas d’une grande aide. Fort heureusement, Hugo a le sens de l’orientation et nous fait finalement descendre à proximité du Wal-Mart.

Malheureusement, son sens de l’orientation était en avance de trois stations, et il nous faut donc parcourir ce chemin au bord d’une grosse route sous un soleil de plomb. Nous y croisons d’ailleurs un cactus de Mickey entrain de danser une salsa.

Nous arrivons finalement à notre arrêt de bus, sauf que comme indiqué sur le site internet, il nous reste encore à marcher 1,61 miles vers l’Est.

« C’est combien un mile déjà ? »

« Sais pu trop… un kilomètre et demi ou quelque chose dans le genre. »

« Ah ouais… fait chaud hein ? »

« Plutôt ouais… »

Nous traversons donc la grande avenue et choisissons de prendre la route qui nous paraît la plus logique (après avoir demandé notre direction à un mexicain : )

« Hi, do you know where we could find the Wal-Mart ? »

« Aglabaletedo ? »

« The… Wal-Mart… ? »

« Ooooh ! Wamat ! Gobunidtado eniaco baki ! »

« Baki ? »

« Baki ! Baki ! »

« Oooh yes ! Thank you very much ! »

« You welcome ! »

« Qu’est-ce qu’il a dit ? »

« Eniaco baki. »

« ça veut dire quoi ? »

« Aucune idée, mais j’ai montré l’est, et il avait l’air content. »

Nous marchons donc un long moment, réalisant que l’heure de route est dorénavant écoulée… en prenant le bus pour le second Wal-Mart, nous serions déjà arrivé. Après un nouveau quart d’heure à suivre notre ombre, nous arrivons finalement en vue de l’immense bâtiment tout en longueur, et sautons de joie pour célébrer notre victoire. Du moins le ferions-nous si nous n’étions pas complètement déshydraté.

Une fois à l’intérieur du magasin, et après un refill de boisson bien mérité, nous nous réapprovisionnons pendant une heure, mélangeant cookies et rideau de douche à nos victuailles. Je découvre un maillot de sport à l’effigie du Longhorn, mais plus original que les autres. Je m’empresse de l’acheter, mais Hugo, dans son incessante volonté de devenir moi, en fera rapidement de même.

Il est à présent temps de retourner au bus, et la marche à venir nous démoralise. Nous nous y lançons péniblement, pensant au réconfort de la climatisation de nos appartements. Au final, il nous aura fallu 4 heures pour faire l’aller retour. 4 heures, juste pour quelques courses… ça va pas être possible toute l’année, il va falloir trouver un autre magasin.

Les jours suivant se ressemblent beaucoup : soit je vois la bande, soit je vois Hannah. Je me souviens d’un déjeuné en particulier, avec Hugo et David dans un restaurant Japonais, où lors de payer, David n’avait sur lui qu’un billet de 20 dollars, pour une addition de 13. Il laisse donc son billet, et le serveur disparaît. Mettant un petit peu de temps à réapparaitre, David commence à se demander s’il n’a pas pris le reste de la somme pour un pourboire, ce qui serait bien entendu énorme. Nous commençons à nous imaginer le serveur sauter de joie en cuisine. Mais celui-ci commence vraiment à se faire attendre, s’engage alors une petite conversation entre David et moi :

« C’est pas vrai il va pas revenir !

- Mais si mais si, il ne peut pas ne pas revenir.

- Il va revenir ?

- 7 dollars de pourboire c’est trop, il va revenir… mais en même temps… ptet pas.

- Il va pas revenir…

- Il va pas revenir… nan il peut pas… il peut ?

- Allez reviens enfoiré !

- Il va pas revenir… j’y crois pas, il va pas revenir…

- Il revient pas… sans blague, tu crois qu’il va revenir ?

- Ça me ferait vraiment marrer que non… mais en même temps c’est pas cool pour toi…

- Il revient ! IL REVIENT !

- Il est revenu ! YAAAAY !

Mais au fond de moi je me demande s’il n’a pas attendu si longtemps en cuisine dans l’espoir de nous voir partir sans attendre notre monnaie… nous ne le saurons malheureusement jamais.

Durant le weekend suivant, (waaah ! comment je saute des jours maintenant, truc de ouf !) les parents d’Hannah ont débarqué au volant d’une camionnette de déménagement. Une fois mon nouveau lit, bureau et étagère déposé chez moi (un vrai lit… et plus d’écriture de blog par terre… ahhhhh !) nous nous dirigeons vers l’appartement d’Hannah, à une 15aine de rues de chez moi. Je crois que l’un des instants dont je me souviendrais toujours sera celui où le père d’Hannah, voulant rentrer la camionnette dans un parking souterrain, s’exclame, songeur, en regardant le panneau indiquant « 8 pieds » :

« Je me demande combien fait la camionnette… »

CRAAAAAACK !

« Mmmh… apparemment pas 8 pieds… »

Mais l’avantage de conduire une camionnette de déménagement d’une grosse compagnie, c’est qu’il peut la laisser dans un dépôt à Austin, et dire « ouais c’était comme ça avant… » sans que personne n’y retrouve à dire. Sacré Hans !

Nous déménageons donc une partie du matériel d’Hannah, le plus gros étant stocké dans un entrepôt à Austin, qu’il faudra vider le lendemain matin. Programme de la soirée : le festival de la chauve-souris, sur Congress Bridge, pont abritant des milliers de chauve-souris. Nous savions fort bien que nous serions en retard pour le départ des chauve-souris (du moins je le savais fort bien, mais personne m’écoute jamais ! monde de merde !) mais nous nous rendons néanmoins sur place pour profiter du festival (qui consiste en une foule compacte et des stands de bouffe… second point qui n’est pas pour me déplaire.)

L’heure est donc au repas, et je remarque une roulotte fumante, où un simple hot dog coûte 5 dollars (les yeux de la tête pour les états unis). Je m’y rend donc, et hurle ma commande pour couvrir le bruit en tendant un billet de 10. La nana hurle quelque chose en réponse (je ne saurais jamais quoi, peut-être était-ce quelque chose comme « JE FAIS SEMBLANT DE TE RÉPONDRE MAIS EN FAIT JE T’INSULTE ! ») et prend mon billet de 10 pour me rendre… 2 dollars. Je lui hurle alors que NON, C’EST PAS POSSIBLE, J’AI COMMANDÉ UN HOT DOG. Elle acquiesce, s’excuse (je pense), fouille dans sa caisse et me tend deux billets… un de 5, et un de 10. J’ai un moment d’hésitation, puis empoche les billets en hurlant un remerciement. Après tout, ils n’avaient qu’à pas faire des hot dog aussi petit et aussi cher. Et cela me permis d’acheter une énorme limonade et d’en faire profiter tout le monde, donc bon, hein, BA tout ça. Voilà.

Le lendemain matin, à nouveau emménagement. S’ensuit une invitation dans un restaurant surplombant un superbe lac aux aspects méditerranéen, et offrant une excellente cuisine mexicaine.

Fajitas cela sera donc, en quantité, et offert par les parents d’Hannah. Et quand je dis en quantité, faut imaginer en quantité. Ais-je déjà fait mon paragraphe sur le fait qu’aux Etats-Unis, tout est plus gros ?

J’vous ai pas dis, mais aux Etats-Unis, tout est plus gros ! ça passe par les hamburgers, ou même la cuisine en générale (les portes des frigos sont fabriqués de sorte à pouvoir contenir des bouteilles de trois litres (un galon), les boissons, les voitures (elles sont énormes, le premier jour j’étais « la vache ! Regarde cette grosse voiture ! … et celle-la… et elle aussi… là… là… là… » tant et si bien qu’au final le jeu consisterait plus à trouver la voiture de taille européenne.) Les gens sont plus gros aussi, ou disons plutôt qu’il y a plus de personnes en surpoids, et que les filles peuvent arborer un petit bidon sans avoir honte (enfin, je dis ça, j’suis pas une fille, mais j’en vois beaucoup comme ça, donc je suppose que ça doit être normal). Mais ne me méprenez pas, la grande majorité des étudiants ont un poids tout à fait correct. Ceux ayant un petit surplus sont juste plus nombreux qu’en France.

Et puisque l’on parle de filles, autant en faire un petit paragraphe. Imaginez un campus de 50 000 étudiants, imaginez ensuite que la majorité est féminine. Rappelez-vous ce que je vous ai dis sur les températures, et ce que cela implique sur la mode vestimentaire. Rappelez-vous encore que je vous ai dis que beaucoup de monde faisait du sport, et l’une des modes à UT est apparemment le mini short sportif découvrant toutes les jambes et laissant deviner le reste. Pensez alors que nous sommes dans une période où les cours n’ont pas encore commencés, une période pleine de fêtes donc, et de filles en tenues de soirées. Vous comprendrez alors aisément que le célibataire que je suis n’en fini pas de baver devant les incessantes beautés qui croisent mon chemin à longueur de journées.

Bref, revenons sur le paragraphe concernant les choses plus grosses. Vous pouvez donc imaginer quelque chose, à peu près n’importe quoi, et être assuré qu’aux Etats-Unis il sera plus gros. Et moins cher. Et ouais.

J’en étais resté sur mes fajitas en quantités. Une autre chose que j’adore ici, c’est qu’il est rare que le client finisse son assiette, mais ce qui est encore mieux, c’est la possibilité de demander une boite et d’emmener les restes chez soi. C’est normal, tout le monde le fait. Et ici, c’est l’équivalent d’un repas entier de fajitas que j’ai pu ramener et déguster le soir même.

Mais avant cela, j’ai eu la chance d’être amené sur un coin de la rivière (le Colorado) nommé Barton Springs. On peut notamment s’y baigner (mais cette histoire sera pour plus tard) et également y faire du Kayak, ce qui est l’activité prévue pour notre après midi. Ne restent plus qu’Hannah, trois de ses amis nouvellement invités, et moi. Etant un habitué du Kayak (cf : blog de Thaïlande/Malaisie http://b2c.uniterre.com/ article « Les varans se cachent pour mourir »… un petit peu de pub ne fait pas de mal) j’espère avoir la possibilité de disposer d’un Kayak solo, mais devant les demandes insistantes de « qui veut aller dans les deux doubles ? » je comprend que je ne suis pas le seul… mais apprendrais plus tard que j’ai mal compris, que personne sauf moi ne voulait le kayak solo. Au final, tout le monde était content : j’ai pu faire mon kéké (surnommé « le Dieu du Kayak » par Hannah, quand même !) et mes 4 camarades ont pu se relayer pour pagayer dans cette eau pas vraiment cristalline, mais fraiche.

Je me rend compte que je suis passé sur un événement d’une importance particulière : l’inscription aux cours. Celle-ci est très contrôlée, pour éviter que 50 000 étudiants n’essaient de se connecter en même temps sur le site de la fac (ce qui serait moche, à n’en pas douter). Chacun se voit donc donner une heure à partir de laquelle il est autorisé à s’inscrire. Allez savoir pourquoi, il fut décidé que les noms de familles en « D » passeraient en dernier. Déjà que tous les américains ont pu réserver leurs cours depuis avril, j’avais bien besoin de ça tiens. Il en résulte forcément que tous les cours m’intéressant sont pleins, à l’exception d’un, le seul que je suis obligé de prendre pour satisfaire Paris 8 (ça et réaliser un court métrage). Il ne me reste donc plus qu’à écrire à chaque professeur et l’implorer de me prendre dans sa classe, arguant que je suis français, génial, et que je suis prêt à n’importe quoi pour rejoindre son cours, même monter sur autre chose qu’un Mac (aaarrgh). Ça c’était pour la prof de montage avancé : victoire. Je suis aussi accepté dans un cours de Trans-média, pour ce que ça veut dire… mais ça collait dans mon emplois du temps. Manque de pot, tous les autres cours qui m’intéressant chevauchent soit le cours de montage avancé, soit mon cours imposé. Et hors de question de reprendre le genre de cours déjà subit 4785970 de fois à Saint-Denis, avec de la théorie du cinéma à n’en plus finir et des sommes de travail monstrueuses.

L’ennui, c’est que je suis obligé par l’organisme d’échange d’avoir un minimum de 12 crédits par semestre (sans quoi je serais radié). Un cours normal m’en offre 3, il me manque donc 3 crédits… mais aucune envie de prendre un cours juste pour des crédits, et non pour l’intérêt : je n’ai pas traversé l’atlantique pour faire quelque chose que je n’aime pas. Et qu’est-ce que j’aime à part le montage ? … Quelqu’un ? Je vois des doigts se lever au fond ? C’est bien ça : Le sport. Et avec des locaux comme ceux-là, il serait vraiment dommage de ne pas en profiter. L’ennui, c’est que les cours de sport n’offrent qu’un crédit chacun. Boarf, 3 cours valent mieux qu’un.

Mais une fois arrivé sur la page sportive, je refroidis rapidement : tous les cours sont pleins, excepté quelques cours de natation ou de travail sur son poids… ce dont je n’ai pas forcément besoin… mais également un cours de volley avancé, réservé aux joueurs de club confirmés ayant quelques années de jeu derrière eux… J’ai pas joué en club, j’ai joué l’équivalent de 6 mois de temps à Paris 8, sans équipe, mais 12 à 14 heures par semaines, si bien que mon niveau n’est pas sensé refléter mon « âge » sportif. On verra bien : je m’inscris.

Un cours de tennis pour débutant attire mon attention : j’écris au prof pour lui expliquer ma situation et lui demander s’il y a un petit spot sur un terrain pour le français que je suis. Et après ça, je ne sais plus quoi choisir, presque rien ne correspond… excepté un cours de volleyball intermédiaire… oh, et puis ça serait trop bête de passer à côté ! Après tout c’est devenu ma passion ! J’écris donc au prof un mail où je mets tout mon cœur, ma passion et ma détermination… ainsi qu’une tentative de corruption aux bonbons français spécialement ramenés du pays. C’est ce dernier point qui a marché, le prof ne pouvant pas résister à l’idée d’ajouter des bonbons français à son régime. Le prof de tennis quand à lui me propose d’assister aux premiers cours dans le cas ou certains élèves se désisteraient… parfait ! J’ai donc théoriquement, peut-être, mes trois crédits ! Rendez-vous dans quelques jours pour déterminer si oui ou non je serais bel et bien accepté dans ces cours.

Revenons à notre journée de kayak, pour passer au lendemain.

Lendemain, lundi 23 août (je préfère le préciser, parce que même moi je commence à être perdu, cela fait donc presque deux semaines que je suis arrivé) je retourne à Barton Spring en compagnie d’Hugo, David, Hannah et deux de ses amies, mais cette fois pour se baigner.

Sur le chemin du bassin, nous marchons en compagnie d’un vieux black américain, qui engage (et surtout fait) la conversation avec Hannah et moi-même. Il nous dira notamment avec son accent ultra prononcé « Vous noyez pas les gars, parce que je sais pas nager »… ok, merci du conseil ! Mais le mec super cool nous « verrouillera » la main, dans un salut que seul Andréa et Hannah peuvent comprendre, et ça, croyez moi, c’est vraiment super cool !

(Le Père Noël en vacances à Austin avec son chien)

Barton Spring possède une piscine naturelle (bétonnée ceci dit) disposant d’eau de source continuellement renouvelée. C’est le seul endroit de la ville où l’eau est à une température de 20 degrés toute l’année. Et 20 degrés, quand il fait presque 40 dehors, c’est dur… très dur…

Nous ne sommes donc que légèrement surpris de voir que la majorité des gens préfèrent rester sur les bords et ne tremper que leurs pieds. Mais nous ne sommes pas venu ici pour lézarder au soleil, mais bien pour se rafraichir. Impossible cependant de rentrer dans l’eau après l’avoir touchée, elle est vraiment très froide. Une seule solution donc : se jeter dedans. J’y vais le premier, suivi par Hannah, et maintenant qu’une fille est dans l’eau et leur honneur en jeu, Hugo et David nous suivent.

Je ne pense pas avoir été souvent dans une eau si fraiche, à tel point que j’évite à tout prix d’y plonger ma tête, et que respirer et nager comme un chien devient une obligation.

En parlant de chien, Barton Spring est séparé en deux parties : la payante (3 dollars) avec beaucoup de fond, un tremplin et un vrai rebords, et la partie gratuite (0 dollars… enfin gratuite quoi) pas de profondeur, rebords naturels, et des chiens. Beaucoup de chiens. Des chiens qui pissent sur les sacs des baigneurs, événement auquel j’ai pu assister avec grand plaisir, sachant que le chien en question, pas vraiment futé, a choisi le sac d’un baigneur encore assis à côté… et lorsque ce dernier s’est mis à gueuler, le chien s’est éclipsé aussi vite qu’il a pu, alors qu’il n’avait pas encore terminé son office, avec l’expression de surprise et de frayeur que peuvent arborer parfois certains animaux : « Ohmerdemerdemerde ! »

L’on pourrait croire qu’au bout d’un certain temps dans l’eau, l’on s’habitue à sa température. Eh bah nan. Pas moi. C’est super froid, et je profite que personne ne comprenne ma langue pour jurer, jurer et jurer encore… ça ne réchauffe pas vraiment, mais c’est de circonstance. Le bon côté des choses est que nous pouvons alors regarder tous les gens agglutinés sur les bords, et lancer à la cantonade (en français toujours) « Alors les p’tites tapettes ! On a peur de se mouiller ?! » puis de grelotter de plus belle.

Après une demi heure, nous décidons de sortir du freezer, et la sensation du soleil à sur notre peau est très certainement l’une des plus belles choses au monde (avec les spaghettis boulettes de ma Grand-Mère). Nous nous réchauffons un instant, tandis que les amies d’Hannah, nous ayant récemment rejoint, restent dans l’eau et nous incitent à les rejoindre. Malheureusement, l’heure tourne, et Hugo et David doivent rentrer pour une réunion dans leur co-op. Cependant, Hugo ne résiste pas à l’appel de ces demoiselles aucunement en détresse, et plonge les rejoindre pour un dernier bain. David résiste, tout comme moi, malgré les appels incessants de nos camarades. Ce n’est que lorsqu’Hugo emploiera à nouveau le mot « Tapette » que mon honneur me forcera à plonger. Mais David résistera encore et toujours au pouvoir de ce mot démoniaque.

Je ne m’attarderais pas sur le retour en bus, si ce n’est en précisant que mes deux compères eurent une heure de retard à leur réunion, pour la simple raison que le bus lui-même en avait une. C’est peut-être la seule chose que j’aurai à reprocher à Austin : son système de bus, même si tout à fait correct, n’est pas toujours au point.

"Fais moi péter ce bus Simone !"

Le soir Hugo, David et moi nous retrouvons chez moi pour regarder un film. Et tandis qu’Hugo, musicien depuis 15 ans, nous fait découvrir une toute nouvelle symphonie qui ne manquera pas de nous émerveiller, je me rends compte que cette année est vraiment partie pour devenir exceptionnelle.

Le lendemain (mais cet article ne finira donc jamais !) Hugo et moi nous lançons à travers la ville en bus pour retrouver un magasin, et sommes assez fier de notre résultat. Nous sommes officiellement devenus des Buskillers. Nous enchainons par un racketball où, cette fois-ci, je terminerais le match sur mes deux jambes. S’ensuit un repas dans une petite pizzeria italienne, où le serveur nous offrira les seuls mots qu’il connaît de français « ça va ? ça va comme ci comme ça ». Pourquoi ? Facile : vous connaissez tous « where is Brian ? Brian is in the kitchen », et bien ici, ils ont la même « Bonjour Jean-Pierre, ça va ? - ça va comme-ci comme-ça. - Oh, et qu’est-ce que tu aimes ? - J’aime la glace. - Quoi d’autre ? – Rien. Juste la glace. », et voilà, nous avons le premier cours de français par excellence.

Nous visitons ensuite le grand Capitole de la ville, bureau du gouverneur du Texas (anciennement Bush), avec des gardes à l’entrée habillés en policiers/cow-boy… assez impressionnant et classe, mais c’est sûrement fait pour.

Et le soir nous attend un grand évènement : une soirée organisée par UT pour fêter la rentrée (nous en sommes la veille). J’attends ce moment avec impatience, car quelques mois auparavant, j’ai reçu un mail me proposant de participer à un concours de vidéo, avec de beaux prix à la clef (le premier se voit offrir un Ipad) ainsi qu’une projection de sa vidéo pour les 5 premiers devant plusieurs milliers de personnes lors de cette soirée.

Déjà, rien que les préparatifs sont impressionnants : milliers de chaises installées en face de la tour, deux écrans géants et enceintes de partout, bref, une organisation de folie. De savoir que ma petite vidéo pourrait être projetée sur ces deux écrans me rend aussi nerveux que la veille du bac.

La soirée commence, et les étudiants arrivent, par milliers… ne sont présent que les premières années, les étudiants en échanges sont également invités, et après qui veut peut se joindre à la fête. Nous avons droit à de longs discours, et des courts métrages de propagande pour la fac. Nous réalisons alors à quel point le patriotisme, le chauvinisme, sont présent ici. Ils sont tous tellement fiers d’être étudiants dans l’Université du Texas… et je ne peux que les comprendre. Je n’ai jamais ressenti ce genre de fierté en France, mais ici j’ai rapidement le cœur gonflé de joie quand je réalise que je vais étudier dans ces superbes locaux pendant toute une année.

Mais quand même, leur patriotisme va un peu loin… la phrase qui reviendra constamment est « Ce que vous ferez ici changera le monde ». Va falloir que je m’en rappelle pendant mon cours de Volley. On dirait presque un coach motivant son équipe la veille d’un match important.

Le concours de vidéo arrive ensuite, et des noms sont appelés. Pas le mien. Déception, je pensais vraiment que ma vidéo était au niveau. Nous voyons ensuite les courts métrages des 5 vainqueurs, et la déception n’en est que plus forte : excepté le premier, qui a fait une superbe vidéo avec des effets spéciaux collant au thème, toutes les autres sont plus faible que la mienne, ne possédant qu’un énorme message de propagande pour l’Université, ce que je n’ai pas fais. La base du concours était simple : une vidéo pas plus longue que 30 secondes, dans laquelle nous intégrons la phrase « Bonjours, je m’appelle … et viens de …, et maintenant que les yeux du Texas reposent sur moi, voici ce que je voudrais qu’ils voient : » et après champs libre. Si j’avais pensé qu’il suffirait de gueuler « Hook’em Horns ! » (Slogan de la fac) en faisant le signe associé avec les mains, j’aurai probablement trouvé un moyen de l’ajouter dans ma vidéo toute française. Bref, j’ai trouvé ça dommage, surtout que sur 5 gagnants, 4 venaient du Texas. Aucun étudiant étranger sélectionné, il n’y a que le vainqueur qui venait d’un autre Etat.

L’énorme fanfare qui suit me fait un petit peu oublier ma déception, et l’immense drapeau du Texas déployé pour marquer le final me rend vraiment incrédule. C’est tellement différent… je n’imagine pas un seul instant un drapeau français déployé sur Paris 8 pour une quelconque occasion… il en résulterait une manif à coup sûr…

(Plutôt gros le drapeau hein?)

Nous concluons cette journée (et cette semaine ! Une semaine en un article ! Qu’est-ce que vous dites de ça ?! Haha ! C’est qui la Tapette maintenant hein ?!) par un bien mérité Burger King, parce que quand même, c’est toujours trop bon.

Demain, c’est la rentrée des classes… demain, il me faudra sans doute plus de lignes pour décrire les journées à venir…

En attendant merci pour votre fidélité et vos petits messages de soutiens, ils me font toujours chaud au cœur… (Une question récurrente concerne ma jambe : cela fait aujourd’hui un mois que l’accident a eu lieu, et la blessure guérit petit à petit, je vais clairement avoir une cicatrice de Warrior, mais tout va pour le mieux).

Plus le temps passe et plus je deviens surbooké, ce qui explique le temps entre les messages. Il devient plus dur de trouver la motivation et surtout le temps d’écrire. Vos messages deviennent cette unique motivation, donc merci à vous !

Et pour ceux que ça intéresse, voici le lien de ma petite vidéo : http://www.dailymotion.com/video/xevcjr_video-contest-texas-vincent-desgrip_fun

Oh, et voici également un lien vers l’album photo, régulièrement mis à jours :

http://picasaweb.google.com/116629063037548651097/AustinTexas20102011#

Vous pouvez le retrouver en haut à droite du blog, dans le petit diaporama d’images. Un clic dessus vous enverra sur le site hébergeant les photos. Attentions aux âmes sensibles, s’y cachent quelques photos de la blessure de guerre…

mardi 7 septembre 2010

L'Homme qui murmurait à l'oreille des 4x4

Dramatis Personae
Vincent Desgrippes : Héros. Sexy, intelligent et drôle. A le pouvoir de dire ce qu’il veut sur son blog.

Hugo Gabignon : Français (Toulouse), étudiant en échange à L’Université du Texas (UT). Aime les ordinateurs, le sport, et les hamburgers. Palmarès : a mi Vincent Desgrippes K.O. en lui explosant un testicule. Est également en recherche d’une personnalité (d’où l’achat de nombreux articles similaires à ceux de V.D.)

David Bastide : Français (Toulouse), ami d’Hugo, étudiant en échange à UT. Aime les ordinateurs, Star Wars, et les hamburgers. Caractéristique particulière : très grand.

Céline Liu : Française (Toulouse), amie d’Hugo et David, étudiante en échange à UT. Aime les ordinateurs, la physique, mais pas trop les hamburgers. Caractéristique particulière : très petite.

Chapitre V : L'Homme qui Murmurait à l'Oreille des 4x4.

Revenu la veille de Houston, je me rends à une réunion d’information pour les étudiants en échange à Austin. J’y retrouve la coordinatrice des échanges internationaux, Kirsten Koester, avec qui j’avais échangé de nombreux mails avant mon départ. C’est elle qui va mener la réunion, en nous expliquant toutes les choses à savoir quand on est un étudiant étranger à UT.
Quelques chiffres : nous sommes 277 étudiants en échange à UT ce semestre. Ce qui peut paraître un beau nombre, surtout quand nous sommes tous réunis dans la même salle. D’un coup on se sent moins exceptionnel…

- « Hey j’suis français ! T’as vu comme c’est cool ?!
- Ah ouais ? moi J’viens de Nouvelle Zélande.
- Moi d’Australie !
- Japon !
- Népal… »

On a tout de suite l’air moins cool face à la concurrence. Le bon côté des choses est qu’il y a 50 000 étudiants Américains à UT, donc au final on a assez peu de chance de se retrouver tous dans la même classe et de ne plus être aussi méga cool qu’on le voudrait. Aussi, la moitié des étudiants en échange viennent d’Asie, ce qui rend les européens encore plus rare. 25 Français en tout, et je pense en avoir rencontré une bonne moitié, mais je n’ai aucun cours avec eux, et les rares fois où je retrouve d’autres étudiants internationaux, ils sont souvent asiatiques (ce qui me va très bien, ici les asiatiques sont tout sauf exceptionnel… et en plus ils se ressemblent.)

Bref, revenons à cette réunion d’information. En rentrant dans la salle, Gustave (un français que j’ai eu l’occasion de rencontrer à un diner franco/américain organisé par l’organisme d’échange parisien) me reconnaît et me fait signe. Je me retrouve rapidement entouré de français, ce qui est loin d’être mon intention première : après tout, j’ai pas fais 8000 kilomètres pour faire ami ami avec des gens habitant dans la même ville que moi !

Du moins, c’est ce que je me disais, mais après une semaine sans prononcer un mot de français (ou alors en m’excusant rapidement après et en rajoutant la traduction anglaise) un peu de francophonie n’est pas de trop… et puis rien de m’oblige à devenir leur pote.

Et pendant toute la durée de la réunion je m’en sors pas trop mal. Je fais quelques connaissances, mais reste assez reclus dans ma rangée de derrière pour ne pas donner aux autres trop d’opportunités pour devenir pote (après tout, c’est chiant de tourner la tête pour parler).

Parmi les points abordés dans la réunion, Kirsten nous parlera notamment du système de santé américain, et du fait que si on a un problème, quel qu’il soit, ça risque de devenir rapidement très chiant, et surtout très cher. Exemple : une journée à l’hôpital peut rapidement coûter 10 000 dollars (7800 euros), qui sont certes en partie remboursés par l’assurance française… quand on leur envoi les papiers. Ce qui signifie que c’est à nous de payer avant (prévoir de cambrioler une banque en cas de maladie).
Bref, la conclusion de cet exposé a été simple : ne pas tomber malade pendant un an. Ne pas finir à l’hôpital. Ça devrait être simple.

**** FLASH FORWARD ****
12 heures plus tard, un peu avant minuit, je suis sur mon vélo, entrain de descendre rapidement une côte pour rentrer chez moi. Je viens de quitter mes nouveaux potes, et suis assez euphorique au souvenir de cette rencontre. Ce semestre risque d’être encore mieux que prévu. La voiture devant moi n’avance plus. Il est trop tard pour freiner, j’essaye de l’éviter, mais je la percute à pleine vitesse de tout mon côté droit. Je vole sur la route, heurte le sol et roule sur quelques mètres. Tandis que la porte du véhicule s’ouvre, mes pensées sont concentrées sur trois points : choc, douleur, sang.
**** END OF THE FLASH FORWARD ****

Simple comme bonjour même !

Je remarque rapidement que les Français sont parmi les seuls à parler pendant certaines présentations… ce qui ne me rend pas très fier. En revanche, trois étudiants juste devant moi ne bronchent pas, sauf pour se murmurer quelques observations. Ils se retournent parfois en rigolant lors de certaines de mes remarques, ce qui leur fait rapidement gagner des points.

Aussi, au moment de quitter la réunion (tout le monde fait la queue pour payer 12 dollars ce qui sera le barbecue le plus cher et le moins fourni de l’Histoire des Etats-Unis), je m’arrange pour me retrouver près de leur groupe. La conversation s’engage rapidement : ils sont tous les trois dans la section « engineering », deux d’entre eux dans les ordinateurs, et la troisième en physique (j’espère ne pas me tromper, sinon je vais me faire taper). Bref, je viens de rencontrer Hugo, David et Céline, étudiants toulousains, et je ne m’en rends peut-être pas compte sur l’instant, mais cette rencontre sera l’événement déclencheur d’une réaction en chaine ayant pour conséquence des moments d’intense joie, d’aventure, et l’extinction de l’univers que nous connaissons aujourd’hui. Quoi que j’exagère peut-être un petit peu sur ce dernier point.

Céline, Hugo et David, heureux de perdre au bowling.

Le fait est qu’une nouvelle connaissance Coréenne (ils sont partout j’vous dis), colloc’ de Céline, nous demandera sur les coups d’une heure de l’après midi depuis combien de temps nous nous connaissons. Elle rigolera lorsqu’on lui répondra « deux heures », et ne comprendra que le soir même que nous ne lui faisions pas une blague. « Mais vous avez l’air de vous connaître et vous entendre tellement bien ! ».

Avant que je quitte la France, plusieurs de mes proches m’ont assurés que je m’attirerais des personnes qui me correspondent. Bien sûr, je l’espérais, mais je n’aurais pu imaginer que cela serait à ce point. Après toutes ces rencontres sympathiques mais somme toute superficielles, me sentir tellement à l’aise dans un groupe quelques heures à peine après l’avoir rencontré me rempli d’une joie incrédule.

Car après tout, je sais que je ne suis pas quelqu’un de facile à vivre pour la jeunesse actuelle : Pas d’alcool (- Oh my Gooood ! But whyyyyy ? – Because it doesn’t interest me to drink… and you can call me Vin’s), pas de cigarette, et pas de cigarettes qui font rigoler. Pas de soirées en boites non plus d’ailleurs, ni d’affections particulières pour les bars bruyants et les cocas de 25cl à 4 euros (bien qu’ici ils soient à 1.50 dollars avec remplissage à volonté).

Bref, je suis probablement le pire étudiant du monde concernant les critères d’amusement moderne, mais j’en tire une certaine fierté. Aussi comme vous vous en doutez, c’est pas super évident de fraterniser avec l’étudiant moyen venu à Austin pour rejoindre les Fraternités (Grandes maisons gérée par des étudiants, très difficile à intégrer (critères d’intégration particuliers demandés, l’un des principaux devant être de boire plus que son poids en alcool), et organisant de grosses fêtes à peu près tout le temps).

Mais comme je vous le disais, sur le moment, je ne me rendais pas encore compte que je venais de rencontrer des spécimens ayant plus ou moins les mêmes goûts que moi. Nous nous décidons rapidement à aller manger dans une cantine tex-mex, où en gros on choisit le type de plat (tacos, burritos, fajitas… pour les différencier c’est assez simple : les tacos vont toujours par deux ou trois et sont de petites galettes qu’on remplit d’ingrédients délicieux, le burrito est une grosse galette pleine d’aussi bonnes choses (mais du genre énorme, pour s’en rappeler faut juste se dire que le burrito bourre), et les fajitas sont des galettes moyenne que l’on remplit également nous-mêmes d’encore plus excellentes choses) et ensuite l’accompagnement. Bref, nous testons tous un plat et partageons nos impressions. Avec mes trois tacos je suis le seul à finir mon repas, assez lentement ceci dit, ce qui nous laisse le temps de faire plus ample connaissance.

Hugo m’apprends qu’il est possible de réserver des salles dans le gymnase du campus pour jouer à différents sports, du coup nous décidons d’en réserver une pour la soirée et de jouer au racketball avec nos deux compères francophone et une poignée de Coréennes (le Racktball ressemble au squash, sauf que la balle rebondit beaucoup plus). Mais n’ayant pas de vêtements adéquats, Hugo et moi nous rendons dans un magasin de sport sur Guadalupe.

La moitié des vêtements fournis sont à l’effigie du Longhorn, ce taureau à longues cornes emblème de l’université. Il est impossible de se promener sans rencontrer quelqu’un portant un tee-shirt ou une casquette le représentant… d’ailleurs Hugo s’achète une tenue de sport complète marqué du sceau des longues doubles cornes du « Bévo ».

Petite observation intéressante : en France, je porte du L. Ici, je pourrais rentrer deux fois dedans. Et probablement inviter une ou deux amies. Je suis contraint d’essayer du S pour trouver un tee-shirt à ma taille… sachant qu’il n’y avait pas de taille en dessous… pourtant, malgré l’idée que l’on pourrait s’en faire, il y a assez peu de personnes en surpoids à Austin, l’étudiant moyen est bien proportionné, et faire du sport est une activité très répandue. Alors pourquoi les personnes d’un gabarit inférieur au mien devraient s’habiller au rayon enfant ? Mystère… bien que j’ai perdu 3 kilos depuis mon arrivé, je n’ai pas non plus la peau sur les os… enfin, pas complètement. (Il va falloir que je commence sérieusement à penser à ce régime à base de hamburgers.)

Nous terminons ce petit moment de shopping par l’achat de belles chaussures de sport (où Hugo, très certainement en manque de personnalité, n’a pu s’empêcher de prendre les mêmes que moi) et nous dirigeons ensuite vers le gymnase pour une petite visite. Je suis le seul des deux à n’y avoir pas encore mis les pieds, et lorsqu’Hugo me prévient que pour me faire une idée de sa taille, je dois imaginer quelque chose d’immense, et que ça sera encore plus grand, j’imagine en effet quelque chose d’immense, en étant persuadé que ça ne peut pas être plus grand.

Mais à Austin, dès qu’il est question de taille, tant qu’on ne l’a pas vu soi-même, on ne peut pas l’imaginer. Et en effet, ce gymnase, je ne pouvais tout simplement pas l’imaginer.

En tant qu’étudiant, nous y avons accès tous les jours de 6 heures du matin à 1 heure… du matin. Nous pouvons réserver les salles tant qu’il n’y a pas de cours, et emprunter le matériel nécessaire au jeu. Le complex est constitué d’un grand hall menant à toutes les salles. Sur notre droite, nous avons accès aux 10 salles de racketball, les unes à côté des autres, où des spectateurs peuvent se loger sur les hauteurs pour voir les étudiants ou professionnels jouer. Les murs de certaines salles sont même constitués de plastique transparent, et l’une de gradin.

Sur notre gauche, nous avons accès à la salle de musculation. Là je m’attendais au même genre de salle dont dispose Paris 8 : relativement petite, basse de plafond, tout en longueur, avec une ou deux machines de chaque sorte. La salle de muscu d’UT est de la taille d’un grand gymnase, avec un champ d’appareils de musculation en tout genres. Mon appareil photo dispose d’un grand angle, et pourtant je n’ai pas pu la prendre en entier d’un seul coup.





Lorsque nous montons les marches menant à l’étage, nous tombons sur la gauche sur un immense gymnase, séparé par trois grand filet blanc qui délimitent trois terrains de basket, ou 6 terrains de volley, au choix. De grands gradins sur les côtés permettent d’en faire une salle accueillant les grands matchs de volleyball interuniversitaire (UT faisant régulièrement parti des finalistes). Au fond se trouve une longue estrade sur laquelle trônent 6 tables de ping pong.



Lorsque nous retraversons le hall, nous tombons sur un nouveau gymnase… deux fois plus grand que le précédent, et possédant donc 6 terrains de basket, ou 12 de volley. Pas de gradin ici, mais une piste de course de compétition en hauteur entourant les terrains au sol.




Les vestiaires sont assez grands pour accueillir une armée d’étudiants avides de suer corps et âme dans le but de se forger une silhouette digne d’Apollon, et lorsque l’on sort de l’autre côté, c’est là que j’ai commencé à sérieusement douter de ma santé mentale: une grande piscine de longueur entouré de transats, précédent une grande piscine de détente, style Club Med… précédent la piscine sportive possédant un filet de volley et des paniers de basket. Oh, et j’oubliais le jacuzzi. Et la grande piscine intérieure. Et le saunât. Et je ne plaisante pas.


Des petites crises de rire d’incrédulité me prennent au fur et à mesure que je découvre tous ces éléments à la disposition complète des étudiants. J’avais entendu dire que UT était la première fac des Etats-Unis concernant le sport, et aujourd’hui je commence à comprendre pourquoi. Les couloirs du gymnase sont décorés de centaines de photos synonymes de victoires pour différents sports, des vitrines pleines de coupes en tout genre rappellent constamment aux étudiant qu’ils s’entrainent dans un gymnase de winners… et les incitent à en faire partie.

L’heure tourne et nous retrouvons rapidement nos camarades pour découvrir ensemble le racketball. Nous sommes 7, et avons donc réservé deux salles. Pour ceux ne connaissant ni le racketball ni le squash (ce qui était mon cas), c’est un sport de raquettes pouvant se jouer à 2, 3 ou 4, dans une petite salle fermé où tous les murs (y compris le plafond) font partie du jeu. Le but étant (lorsque nous ne connaissons pas les règles, ce qui est notre cas) de faire rebondir la balle le plus fort et le plus virilement possible dans tous les coins de la pièce, puis de pousser quelques cris de bêtes en frappant des mains sur le sol. Après plusieurs mois sans sport, nous nous accordons sur le fait que cela fait un bien fou.

Dès le lendemain, Hugo et moi essayerons de jouer selon des règles trouvées sur internet, ce qui donne clairement un nouvel intérêt au jeu. En revanche, probablement frustré par sa défaite lors du premier set, Hugo ne pourra s’empêcher d’utiliser un vicieux rebond sur un mur de la pièce pour m’atomiser le testicule gauche. Et il me semble ne jamais avoir reçu un coup à cet endroit avec une telle force... et une telle précision. Lorsque l’on dit de viser les bijoux de famille lors d’un combat, c’est pas des conneries ; il est clairement impossible de bouger de la position fœtale pendant les premières minutes, et également impossible de marmonner autre chose que « putain… » « aaaaah… » et « aaaah putain… » pendant celles qui suivent. J’ai clairement été knock out pendant 45 minutes, ce qui a terminé le match, avec pour conséquence ma volonté de prendre ma revanche le soir même au bowling… Hugo ne perdait rien pour attendre… le bowling est un sport où je sais être très précis aussi…

Mais revenons à la journée précédente, et notre partie de racketball dont je suis sorti avec une virilité intact, voir même renforcée (une légende rependue parmi l’étudiant moyen est de croire que taper fort dans une balle devant une fille pour l’impressionner renforce le taux de globules masculines dans le sang… c’est partiellement vrai.)

Nous nous dirigeons vers un fast food nommé Whataburger pour déguster un gros hamburger bien mérité. Il me semble qu’aucun de nous n’arrive à terminer son repas, ou alors très difficilement. Nous testons les différentes boissons disponibles dans le « free refill », et échangeons à nouveau nos impressions sur les hamburgers choisis. Encore une fois ici, la liste de choix était longue comme nos bras réunis, j’ai donc à nouveau demandé lequel était la spécialité du restau… étrangement, c’était à nouveau le plus cher… mais encore une fois, ça valait le coup.

Nous nous séparons ensuite, avec la promesse de se retrouver le lendemain matin à la piscine de l’université, et éventuellement y jouer un peu de volley.

J’enfourche mon vélo, l’esprit clair et heureux. Pour la première fois, je viens de me faire de vrais potes, et à la fin de cette journée nous avions l’impression de nous connaître depuis des années.

Je perds mon sourire lorsque je me rends compte que le gros 4x4 devant moi n’avance plus. Je n’ai plus le temps de freiner, alors j’essaye de l’éviter en donnant un coup de guidon vers la gauche, mais la vitesse accumulée par la descente dans laquelle nous nous trouvons m’empêche de dépasser l’arrière du véhicule. L’avant du vélo frôle le clignotant arrière, et le dépasse, mais tout le côté droit de mon corps percute violemment la voiture, et la vitesse me fait m’envoler par-dessus mon vélo. Je heurte la route au niveau de la portière du conducteur et roule quelques instants par terre. Par chance, il est 23h, et aucune voiture n’arrive derrière au moment de l‘impact.

Ma première pensée n’est pas « j’espère que je n’ai rien de cassé », qui est ma deuxième pensée. Ma première pensée, très stupidement, survient lorsque le conducteur ouvre sa portière : je me demande alors si il va m’engueuler, car je n’ai aucune idée de ce qui vient de se passer : pourquoi cette voiture s’est-elle matérialisée à l’arrêt devant moi ? Est-ce de ma faute ?

Le temps que le conducteur descende, je fais un rapide check-up : j’ai mal un peu partout, mais rien ne semble cassé. Ma tête n’a heurté ni la voiture, ni le sol. Mon bras et ma jambe droite sont douloureux et couverts de poussière noire, mais par chance mes mains ne sont que légèrement égratignées. Je me relève en tremblant, prend mon vélo encore gisant au milieu de la route et boitille jusqu’au trottoir. Entre temps j’entend le conducteur s’exclamer avec un accent mexicain « I’m so sorry, are you alright ? ». Bon, premier point positif : il va pas m’engueuler.

Je lui réponds rapidement que oui, je me sens bien. Encore tremblant du choc, mais plutôt bien. Je pense même reprendre immédiatement la route, vu qu’il ne reste que 5 minutes jusqu’à chez moi, j’aurai le temps de faire l’inspection des dégâts sur place. Cependant, le conducteur, se présentant au nom de Virat, m’en empêche et me demande d’attendre quelques minutes pour être sûr que je vais bien. Et il a fichtrement raison, car trente secondes plus tard, je commence à me sentir mal. Il remarque que j’ai une plaie à la jambe que n’avais pas vu. Elle saigne un peu et semble profonde, avec plein de terre dedans.
A ce moment, je me sens de moins en moins bien, et il me propose alors de me chercher quelque chose à boire, ce que j’accepte rapidement. J’ai besoin de sucre ; je suis entrain de faire un malaise.
Probablement le fait de réaliser que je viens d’avoir un accident, que je suis blessé… bref, le contre choc, et il est pas génial à vivre : je me sens nauséeux, ai la tête qui tourne et l’envie de vomir qui monte. Il me fait asseoir à l’avant de son 4x4 le temps d’aller acheter une boisson, durée pendant laquelle je fouille dans mon sac à dos pour en sortir un sac plastique (si je dois vomir, autant que ça soit le plus dignement possible).

Au final, mon estomac arrive à contenir la révolte de Whataburger furieux, et les minutes passant je me sens de mieux en mieux. Il revient rapidement avec un smoothie et des barres de céréales, s’excusant à nouveau plusieurs fois. Apparemment, un piéton a traversé devant lui sans utiliser de passage piéton, et il a donc freiné en prévention sans vérifier s’il y avait quelqu’un derrière. Il se sent responsable, ce qui me va très bien, et propose de m’amener à l’hôpital, ce que je refuse vigoureusement : la leçon reçu le matin même a servie, pas question de payer ! Mais il dit que les frais seront à sa charge, ce qui est très généreux de sa part. Virat le Gentleman, Virat le Généreux. Il n’empêche que je n’ai pas envie de passer les heures suivantes dans un hôpital pour une blessure à la jambe. Je l’examinerais moi-même, et si j’estime qu’il y a besoin de l’avis d’un docteur, j’appellerais mon nouveau super pote pour payer tout ça, ce qui (selon ses dires) lui ferait vraiment plaisir. Virat le Sauveur.

Il met mon vélo dans son coffre et me dépose chez moi, insistant à nouveau pour que je l’appelle si jamais je devais avoir une quelconque dépense.

Une fois chez moi, avant de nettoyer la plaie, je veux en prendre une photo, en souvenir. C’est là que je me rends compte que mon réflex numérique n’est plus dans mon sac. J’essaye de me rappeler où j’ai pu le mettre, puis me remémore l’accident : j’ai tout d’abords fouillé dans mon sac sur le trottoir pour y chercher un sac plastique, puis dans sa voiture. J’ai du déposer l’appareil photo dans l’urgence des recherches… pitié, pas sur le trottoir…

J’appelle Virat en urgence, lui demande s’il voit un appareil photo à côté de lui. « Let me see… actually, yes ! It’s here ! I’ll bring it back to you right now. » Virat L’Honnête Homme.

Une fois ma photo prise, je regarde ma plaie d’un peu plus près : elle est vraiment sale, et profonde. Je pensais disposer des produits nécessaires à la nettoyer, mais après un premier passage je vois que ça va clairement pas être assez. Une rapide recherche google, et je vois qu’une pharmacie se situe à 10 pâtés de maison de chez moi. Sachant que les pharmacies sont ouvertes 24h/24, je m’y rends à pied, ce qui me prend une quinzaine de minutes.

Pendant ce trajet, je repense un petit peu à l’accident, et des détails commencent à me revenir. L’un d’eux m’amuse tout particulièrement : un SDF m’a vu percuter la voiture, et s’est aussitôt dirigé vers nous. Il est arrivé à mon niveau au moment où j’ai commencé à me sentir très nauséeux. Il m’a alors demandé si j’allais bien. N’ayant pas envie de rentrer dans les détails, je hoche la tête et lui répond que oui. Il enchaine aussi net en disant « Ok cool. T’aurais pas un peu de monnaie par hasard ? ». A ce moment là, cela fait une minute que je viens de percuter une voiture, sur laquelle je m’appuie difficilement, je suis sans doute blanc comme un linge, entrain de saigner et avec une forte envie de dégueuler, et ce mec se pointe et me demande mon fond de porte feuille. Sur le coup ça ne m’amuse que très moyennement, et je refuse avec un petit peu d’incrédulité dans la voix… ce qui ne l’empêche pas de s’en retourner vers Virat pour lui demander à son tour quelques pièces. Une demi heure plus tard, cela me met de très bonne humeur tandis que je rejoins la pharmacie.

Une fois sur place, j’achète un puissant désinfectant, et une crème de soin sensée nettoyer la plaie. Je me perds dans les rayons de cette pharmacie géante ressemblant à un supermarché, où le client met lui-même les produits dans son panier.

J’achète également une boite de pansement waterproof, avec en tête l’idée de la piscine du lendemain.

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De retour chez moi, je me mets à nettoyer consciencieusement ma plaie. Hors de question qu’en plus de me bouffer une bagnole j’ai à subir une infection ! ça m’ennuierait particulièrement de me faire couper la jambe. Je rase tout d’abords à la tondeuse toute la partie entourant la plaie, pour éviter que des poils ne se collent constamment à l’intérieur. Des morceaux de peau et de chair pendouillent à certains endroits, particulièrement peu élégants, et je n’ai aucune envie qu’ils se mettent à cicatriser pardessus, surtout que leur couleur a viré au noir. Je stérilise donc un puissant ciseau neuf, et après deux grandes inspirations je coupe les deux morceaux indésirables.

Je me souviens que 6 ans auparavant, lors d’une opération similaire sur une surface beaucoup plus petite, l’idée seule de me faire couper un bout de chair au ciseau par une personne non qualifiée m’avait donné un léger malaise. Aujourd’hui, je souris devant le sang froid qui m’occupe. Le fait de manier le ciseau m’aide à me sentir maitre de la situation, et aucun malaise n’essayera de s’infiltrer en douce.
Je place ensuite ma jambe dans la baignoire, et utilise le désinfectant à la manière d’un jet directement sur la plaie, faisant mousser les parties sanglantes. Vient ensuite le moment qui m’inquiète le plus : le nettoyage. Bien entendu, un jet ne suffit pas à nettoyer tout ce qui s’est incrusté à l’intérieur, et il va donc falloir que je frotte fort pour vider la plaie de la moitié de route qui y a élu domicile. Je commence par retirer un à un les poils coupés tombés dedans, ce qui n’est pas la partie la plus réjouissante (fouiller dans une plaie à la recherche de poil incrustés dans le sang avec pour seule pince des ongles plus où moins longs). Une fois ceci fait, je frotte vigoureusement, pendant une dizaine de minutes, à la manière d’un collectionneur nettoyant sa belle Porsche. Bien sûr, ma plaie est loin de ressembler à une Porsche (elle n’a pas de roues), mais une fois l’opération terminée, je suis plutôt fier de moi. J’y applique finalement la crème magique, et vais me coucher en me disant qu’en fonction de la couleur qu’aura la blessure le lendemain, j’irais peut-être à la clinique de la fac, juste pour être sûr que j’ai bien fait tout ce qu’il faut.

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Je m’endors assez rapidement, mais me réveille sur les coups de 4 heures à cause de la douleur. Une poignée d’heures plus tard, je me lève, et vérifie les dégâts. Je ne sais pas si je dois être fier ou inquiet de mon œuvre ; il y a là toutes les couleurs de l’arc en ciel, plus le blanc. Je me décide finalement à aller à la clinique de la fac, tant pis pour la piscine.

Une fois dans le bâtiment médical, une rapide discussion avec une secrétaire et quelques formulaires remplis plus tard, je me retrouve dans une pièce avec deux infirmières m’appelant « Darling », « sweet heart » et « dear » et une charmante doctoresse. Toutes s’accordent à dire que j’ai fais du très bon boulot, mais qu’il faudrait faire une piqure de tétanos au cas où (mon fichier n’indique pas de piqure récente) et brosser un peu la plaie pour essayer de faire sortir ce que l’on prend pour un débris (sur lequel je me suis acharné la veille sans arriver à le faire sortir).

Je me prépare à subir un calvaire lorsqu’une infirmière sort une éponge rugueuse d’un sachetnplastique, et m’amuse en voyant l’autre essayer de me distraire en me massant délicatement l’épaule au niveau de la piqure et me racontant ses vacances en ski dans les alpes. Au final, ni mon égo ni ma virilité n’auront soufferts de ces 5 minutes de brossage, juste ma jambe, mais serrer les dents et contrôler ma respiration aura été suffisant pour prévenir tout cri de fillette. Le plus drôle dans tout ça est que le débris n’en était pas un, juste une coloration de la peau après un frottement. Haha. Ce qu’on peut se marrer dans la clinique de la fac.

Drôle aussi le moment où je vais payer ma note. Durant l’année scolaire, voir un médecin à la clinique ne coûte que 5 dollars, ce qui est super vu le coût des soins médicaux aux Etats-Unis. Sauf que l’année scolaire ne commence que deux jours plus tard. Haha. Je dois payer 60 dollars au lieu de 5. Hahaha. Hilarant. Oh, et la piqure de tétanos ? 70 dollars. Haha. Haha. Qu’est-ce qu’on se marre. D’ailleurs ils ne savent pas si mon assurance française va me rembourser. C’est trop d’humour pour moi en un seul coup, je prends donc congé après avoir payé.

Mais je m’en vais avec la pensée rassurante de Virat proposant de couvrir les frais. Virat avait l’air de gagner correctement sa vie, cela ne devrait pas poser de problème. Je l’appelle donc et lui explique les évènements de la mâtinée. Il accepte en demandant à voir les factures. Pas de problème. Virat L’Homme de Parole.

Je rejoins ensuite mes nouveaux potes à la piscine, et apprécie quelques instants les yeux écarquillés devant le gros bandage qu’ont confectionnés les infirmières. Bandage qui m’empêche de me baigner par ailleurs, mais c’est un faible prix à payer quand l’alternative est d’impressionner une brochette de filles en maillots de bain.

Je reste ensuite avec Hugo et David pour le repas, sur le chemin duquel Virat m’appelle. « Allo Vincent ? ça va mieux ? Dis, en fait, je vais pas pouvoir payer. Nan, ça va pas être possible. Désolé, et bonne chance hein ! Salut ! ». Virat le Traitre. Virat le Bâtard.

Reste plus qu’à espérer que l’assurance française couvrira les frais… une fois rentré en France. Haha. En tout cas cette aventure m’aura permis de réaliser qu’à vélo on est tout sauf invincible, et qu’acheter un casque n’est pas juste une option pour les blaireaux qui veulent bousiller leur coupe de cheveux… si je n’avais pas donné ce coup de guidon, mon visage non protégé aurait percuté le coffre du 4x4, et j’aurais alors certainement moins fait le fier devant les filles…

Mais quand même, c’est chiant… j’vais avoir l’air con avec les cheveux plats…